Communiqué de presse

Afghanistan. Les négociations avec les talibans doivent se concentrer sur la justice et les droits humains

Les droits humains, et notamment les droits des femmes, doivent être pleinement pris en compte dans le cadre de tout éventuel accord de paix conclu avec les talibans, a déclaré Amnesty International mercredi 19 juin alors que les États-Unis venaient d’annoncer qu’ils doivent entamer des pourparlers de paix directement avec le groupe armé des talibans d’Afghanistan.

Cet appel a été lancé après qu’Hamid Karzaï, le président afghan, ait fait savoir que son pays boycotterait ces négociations à moins qu’elles ne soient « menées par les Afghans », et alors que l’OTAN vient de transférer aux forces afghanes la responsabilité de la sécurité dans le pays.

La première rencontre doit avoir lieu très prochainement à Doha, au Qatar, où les talibans ont un bureau depuis peu.

« Tout accord avec les talibans doit contenir des engagements obligatoires très clairs qui garantiront les droits de l’ensemble des femmes, des hommes et des enfants afghans
 », a souligné Polly Truscott, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.

« Le processus de paix ne doit pas permettre que des membres des talibans ou qui que ce soit d’autre puissent bénéficier d’une immunité de poursuites pour des atteintes graves aux droits humains et des crimes de guerre. »

Les pourparlers de paix doivent respecter l’état de droit, et ne pas priver de justice les victimes de violations des droits humains et de crimes de guerre – qu’ils aient été perpétrés par les forces progouvernementales ou les groupes insurgés. Les droits humains et la justice ne doivent pas être sacrifiés au nom de l’opportunisme militaire et politique, a estimé Amnesty International.

L’organisation a également demandé au gouvernement afghan d’abroger la loi de 2007 sur la réconciliation nationale et la stabilité. En vertu de ce texte, des personnes s’étant rendues coupables de violations graves des droits humains au cours des 30 dernières années – massacres, disparitions forcées, actes de torture, viols et exécutions publiques, notamment – seraient à l’abri des poursuites pénales. Les talibans acceptant de coopérer avec le gouvernement afghan seraient également exemptés de poursuites.

Les groupes de la société civile afghane – en particulier les groupes de défense des femmes – ont demandé que les droits fondamentaux et le bien-être des Afghans ne soient pas mis en péril par les éventuels pourparlers en vue d’une réconciliation avec les talibans. Mais leurs voix ont été largement ignorées.

Neuf des 70 membres du Conseil supérieur de la paix sont des femmes, ce qui est peu. Cet organe du gouvernement afghan est chargé de diriger les pourparlers de paix et de réconciliation avec les talibans et d’autres groupes armés. Or, même ces femmes sont écartées de certaines négociations importantes engagées par le Conseil en faveur de la paix.

« La participation de femmes aux pourparlers de paix doit être véritable et significative, et leurs principales préoccupations doivent être pleinement prises en considération, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité », a indiqué Polly Truscott.

Le bilan des talibans sur le plan des droits humains est épouvantable, que l’on parle de l’époque où ils étaient au pouvoir ou des insurgés d’aujourd’hui. Aujourd’hui, dans les zones sous leur contrôle, ils ont – comme lorsqu’ils ont dirigé le pays, de 1996 à 2001 – sérieusement restreint les droits des fillettes, des jeunes filles et des femmes, les privant notamment d’éducation, d’emploi, de liberté de mouvement, ainsi que de toute participation et représentation politique.

Dans le contexte de leur insurrection, les combattants talibans ont pris pour cibles et tué des civils qu’ils considèrent comme des « espions » ou des « collaborateurs » œuvrant pour le compte du gouvernement afghan et des forces internationales, et se sont rendus coupables d’enlèvements, tuant souvent leurs victimes.

Les talibans ne s’efforcent par ailleurs guère d’opérer de distinction entre cibles civiles et militaires, et ont lancé des centaines d’attaques aveugles, commettant notamment des attentats suicides et des attaques à la bombe au bord des routes, dans lesquels des centaines de civils, dont des enfants, ont été tués ou blessés.

Le nombre de victimes civiles a augmenté de 24 % au cours des cinq premiers mois de 2013, 3 092 personnes ayant été tuées ou blessées, selon les Nations unies.

Les groupes d’insurgés étaient responsables dans 74 % des cas étudiés, en particulier du fait de leur recours à des dispositifs explosifs improvisés.

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