Communiqué de presse

Sierra Leone. Le pays doit libérer huit personnes détenues arbitrairement après une émeute liée à Ebola

La Sierra Leone doit libérer immédiatement huit personnes détenues sans inculpation depuis plus de trois mois après une émeute liée à l’épidémie d’Ebola, à moins de faciliter le réexamen de leur détention par une autorité judiciaire, a déclaré Amnesty International vendredi 30 janvier.

Deux femmes et six hommes sont incarcérés dans les prisons de sécurité maximale de la capitale depuis leur arrestation en octobre 2014 dans la région de Kono (est du pays). Ils font partie des 34 personnes placées en détention sur ordre du président Ernest Bai Koroma au titre de l’état d’urgence. Vingt-six d’entre elles ont été libérées, mais huit sont restées détenues arbitrairement. Aucun mandat ni autre document n’autorise leur détention et aucune date n’est prévue pour leur libération.

Leurs arrestations sont liées à une émeute qui a eu lieu à Kono, déclenchée par un cas suspecté mais contesté d’Ebola chez une patiente de 90 ans qui était la grand-mère d’un responsable politique local. Sa famille était accusée d’avoir empêché les autorités sanitaires de l’emmener passer un test de dépistage du virus. Au moins deux personnes ont été abattues lors de ces événements. Des témoins ont indiqué que la police avait tiré à balles réelles pour disperser la foule.

« Détenir des personnes indéfiniment sans inculpation ni réexamen de leur détention est inacceptable et n’aide aucunement à régler la crise d’Ebola. Le président doit libérer immédiatement les huit détenus ou permettre le réexamen de leur situation par un tribunal indépendant, comme l’exige la Constitution de la Sierra Leone », a déclaré Sabrina Mahtani, chercheuse d’Amnesty International sur l’Afrique de l’Ouest qui s’est récemment rendue en Sierra Leone et entretenue avec les deux femmes incarcérées.

« Malgré les difficultés de l’épidémie d’Ebola, les restrictions de certains droits humains au titre de l’état d’urgence doivent respecter les normes internationales et il ne faut pas abuser de ces pouvoirs. »

Une organisation de défense des droits des femmes, AdvocAid, a écrit au président le 9 janvier pour demander la libération des deux femmes mais n’a pas encore reçu de réponse. Ces détentions arbitraires ont été dénoncées par plusieurs organisations locales de la société civile, dont le Centre pour l’obligation de rendre des comptes et l’état de droit, Amnesty International Sierra Leone et Prison Watch Sierra Leone, mais sans effet jusqu’à présent.

Amnesty International est également préoccupée par le fait qu’aucune enquête sérieuse n’ait encore été menée sur la mort de personnes au cours de l’émeute. L’organisation soulève depuis plusieurs années la question du respect de l’obligation de rendre des comptes de la police en Sierra Leone. Le gouvernement n’a pas pris les mesures nécessaires pour enquêter sur les policiers accusés de recours arbitraire ou abusif à la force par le passé, ni pour les amener à répondre de leurs actes.

Le président a décrété l’état d’urgence en juillet 2014 et promulgué la Loi de 2014 sur les pouvoirs exceptionnels. Des règlements relatifs à la prévention d’Ebola et d’autres maladies ont également été adoptés par le ministère de la Gouvernance locale. Ils prévoyaient notamment l’interdiction des rassemblements publics. Ces mesures visaient à permettre au gouvernement et à ses partenaires d’adopter une approche plus ferme pour faire face à cette épidémie.

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, à laquelle la Sierra Leone est partie, n’autorise aucune limitation ou restriction des garanties relatives à l’équité des procès, quelles que soient les circonstances et même en cas d’urgence.

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