Manifester sa place en tant que personne racisée dans le débat public*

La liberté d’expression, ou liberté de révéler son opinion à autrui, est une liberté à valeur constitutionnelle et incarne l’un des fondements de la Convention européenne des droits de l’homme et du citoyen. C’est aussi un concept subjectif qui est convoqué pour défendre des formes d’expressions très différentes les unes des autres (de la caricature aux propos tenus sur les réseaux sociaux, de l’expression médiatique à l’expression par l’art…). C’est enfin une notion qui comporte des limites intrinsèques car on ne peut pas tout dire et que certains propos relèvent du délit.

Lorsque les personnes racisées font usage de cette même liberté d’expression, les répercussions ne sont pas les mêmes que pour les personnes blanches. Tandis que le débat public est l’opportunité pour tous les citoyen·ne·s de nourrir une confrontation d’idées dans nos démocraties, la voix des personnes racisées est encore sous-perçue par la société ou considérée comme une “sous-section” de l’expérience commune. Une place encore disputée, une parole encore menacée, minorée voir invisibilisée. Il est à la fois difficile de revendiquer sa place en tant que sujet politique comme il est périlleux de s’exprimer en dehors de la façon dont on est vu. Parler de l’expérience subie, c’est prendre le risque sans cesse renouvelé de se voir reprocher un crochet à l’universalisme mais revendiquer autre chose c’est s’exposer à la pernicieuse impression de ne pas jouir de la même place ou de la même légitimité qu’une personne blanche.

Quand les catégories de genre, de classe et de sexualité entrent en jeu, l’expérience inégalitaire se décuple.

Comment manifester sa place en dehors des représentations qu’on nous assigne ? Comment produire et promouvoir une définition inclusive de la liberté d’expression ? Comment chacun·e peut faire le choix d’une vision qui ne soit ni réductrice ni essentialisante vis-à-vis des personnes racisées ? Comment inclure efficacement des perspectives multiples dans le débat public ? Comment créer un espace sain où puissent coexister des visions et des expériences divergentes ? Quels sont les moyens de lutte contre le racisme dans l’espace public ?

Les intervenant·e·s  :

Françine Esther Kouablan est active dans le milieu associatif, socioéducatif et universitaire depuis plusieurs années. Elle est diplômée de l’UCL, titulaire d’un Master en Sciences de l’éducation et d’une Maitrise et un DEA en Lettres Modernes (Université d’Abidjan Félix Houphouet bopigny). Arrivée en Belgique fin 2005, elle fonde avec des personnes du monde associatif et des militants de la société civile en 2007, une asbl dénommée SOS-Migrants. Après avoir travaillé pendant plus de huit ans en Éducation permanente à CFS asbl, Esther est depuis 2018, Directrice du « MRAX » (Mouvement contre le Racisme, l’Antisémitisme et la Xénophobie). Elle milite activement et fait des recherches sur les questions touchant à l’immigration et à l’émancipation des populations issues de milieux populaires. Elle a à son actif, plusieurs articles en tant qu’experte sur les questions touchant au racisme, à la décolonisation et désaliénation, à l’éducation populaire et à la place de la femme afrodescendante dans la société belge.

Sakina M. Ghani est la fondatrice de la communauté ReSisters. Cette communauté digitale pour les femmes et personnes non binaires racisée.x.s organise des espaces bienveillants afin de s’exprimer librement sur des questions politiques liées à l’identité et la colonialité. Ces rencontres sont également l’occasion d’échanger et de partager sur des pratiques et des stratégies de résistances que ce soit face à des situations difficiles familiales, au travail, en société, en couple ou autres. Sakina M. Ghani est chargée de plaidoyer spécialisée dans la promotion de politiques antiracistes. Elle est engagée depuis une quinzaine d’années aux côtés d’organisations militant pour plus de justice sociale en Belgique et au niveau européen. Elle a collaboré à deux ouvrages collectifs sur la question du genre et des féminismes de personnes minorisées et organisé plusieurs événements sur cette thématique.

