Prenant la parole lors d’un événement organisé par Amnesty International à Kaboul, le second vice-président afghan Sarwar Danish a déclaré que le gouvernement prend au sérieux les inquiétudes au sujet de la sécurité des défenseurs des droits humains dans le pays et mettra en place des mesures visant à assurer leur protection.
« Jusqu’à présent, une grande attention a été accordée à la sensibilisation aux droits humains, tandis que la protection des défenseurs de ces droits a été délaissée », a déclaré le second vice-président afghan Sarwar Danish.
Lors de l’événement, 32 organisations de défense des droits humains de tout l’Afghanistan ont présenté une stratégie conjointe en vue de créer un mécanisme de protection pour les défenseurs des droits humains dans une situation de plus en plus dangereuse, car ils sont en butte aux attaques d’acteurs étatiques et non-étatiques.
Cette stratégie conjointe décrit à grands traits comment le gouvernement afghan et la communauté internationale peuvent créer un tel mécanisme qui enquête efficacement sur les attaques visant les défenseurs des droits humains, réagisse immédiatement aux cas de menaces et d’attaques, offre un soutien d’urgence aux défenseurs en danger, renforce la capacité de la communauté des droits humains et crée un environnement propice dans lequel ils puissent faire leur travail librement et sans crainte des représailles.
« Je suis très heureux que cette stratégie soit présentée par Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains. Il s’agit d’une initiative cruciale, a déclaré le second vice-président afghan Sarwar Danish.
« Au nom du gouvernement afghan, je m’engage à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre en œuvre cette stratégie. »
Attaques contre les défenseurs des droits humains
En août 2019, Amnesty International a publié la synthèse intitulée Defenceless defenders : Afghanistan’s human rights community under attack, qui évoque en détail les menaces, les actes de harcèlement et d’intimidation, les violences, voire la mort, que risquent les défenseurs des droits humains en raison de leur travail. Dans de multiples cas, lorsqu’ils se sont tournés vers les autorités pour demander aide et protection, ils ont été accusés d’avoir inventé leurs allégations et se sont même entendus dire d’acheter une arme pour se défendre eux-mêmes.
En septembre 2019, Abdul Samad Amiri, représentant provincial de la Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan, a été enlevé et tué par les talibans.
En novembre 2019, les défenseurs des droits humains Musa Mahmudi et Ehsanullah Hamidi, qui ont dénoncé l’existence d’un réseau pédophile et révélé plus de 100 cas d’abus sexuels subis par des garçons dans la province du Logar, ont été arrêtés de manière arbitraire par la Direction nationale de la sécurité, le plus haut service de renseignements en Afghanistan.
« Les défenseurs des droits humains en Afghanistan comptent parmi les plus courageux au monde ; ils travaillent dans le contexte d’un conflit qui coûte la vie à des milliers de personnes chaque année. Ils sont la cible des attaques de l’État et des groupes armés. Aussi doivent-ils bénéficier de la protection dont ils ont besoin afin de poursuivre leur travail essentiel, à savoir promouvoir les valeurs fondamentales de l’humanité, a déclaré Samira Hamidi, chargée de campagne sur l’Asie du Sud à Amnesty International.
« L’engagement du gouvernement envers la stratégie de protection marque une première avancée importante. Maintenant, il faut mettre en œuvre le mécanisme de protection tant attendu. La communauté internationale a un rôle clé à jouer pour soutenir cette initiative. »
La stratégie conjointe est le résultat de consultations approfondies impliquant plus de 100 défenseurs des droits humains dans différentes régions du pays, notamment Kaboul, Hérat, Kunduz, Baghlan, Logar et Mazar-e-Charif.
« La vie des défenseurs des droits humains en Afghanistan est très risquée, ils endurent différentes formes de violations et d’exactions. Ils subissent une pression énorme. Ils ne se sentent pas en sécurité, car il n’existe pas de mécanisme spécifique pour les protéger, a déclaré Zakir Stanikzai, directeur de l’Institut afghan de la société civile.
« Visés par différents types de menaces, ils luttent et se heurtent à de graves difficultés. Ces menaces peuvent les forcer à se taire au sujet des violences subies, à quitter leur emploi ou même le pays, les conduire en prison ou les amener à se faire tuer du fait de leur travail. Un mécanisme de protection des défenseurs des droits humains est plus que nécessaire en Afghanistan pour les soutenir et les protéger », a déclaré Freshta Karimi, directrice de Da Qanon Ghushtonky, une ONG de la société civile afghane.
Complément d’information
En 2018, Amnesty International a lancé une campagne mondiale, BRAVE, pour lutter contre les menaces visant les défenseurs des droits humains à travers le monde qui sont en butte au harcèlement, à l’intimidation, à des lois répressives, à des poursuites injustes, à la détention, voire la mort, du fait de leurs activités en faveur des droits.
Les défenseurs des droits humains jouent un rôle clé s’agissant de défendre les principes de liberté, de justice et de dignité qui étayent la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Leur travail contribue directement à la réalisation des droits humains, au renforcement de l’état de droit et à la promotion du développement durable.
En 1998, la communauté internationale a reconnu le rôle important que jouent ces acteurs de la société civile lorsque l’Assemblée générale de l’ONU a adopté par consensus la Déclaration des Nations Unies sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, ou Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme. Ce texte souligne que la reconnaissance et la protection des défenseurs des droits humains sont essentielles pour garantir qu’ils puissent travailler dans un environnement sûr.