Afrique australe : Liberté de la presse muselée 

 *  Au Mozambique, l’hostilité est grandissante à l’égard des journalistes.
 *  La Zambie et le Zimbabwe comptent parmi les pays où l’espace médiatique ne cesse de rétrécir.
 *  Amnesty International demande aux États de ne plus traiter les journalistes avec mépris.

La liberté de la presse demeure menacée dans plusieurs pays d’Afrique australe, où des journalistes sont incarcérés simplement parce qu’ils font leur travail, a déclaré Amnesty International le 3 mai 2019 à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse.

« Au cours de l’année écoulée, nous avons constaté des tentatives flagrantes visant à museler les médias et à restreindre le droit la liberté d’expression dans des pays tels que Madagascar, la Zambie, le Mozambique et le Zimbabwe, où les journalistes sont harcelés ou incarcérés uniquement pour avoir fait leur travail, ce qui a de vastes répercussions, notamment l’autocensure, a déclaré Deprose Muchena, directeur régional pour l’Afrique australe à Amnesty International.

« Cette offensive sape le fondement même des sociétés libres, où les journalistes doivent pouvoir faire leur travail sans craindre des mesures d’intimidation, de harcèlement ni d’autres représailles. »

À Madagascar, le journaliste d’investigation Fernand Cello a passé près de deux ans derrière les barreaux après avoir été déclaré coupable d’accusations forgées de toutes pièces liées à ses activités professionnelles, concernant des accusations mensongères de vol de chéquier. La cour d’appel de Fianarantsoa l’a acquitté le 2 avril 2019.

Au Mozambique, le journaliste radio Amade Abubacar a été libéré sous caution dans l’attente de son procès, après avoir passé près de quatre mois en détention provisoire. Il a été arrêté alors qu’il interviewait un groupe de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui avaient fui leur domicile en raison des attaques perpétrées par des groupes extrémistes dans la province de Cabo Delgado, en janvier. Amade Abubacar est inculpé de plusieurs chefs d’accusation forgés de toutes pièces, d’« incitation publique » et d’outrage à des représentants des pouvoirs publics via les médias électroniques entre autres. La date de son procès n’est pas encore fixée.

En décembre dernier, le journaliste d’investigation Estacio Valoi a été enlevé par l’armée et détenu au secret pendant deux jours dans le district de Mocímboa da Praia, au nord de Pemba, soupçonné d’espionnage et de complicité avec des groupes extrémistes. Il a plus tard été libéré sans inculpation, mais ses équipements ont été confisqués par l’armée aux fins d’une « enquête plus approfondie ».

En juin 2018, Pindai Dube, journaliste à la chaîne de télévision indépendante eNews Channel Africa (eNCA), dont le siège se trouve en Afrique du Sud, a été arrêté par la police à Pemba et accusé d’espionnage. Il a été libéré trois jours plus tard sans être inculpé.

En Zambie, le rédacteur en chef du Rainbow Newspaper, Derrick Sinjela, purge actuellement une peine de 18 mois de prison après avoir été déclaré coupable en décembre 2018 d’outrage à magistrat, parce qu’il a publié un article écrit par un militant dénonçant la corruption au sein du système judiciaire. Derrick Sinjela a été condamné de manière inique et incarcéré pour avoir critiqué la justice au sujet d’une affaire qui était close.

« Les autorités doivent cesser de traiter les médias avec mépris et doivent ouvrir l’espace médiatique afin que les journalistes puissent faire leur travail en toute sécurité, sans avoir à regarder par-dessus leur épaule, a déclaré Deprose Muchena.

Début mars, les autorités ont suspendu pendant 30 jours la licence de diffusion de la chaîne indépendante d’information Prime TV, au motif que la chaîne n’avait pas respecté les termes de sa licence. La suspension a par la suite été levée, après presque un mois de black-out.

Au Zimbabwe, la police a fait une descente dans les bureaux du site d’information en ligne 263 Chat et envoyé du gaz lacrymogène dans la salle de rédaction après avoir poursuivi le journaliste Lovejoy Mtongwiza jusqu’à l’intérieur des bureaux de 263 Chat, le 4 avril. Ce journaliste avait filmé des policiers en train de forcer des vendeurs des rues à quitter leur emplacement dans Harare, la capitale zimbabwéenne.

« Les autorités doivent cesser de traiter les médias avec mépris et doivent ouvrir l’espace médiatique afin que les journalistes puissent faire leur travail en toute sécurité, sans avoir à regarder par-dessus leur épaule, a déclaré Deprose Muchena.

« Une presse dynamique et indépendante est essentielle à la réalisation des droits humains. Les journalistes ne doivent pas être considérés comme les ennemis de l’État. »

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