La campagne Ma commune pour les droits humains

Cette campagne, lancée en 2011, vise à inciter les communes à favoriser les droits humains, notamment ceux repris dans la "Charte-agenda des droits de l’homme dans la cité".

Un site consacré à ces bonnes pratiques présentes et mises en place partout dans le monde est également disponible.

LE RÔLE DES COMMUNES POUR LES DROITS HUMAINS

« Où les droits de l’Homme commencent-ils ?, s’interrogeait en 1948 Eleanor Roosevelt, co-auteure de la déclaration universelle des droits de l’homme. et elle répondait : Dans des lieux proches de nous, si proches et si petits qu’on ne peut les voir sur aucune carte du globe. C’est le monde de la personne individuelle, du quartier où elle vit, de l’école ou du collège qu’elle fréquente ; de l’usine où elle travaille. Ce sont les endroits où chaque homme, chaque femme, chaque enfant cherche l’accès égalitaire à la justice, l’égalité des chances, le respect de la dignité et une protection contre la discrimination. Si ces droits n’ont pas de signification dans ces lieux proches, ils n’ont pas de signification ailleurs ».

La Cité, quelle que soit sa forme administrative (ville, provinces, département, région…), est marquée par la proximité du pouvoir et du citoyen. Aussi, on peut espérer que les droits fondamentaux individuels ou collectifs y soient plus facilement accessibles que dans d’autres espaces politiques.

Mais, bien que la Cité soit de toute évidence un espace privilégié pour la sauvegarde des droits de l’Homme, elle doit faire face à de nombreux défis liés, notamment, à l’actualité mondiale politique et économique. Comme, par exemple, la proportion croissante des migrations intra-continentales et extra-continentales vers les zones urbaines.

Faire face à ces problèmes, c’est donner la priorité à des actions de politiques publiques dites « inclusives » respectant la dignité humaine. Les politiques « inclusives » s’articulent autour de trois axes principaux : la pleine citoyenneté (ensemble des droits et devoirs élevant les individus à la catégorie de citoyens), la durabilité (engagement responsable vis-à-vis des générations futures), la démocratie et la participation citoyenne.

Autrement dit, trois grands axes sont à prendre en compte pour comprendre les droits humains :

— l’accès aux droits pour tout le monde
— l’obligation de rendre des comptes pour celles et ceux qui doivent fournir ces droits
— la participation de celles et ceux qui doivent avoir l’accès aux droits fondamentaux.

Le premier lieu des droits humains

Ce sont là les clés de la citoyenneté active, les portes de la démocratie locale, qui ne peut se résumer à des services offerts à des citoyens consommateurs (même si la notion de service reste centrale), services délimités soit par la bonne volonté des décideurs, soit par les (maigres) moyens budgétaires mis à la disposition des communes. Or, le droit à un logement, pour ne citer que cet exemple-là, ne peut être ramené à l’inscription sur une liste d’attente ; il importe que la commune, bien qu’elle ne soit pas le seul acteur à devoir s’activer en la matière, mette en place des mécanismes qui garantissent l’accès à ce droit fondamental.
Comme le rappelle Jean-Paul Marthoz, « les compétences des communes touchent, en effet, directement à l’exercice des droits fondamentaux reconnus par les textes et normes internationaux, en particulier dans les domaines de l’éducation, de la santé, du logement ou encore de l’égalité entre hommes et femmes. C’est aussi dans le cadre local que des habitants subissent l’injustice et l’arbitraire : l’expulsion de leur maison, l’insécurité, la violence. Pour les citoyens, la commune est incontestablement le premier “ lieu des droits de l’Homme ”, de leur respect… ou de leur transgression ».
Si la proximité est essentielle, donc, elle est trop souvent perçue en termes clientélistes, éloignant la relation élu-citoyen de la notion de droits pour se diriger vers celle de « passe-droits », précisément. C’est là, bien entendu, que la notion d’obligation de rendre des comptes est capitale, à condition, qu’elle ne se résume pas au processus électoral (pour peu qu’il existe, ce qui est le cas dans notre pays heureusement).
Les élections sont une évaluation « sanctionnante », c’est sûr, mais insuffisante dès lors qu’il s’agit d’examiner les politiques menées dans le détail. Le citoyen, et c’est bien normal, équilibrera le « pour et le contre » de la politique menée dans son ensemble par l’élu qui appelle à voter pour lui, cependant qu’une évaluation minutieuse des actions menées dans telle ou telle matière durant le mandat engagerait quelques fois à des modifications de comportements ou de procédures.

La participation active des détenteurs de droits

D’où bien sûr l’importance d’incorporer dans le processus politique la consultation des personnes et communautés concernées, et ce dès les premiers stades d’un processus jusqu’à son évaluation. Et si la place nous manque ici pour développer tout cet aspect-là, il ne faut cependant pas oublier de se rappeler combien il est capital d’adapter les processus consultatifs aux populations concernées.
L’obligation de rendre des comptes sur base de droits inaltérables transforme aussi la relation entre le citoyen et l’élu, ou ses représentants administratifs.
Comme me le rappelait il y a quelques temps un responsable d’une association d’aide aux plus démunis, dès lors que l’on met sur pied d’ égalité, dans un débat par exemple, un pauvre et un politique (ou un représentant du CPAS), il n’est pas rare que la discussion s’arrête rapidement, car on est confrontés à deux logiques différentes.
C’est la force d’une approche basée sur les droits humains : ces derniers doivent être considérés pour ce qu’ils sont : des droits acquis et pas des avantages qui se méritent.

