Manifestation à Bruxelles

Ce mardi 15 mars, un an jour pour jour après l’arrestation de deux jeunes activistes congolais, Fred Bauma et Yves Makwambala, des militants d’Amnesty International et d’autres associations se sont retrouvés devant l’ambassade de la République démocratique du Congo (RDC) pour un rassemblement silencieux. Ils étaient plus de cinquante à demander une nouvelle fois leur libération, ainsi que celle de tous les autres activistes arrêtés dans le cadre d’une répression massive menée contre la liberté d’expression et la dissidence en perspective des élections présidentielles prévues en novembre prochain. Le rassemblement s’est achevé par un “Joyeux anniversaire”, chanté à l’adresse de Fred Bauma, dont l’anniversaire est le 20 mars prochain.

Les membres d’Amnesty International ont ensuite remis à l’ambassade une pétition signée par quelque 10.000 personnes en Belgique demandant aux autorités la libération des militants de Lucha et, de manière plus générale, la protection des droits aux libertés d’expression et de réunion pacifique dans le pays.

« Les autorités de la RDC doivent libérer immédiatement et sans condition Fred Bauma et Yves Makwambala. Ces jeunes gens croupissent en prison depuis un an pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression et de réunion ; c’est intolérable ! », explique Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International.

Le 15 mars 2015, Fred Bauma et Yves Makwambala ont été appréhendés par les forces de sécurité lors d’une conférence de presse pour le lancement du programme de Filimbi, un mouvement de jeunesse congolais. Ils ont été maintenus en détention au secret sous la garde de l’Agence nationale de renseignements (ANR) - qui est placée sous la responsabilité directe du président - pendant 50 et 40 jours, sans être inculpés et sans pouvoir contacter leurs avocats. Malgré l’absence d’éléments à charge, ils ont été qualifiés de « terroristes » et accusés de vouloir renverser le gouvernement par la force. Ils se trouvent toujours en détention arbitraire.

Le maintien en détention de Fred Bauma et d’Yves Makwambala, parallèlement à celle d’autres militants, s’inscrit dans la volonté de Joseph Kabila de se maintenir au pouvoir. A la tête du pays depuis 2001, le président cherche à prolonger son mandat, ce qui est interdit par la Constitution, laquelle limite par ailleurs à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs. À l’approche des élections de novembre 2016, les appels réclamant le départ du président Joseph Kabila se font de plus en plus nombreux ; beaucoup des personnes arrêtées ont critiqué les retards dans la préparation des élections.

« De façon générale, la justice est devenue en RDC un instrument de répression qu’utilise le pouvoir contre ceux qui critiquent l’éventualité d’un troisième mandat pour le président Kabila. Ainsi, des opposants ont été arrêté de façon arbitraire et condamnés par des tribunaux qui bafouent toutes les normes congolaises, africaines et internationales en matière de droits humains. Il faut que cela cesse et que tous les Congolais puissent jouir de leurs droits à la liberté d’expression et de réunion », conclut Philippe Hensmans.

Complément d’information

Outre Fred Bauma et Yves Makwambala, de nombreux acteurs de la société civile et militants ont subi la répression qui sévit en RDC à l’approche des élections présidentielles, prévues pour le 27 novembre 2016.

Jean-Bertrand Ewanga, député et chef de l’opposition Union pour le parti de la nation congolaise, a été condamné à un an de prison pour avoir insulté le président, le Premier ministre et les chefs du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Jean-Claude Muyambo et Vano Kiboko, deux membres de la coalition au pouvoir, ont été arrêtés après avoir pris position contre un éventuel troisième mandat du président Kabila. Kiboko de a été condamné à 3 ans de prison. Le procès de M. Muyambo est toujours en cours.

Christopher Ngoyi, un défenseur des droits humains, a été arrêté après avoir effectué un suivi sur le recours à une force excessive lors des manifestations de janvier dans la capitale, Kinshasa, et a été détenu au secret pendant 21 jours. Son procès est en cours.

Deux leaders de l’opposition, Ernest Kyaviro et Cyrille Dowe, ont été accusés d’incitation à la désobéissance dans le cadre de manifestations contre les projets de modification de la loi électorale. Ernest Kyaviro a été condamné à trois ans de prison. Cyrille Dowe a été acquitté le 7 octobre à 2015.

Plus récemment, le 24 février, six jeunes militants - Rebecca Kavugho, Serge Sivyavugha, Justin Kambale Mutsongo, Melka Kamundu, John Anipenda et Ghislain Muhiwa - ont été condamnés à une peine de deux années d’emprisonnement. Ils ont été arrêtés à Goma le 16 février alors qu’ils préparaient une grève générale à l’appel de dirigeants de l’opposition et d’organisations de la société civile.

A Kinshasa, le même jour, Bienvenu Matumo et Marcel Héritier Kambale Kapitene, deux autres jeunes militants de la LUCHA, ont été appréhendés quelques heures avant la grève générale susmentionnée. La veille, les autorités ont appréhendé Victor Tesongo, qui aidait les deux militants à préparer des tracts pour la grève. Les trois hommes ont d’abord été placés en détention au secret, puis conduits au bureau du procureur dans le quartier de Gombe, à Kinshasa, le 19 février. Le 25 février 2016, le tribunal de paix de Ngaliema, à Kinshasa, a rejeté la demande de libération sous caution formulée par Bienvenu Matumo, Marcel Héritier Kambale Kapitene et Victor Tesongo. Ils sont provisoirement accusés de « diffusion de rumeurs », « incitation à la désobéissance » et « atteinte à la sécurité nationale ».

Pour plus d’informations, voir le récent rapport d’Amnesty International intitulé : Ils sont traités comme des criminels : la RDC fait taire des voix discordantes.

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