Des accusations frauduleuses discréditent la dissidence politique

Les autorités malaisiennes doivent libérer immédiatement et sans condition l’ancien leader de l’opposition Anwar Ibrahim, qui a déjà passé un an en prison pour des accusations à caractère politique. Amnesty International considère Anwar Ibrahim comme un prisonnier d’opinion, emprisonné uniquement pour avoir exercé sans violence son droit à la liberté d’expression.

L’affaire de « sodomie » visant Anwar Ibrahim a démarré en 2008. La Haute Cour de Malaisie l’avait blanchi de toutes les charges en 2012, mais la Cour d’appel avait annulé cette décision en mars 2014, le condamnant à cinq années d’emprisonnement. Le 10 février 2015, la Cour fédérale de Malaisie, la plus haute instance du pays, a confirmé la décision de la Cour d’appel. Sa condamnation l’a empêché d’occuper des fonctions politiques et le disqualifie pour la prochaine élection générale.

De nombreuses organisations de défense des droits humains ont fait part de leur inquiétude au sujet du procès d’Anwar Ibrahim et de son traitement en détention. En novembre 2015, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a conclu que sa détention constituait une privation arbitraire de sa liberté et que la meilleure solution était de le libérer immédiatement et de le réhabiliter dans ses droits politiques.

Le Groupe de travail a également estimé que son droit à la liberté d’opinion et d’expression et son droit de participer au gouvernement avaient été bafoués au titre des articles 19 et 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), et que la façon dont il a été traité en détention a pu bafouer l’interdiction de la torture et de tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant inscrite à l’article 5 de la DUDH.

Ce n’est pas la première fois qu’Anwar Ibrahim est incarcéré. En 1998, après avoir lancé un appel à des réformes politiques et alors qu’il était vice-Premier ministre, il avait été écarté du gouvernement et arrêté pour corruption et pour des actes homosexuels « illégaux », allégations qu’il a toujours réfutées. Il avait été passé à tabac en garde à vue, puis déclaré coupable en 1999 de corruption et en 2000 de sodomie. Il est resté en prison jusqu’en 2004, lorsque sa condamnation pour sodomie a été annulée.

Les lois érigeant en infraction les actes sexuels entre adultes consentants – y compris entre adultes du même sexe – sont contraires au droit international en matière de droits humains. Personne ne devrait être arrêté ni détenu pour des actes sexuels entre adultes consentants. Ces actes ne sont pas considérés comme des infractions aux termes du droit international. La loi malaisienne relative à la sodomie doit tout simplement être supprimée de la législation.

L’incarcération d’Anwar Ibrahim intervient dans le contexte d’une répression plus large de la liberté d’expression et de la dissidence politique en Malaisie. Dans un récent rapport, Amnesty International met en lumière le fait que 91 personnes, dont des défenseurs des droits humains, des militants politiques, des journalistes, des universitaires et des opposants politiques, ont fait l’objet d’enquêtes, ont été arrêtées ou inculpées en 2015, aux termes de la Loi de 1948 relative à la sédition. Parmi les autres lois invoquées pour faire taire les voix critiques figurent la Loi relative à la presse et aux publications de 1984, la Loi sur les communications et le multimédia de 1998, la Loi relative aux rassemblements pacifiques de 2012 et la Loi sur les atteintes à la sécurité (Mesures spéciales) de 2012.

Amnesty International demande au gouvernement malaisien d’agir sans délai en vue d’abroger ou de modifier toutes les lois qui restreignent, de manière inutile et disproportionnée, l’exercice des droits aux libertés d’expression et de réunion pacifique afin de se conformer au droit international relatif aux droits humains et aux normes en la matière. Les autorités doivent annuler toutes les condamnations prononcées pour le seul exercice pacifique du droit à la liberté d’expression, et abandonner toutes les charges de cette nature pesant contre des personnes.

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