Communiqué de presse

Indonésie. Il faut enquêter sur des attaques menées par des militaires contre des villageois à Wamena, en Papouasie

Les autorités indonésiennes doivent mener dans les meilleurs délais une enquête indépendante et impartiale sur les informations faisant état d’un recours excessif et inutile à la force, notamment aux armes à feu, par les forces de sécurité à Wamena, dans la province de Papouasie.

Dans l’après-midi du 6 juin, deux soldats à moto ont, selon certaines informations, renversé et blessé un enfant de trois ans qui jouait au bord de la route dans le village de Honelama, à Wamena. Les villageois qui ont assisté à l’accident ont pourchassé les soldats, ils en ont poignardé un à mort et ont blessé l’autre.

En représailles, deux camions de soldats du bataillon militaire Yonif 756/Wamena sont arrivés peu après au village de Honelama et auraient ouvert le feu de manière arbitraire, tuant Elinus Yoman. Selon des sources locales fiables, les soldats ont également frappé une dizaine de personnes à coups de baïonnettes. Ils auraient incendié des dizaines de maisons, de bâtiments et de véhicules au cours de l’attaque. Nombre de villageois ont fui le secteur et ont peur de rentrer chez eux.

Amnesty International reconnaît les difficultés auxquelles se heurtent les forces de sécurité en Indonésie, particulièrement lorsqu’elles sont confrontées à la violence. Les personnes soupçonnées d’avoir commis des crimes violents, notamment contre les membres des forces de sécurité, doivent être déférées à la justice. Cependant, les suspects doivent être identifiés individuellement en vue d’être arrêtés et poursuivis dans le respect de la loi ? il n’y a pas de place pour les sanctions collectives, le hasard, ni la violence vindicative.

Par ailleurs, l’usage de la force par les responsables de l’application des lois est restreint par le droit international et les normes internationales relatifs aux droits humains, fondés sur la nécessité de respecter et de protéger le droit à la vie. Ce droit est garanti par l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel l’Indonésie est partie, qui prévoit qu’on ne peut en aucun cas y déroger, même dans des situations d’urgence. En outre, la Constitution indonésienne garantit le droit à la vie.

Si les enquêtes concluent que les forces de sécurité ont perpétré des homicides illégaux ou utilisé une force inutile ou excessive, alors les responsables, y compris ceux exerçant une responsabilité dans la chaîne de commandement, doivent être poursuivis devant des tribunaux civils, dans le cadre de procédures conformes aux normes internationales d’équité. Les victimes doivent obtenir des réparations.

Des provinces de Papouasie et de Papouasie occidentale parviennent des informations crédibles relatives à des atteintes aux droits humains commises par les forces de sécurité, notamment des actes de torture et des mauvais traitements, un recours excessif et inutile à la force, notamment aux armes à feu, et des homicides illégaux.

Bien que le président Susilo Bambang Yudhoyono ait déclaré publiquement en février 2012 que les affaires relatives à des violations des droits humains feraient l’objet de poursuites judiciaires et que les auteurs seraient sanctionnés, les enquêtes sur les allégations d’abus commis par les forces de sécurité sont rares et les responsables sont peu nombreux qui comparaissent devant les tribunaux.

L’absence d’obligation de rendre des comptes est exacerbée par le maintien de la Loi sur les tribunaux militaires (Loi 31/1997). Les membres de l’armée inculpés d’infractions relatives aux droits humains comparaissent devant des tribunaux militaires. Amnesty International a exprimé ses préoccupations quant au manque d’indépendance et d’impartialité de ces procès.

Amnesty International exhorte le gouvernement indonésien à remédier à la culture de l’impunité en Papouasie et à prendre les mesures qui s’imposent afin que tous les membres des forces de sécurité responsables d’atteintes aux droits humains répondent de leurs actes. Le gouvernement doit immédiatement réviser la Loi sur les tribunaux militaires, afin que les militaires soupçonnés d’infractions relatives aux violations des droits humains fassent l’objet d’enquêtes et soient jugés dans le cadre d’un système judiciaire civil indépendant, et que les victimes et les témoins bénéficient d’une protection appropriée.

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