ANGOLA. Les autorités de la province de Benguela ne doivent pas indûment empêcher la tenue d’une manifestation pacifique

Déclaration publique

ÉFAI-8 avril 2010

Amnesty International appelle les autorités de la province de Benguela, en Angola, à autoriser la tenue d’une marche pacifique, prévue ce samedi 10 avril pour protester contre les expulsions forcées. De récentes déclarations des autorités de la province de Benguela font en effet craindre à Amnesty International que les forces de l’ordre ne recourent à un usage excessif de la force lors de cette manifestation.

Cette marche pacifique, qui a pour slogan « Ne détruisez pas ma maison », est organisée à l’initiative de Omunga, organisation angolaise de défense des droits humains basée dans la province de Benguela. Omunga tente depuis début mars 2010 de mobiliser la société civile et des personnes individuelles pour qu’elles prennent part à cette marche en signe de protestation contre les expulsions forcées qui ont eu lieu dans la province de Huila et par solidarité avec les victimes de ces expulsions forcées. Plus de 3 000 familles ont été touchées par ces expulsions forcées.

Le 9 mars 2010, Omunga a informé le gouvernement de la province de Benguela de son intention d’organiser une marche pacifique. La demande a été déposée par écrit plus de trois jours avant la date prévue du 25 mars, conformément à la loi angolaise. Toutefois, les autorités n’ont pas autorisé la manifestation au motif que l’horaire et l’itinéraire prévus pour la manifestation n’étaient pas conformes à la loi. En droit angolais, aucune manifestation ne peut avoir lieu avant 19h00 les jours de semaine ou avant 13h00 les samedis. En outre, les autorités se réservent le droit d’interdire le passage de toute manifestation à moins de 100 mètres de bâtiments officiels, prisons, bâtiments consulaires ou diplomatiques et installations militaires.

Le 1er avril 2010, Omunga a communiqué au gouvernement de la province de Benguela son intention de faire la marche prévue ce samedi 10 avril à 15h00, dans le créneau horaire permis par la loi, en faisant passer le cortège en dehors des zones interdites aux manifestations. En dépit de ces concessions, le gouvernement provincial de Benguela a une nouvelle fois refusé son autorisation arguant que la manifestation était infondée étant donné qu’il n’y a pas eu d’expulsions forcées dans la province de Benguela.

Amnesty International considère ce refus comme une violation du droit de tout individu à la liberté d’opinion et à la liberté de réunion et d’association pacifiques. Ces droits sont garantis par les traités internationaux relatifs aux droits humains ratifiés par l’Angola, ainsi que par la nouvelle constitution de l’Angola, approuvée au début de cette année. Cette nouvelle constitution garantit également pour tous le droit de se réunir et de manifester pacifiquement. Selon le droit international relatif aux droits humains et le droit angolais, l’exercice de ces droits ne peut faire l’objet que des seules restrictions imposées conformément à la loi et strictement nécessaires dans l’intérêt de la sécurité nationale, de l’ordre public, ou pour protéger la santé ou la morale publiques, ou les droits et les libertés d’autrui. L’absence d’expulsions forcées dans la province de Benguela ne prive pas la société civile de cette province du droit de manifester contre les expulsions forcées dans une autre province, par solidarité avec les personnes affectées par des expulsions forcées. Amnesty International appelle donc les autorités angolaises à respecter et protéger le droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique en autorisant cette marche pacifique.

Amnesty International est en outre préoccupée par les déclarations faites par les autorités provinciales de Benguela après la première demande déposée pour la manifestation. Le 24 mars, les autorités de la province de Benguela ont déclaré qu’elles ne sauraient être tenues pour responsables des dommages physiques ou matériels pouvant résulter de l’exercice de leur autorité si la marche prévue le 25 mars avait lieu. Amnesty International rappelle aux autorités angolaises qu’il est du devoir des États de protéger la vie et de veiller à ce que les membres des forces de police et responsables de l’application des lois ne recourent pas inutilement à une force excessive. Les normes internationales relatives aux droits humains exigent que les responsables de l’application des lois aient recours autant que possible à des moyens non violents avant de faire usage de la force. Lorsque l’usage légitime de la force est inévitable, les responsables de l’application des lois doivent en user avec modération et s’efforcer de ne causer que le minimum de dommages et d’atteintes à l’intégrité physique et respecter et préserver la vie humaine. L’exigence de modération s’applique même pour des manifestations considérées comme illégales par les autorités.

Complément d’information

Des expulsions forcées – éviction, contre leur volonté et sans qu’une protection juridique ou autre appropriée ait été assurée, de personnes de leurs foyers ou des terres qu’elles occupent - ont lieu en Angola, dans la capitale Luanda, depuis 2001. Début mars, plus de 3 000 familles ont été expulsées de force de chez elles à Lubango pour permettre la réalisation de travaux de rénovation d’une voie ferrée. Le chemin de fer reliait le port de Lobito, en Angola au port de Beira, au Mozambique, mais a cessé de fonctionner pendant la guerre civile. Les personnes qui s’étaient installées le long de la voie ferrée au cours des 27 longues années de guerre civile sont maintenant expulsées de force vers une zone en dehors de la ville, loin des écoles et des lieux de travail, sans aucun aménagement.

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