Plusieurs initiatives ont vu le jour ces dernières années pour tenter de garantir cette approche basée sur les droits humains au niveau de la ville ; on citera notamment la « Charte européenne des droits de l’homme dans la ville ». Bien que très intéressante, elle ne comporte malheureusement, comme beaucoup de déclarations, aucun aspect contraignant, ou en tous cas d’incitants à en traduire les principes en politiques concrètes.
Ce n’est pas le cas de la « Charte-agenda mondiale des droits de l’Homme dans la Cité ».
Ce projet est né au cours du Forum des Autorités locales pour l’Inclusion sociale(FAL) de Porto Alegre (Brésil), un forum d’élus locaux qui se tient, depuis 2001, en parallèle au Forum social mondial. L’un de ses objectifs est de construire et développer, avec la société civile, des alternatives de gestion publique dans le processus actuel de globalisation.

En 2006, un groupe de travail sur les droits de l’Homme, alors coordonné par la Diputación de Barcelone a été mis en place, avec comme objectif principal l’élaboration de la Charte-agenda mondiale des droits de l’Homme dans la Cité. C’est en 2010 que le projet final de Charte a été adopté par le bureau exécutif de la CGLU (Cités et Gouvernement locaux unis, l’équivalent mondial de l’Union des villes et communes, dont cette dernière fait partie) et proposée à l’adoption par un maximum de communes à travers le monde et, partant, en Belgique également.

Des principes et des plans d’action

La Charte-Agenda se fonde sur les valeurs et principes suivants :

— Dignité de tout être humain, en tant que valeur suprême

— Liberté, égalité notamment entre les hommes et les femmes, non-discrimination et reconnaissance des différences, inclusion sociale et justice.

— Démocratie et participation en tant que forme de gouvernement des Cités.

— Principe d’universalité, d’indivisibilité et d’interdépendance des droits de l’Homme.

— Principe de développement durable sur les plans socio-économique et environnemental.

— Principe de coopération et de solidarité entre tous les habitants de chaque Cité, ainsi qu’entre toutes les Cités du monde

— Principe de responsabilité partagée entre les gouvernements des Cités et leurs habitants, en fonction de leurs capacités et de leurs ressources

La charte comprend douze droits fondamentaux, et chacun d’eux est accompagné d’un projet de plan d’action. Il serait trop long ici de détailler tous les éléments de la charte, mais il est bon d’en rappeler les principaux chapitres :
1. le droit à la cité
2. le droit à la démocratie participative
3. le droit à la paix civile et à la sécurité dans la cité
4. le droit à l’égalité des femmes et des hommes
5. les droits des enfants
6. le droit aux services publics de proximité
7. la liberté de conscience et de religion, d’opinion et d’information
8. le droit à la liberté de réunion, d’association et de créer un syndicat
9. les droits culturels
10. le droit au logement et au domicile
11. le droit à l’eau et à la nourriture
12. le droit à un développement urbain durablement

On se rend compte à la lecture de ces titres combien cela reste vague. La charte est heureusement beaucoup plus complète, même si son caractère international (elle vaut pour n’importe quelle ville du monde) oblige à l’adapter aux réalités locales. Mais d’ores et déjà les plans d’action qui accompagnent chaque droit balisent étonnamment bien ce qui peut être réalisé par les communes. Depuis l’adoption de dispositions prioritaires pour favoriser l’accès au logement social des femmes à la tête de familles monoparentales ou victimes de violences liées au genre, jusqu’à la mise en place d’ateliers de formation sur les nouvelles technologies, en passant par des mesures pour favoriser la biodiversité, les exemples sont nombreux, et il y a de quoi piller ces idées pour les prochains programmes électoraux.

Mais les communes ont déjà plein de bonnes idées !

Afin de favoriser l’adoption de la Charte par un maximum de communes, Amnesty International a recueilli quelques bons exemples de mise en œuvre de ces droits au niveau de la cité. De San Fransisco à Lyon, en passant par Crisnée, Thuin, Mouscron ou encore Messitert, Jean-Paul Marthoz et Anne-Marie Impe sont partis à la recherche de bons exemples qui montrent qu’avec de la volonté, on peut réaliser des choses extraordinaires.
Il en résulte un « guide des bonnes pratiques des droits humains dans la cité » de 180 pages qui, pour chacun des articles de la charte, met en évidence plusieurs expériences concrètes déjà réalisées par des cités au quotidien, avec à chaque fois, des références concrètes et les coordonnées des initiateurs des projets illustrés. On y découvrira ce que font les échevins des droits humains dans leur commune, comment certaines villes organisent l’accueil des gens du voyage, ou encore assurent des funérailles dignes aux personnes sans famille.
On y trouvera surtout de bonnes idées qui n’attendent que d’être adaptées aux réalités de chaque ville...

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