Mireille-Tsheusi ROBERT est formatrice et auteure décoloniale, déraciale et féministe depuis 1999. Après une carrière d’éducatrice auprès d’adolescent.e.s fragilisé.e.s, elle accède à la présidence de l’association Bamko, un comité de femme pour l’égalité et l’équité raciale. Titulaire d’un master en sciences de l’éducation (Université Catholique de Louvain-La-Neuve), elle a co-rédigé 6 livres dont « Racisme antiNoirs, entre méconnaissances et mépris » (2016) et « Being Imposed Upon » (2020). Ses thèmes de prédilection sont l’impact du racisme chez les enfants, la discrimination des associations de racisé.e.s, le travail décolonial de mémoire et de réparation, la représentativité et la représentation médiatique des minorisés, notamment des femmes ou encore la formation des acteurs sociaux en contact avec les publics fragilisés. Madame Robert est à l’origine de projets décoloniaux et novateurs en Belgique. Créé en 1987, Bamko est un Centre de Réflexion et d’Action sur le racisme anti-Noir.e. L’association s’emploie au plaidoyer médiatique et politique ainsi qu’à l’empowerment des personnes subissant le racisme. Elle œuvre à l’éducation populaire au sujet du racisme et des questions de genre à travers des publications d’articles et de livres, de projets artivistes ou encore via des campagnes de plaidoyers médiatiques tel que celui sur la Restitution du patrimoine culturel africain emporté pendant la colonisation qui a abouti à une résolution parlementaire bruxelloise en faveur de la restitution. En 2019, Bamko lance des « Formations au Militantisme Décolonial » à l’Université de St Louis – Bruxelles, puis à L’Université de Gand (2020) ainsi que le projet des « Assises Décoloniales » qui réunit 120 spécialistes d’origine africaine issus d’une dizaine de pays européens, américains et africains.

*Attention, il est essentiel de considérer ce titre de manière inclusive. Les termes ont été choisis de façon à permettre à la fois de déconstruire leur rapport à autrui pour les personnes non racisées et de trouver des façons d’imposer leur parole dans le débat public pour les personnes racisées. Sans prétendre y trouver toutes des solutions toutes faites, il s’agit d’ouvrir des pistes de réflexions en permettant un temps d’échange apaisé en interaction avec des personnalités concernées au premier plan. Le terme “racisée” permet de rendre dicible une réalité non pas ethnique ou raciale mais une réalité sociale qui est celle de l’expérience partagée du racisme.

Du 22 au 27 février, on se donne rendez- vous pour la toute première édition du Manifestival Amnesty International Belgique francophone afin d’explorer, ensemble, la notion de “manifester”. Que l’on veuille manifester ses opinions, sa voix, sa place, son/ses identités ou encore son indignation dans l’espace public, il semble de plus en plus difficile pour certain·e·s de faire corps avec les lieux de tous et de toutes.

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Mais qu’est-ce que l’espace public ? Ou plutôt “les” car, nous le verrons, ils sont divers ! C’est une notion transversale qui peut se penser en opposition avec l’espace privé, l’intimité. C’est dans ces lieux que nous faisons la publicité de ce que nous sommes, de ce que nous pensons, ou encore de ce que nous produisons. C’est enfin une réalité changeante qui impacte nos représentations, nos imaginaires, nos vies et nos combats.

Soit que nos libertés fondamentales sont entravées par la crise sanitaire et le confinement, soit parce qu’on est une femme ou que l’on s’identifie en tant que femme et que l’espace qui nous entoure est créateur d’inégalités, soit encore parce qu’on est une personne racisée et que l’on est à la fois silenciée et/ou essentialisée dans l’opinion. En bref, il n’est pas facile de (se) manifester dans l’espace public sans prendre un risque que celui-ci soit inconscient, calculé ou redouté !

Plusieurs intervenant·e·s aux trajectoires passionnantes se relaieront pour aborder quatre grandes thématiques. Un programme construit sur mesure pour parler à la jeunesse.

Parce que le Manifestival, c’est aussi un festival, nous aurons l’immense plaisir, à l’ouverture des festivités, d’accueillir la chanteuse Saskia pour un concert privé sur mesure. Pour la clôture, Anne-Sarah Nkuna Mayama, la jeune Youtubeuse engagée star des vidéos de TARMAC et de FREALLY donnera un live de questions/réponses sur Instagram !

Au programme :

  • 4 conférences digitales
  • 2 évènements inédits
  • 2 lieux : sur notre page Facebook @amnestybe et sur notre chaîne Youtube @amnestyBe
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