Communiqué de presse

Afrique du Sud. Il faut suspendre les responsables présumés des homicides de Marikana et ceux qui les ont couverts

Il faut suspendre immédiatement tous les agents de la police sud-africaine impliqués dans les homicides de Marikana et ceux qui les ont couverts, en attendant les conclusions d’une nouvelle enquête, a déclaré Amnesty International vendredi 14 août, à l’approche du troisième anniversaire de l’homicide illégal de 34 mineurs grévistes.

En premier lieu, le président Zuma doit lancer la procédure de suspension du directeur national de la police, Riah Phiyega. Trois ans après les faits, pas un seul policier n’a été suspendu ni amené à rendre des comptes.

« Alors que la hiérarchie policière serre les rangs face aux solides éléments à charge figurant dans le rapport de la Commission Farlam, il est crucial que le président Zuma se saisisse fermement du dossier et prenne des mesures à l’encontre de ceux qui se trouvent à la tête de la police », a déclaré Deprose Muchena, directeur d’Amnesty International pour l’Afrique australe.

« S’il ne le fait pas, les homicides illégaux commis par des policiers le 16 août 2012 à Marikana demeureront impunis. Les victimes et leurs familles sont actuellement privées de justice, ce qui est inacceptable. »

L’opération policière menée le 16 août 2012 a été déclenchée à la suite d’une décision prise la veille au soir par des hauts responsables de la police. Elle visait à désarmer et disperser de force les grévistes alors qu’une effusion de sang était à prévoir. En juin 2015, la Commission d’enquête Marikana (également appelée Commission Farlam) a publié un rapport dans lequel elle qualifiait d’imprudente et d’inexplicable cette décision qui, selon elle, avait été la « cause décisive » des homicides.

Depuis le début, la police a tenté systématiquement de dissimuler ou de falsifier les preuves et d’induire la Commission Farlam en erreur par d’autres moyens. Le rapport était extrêmement critique à l’égard de la hiérarchie policière, y compris du directeur national, car elle avait apporté des témoignages évasifs et participé à la destruction, à la dissimulation et à la fabrication d’éléments de preuve.

La Commission Farlam a recommandé qu’une équipe dirigée par un représentant du pouvoir judiciaire détermine si le directeur national pouvait continuer d’exercer ses fonctions. Le président Zuma doit faire usage de son autorité pour créer ce groupe de toute urgence et suspendre le directeur national en attendant les conclusions de l’enquête. Cette mesure devrait ouvrir la voie et donner lieu à la suspension d’autres policiers impliqués et faciliter de nouvelles enquêtes et procédures disciplinaires, comme l’a recommandé la Commission Farlam.

De nombreuses familles sont concernées par les homicides du 16 août 2012 et par les homicides illégaux imputables à la police et aux grévistes qui ont eu lieu les jours précédents. Chez les proches des victimes, le chagrin demeure palpable. L’un d’eux a d’ailleurs expliqué à Amnesty International : « C’est tellement douloureux de ne pas savoir qui sera tenu pour responsable alors que nos maris sont morts comme des chiens. »

« Trois ans après, on ressent encore les effets des événements de Marikana dans le chagrin des familles de toutes les victimes, dans la souffrance des blessés et dans la soif de justice des Sud-Africains », a déclaré Deprose Muchena.

« Le président Jacob Zuma doit veiller sans délai à ce que les principales recommandations de la Commission Farlam soient appliquées. Il faut que les auteurs présumés de tous les homicides qui ont eu lieu au cours de cette semaine terrible soient traduits en justice. »

Complément d’information

L’opération de police menée à Marikana le 16 août 2012 était destinée à désarmer, disperser et arrêter les participants à une grève et à un rassemblement jugés illégaux sur le site minier appartenant à la société Lonmin à Marikana.

Lorsque la police a ouvert le feu, 34 mineurs ont été tués et plus de 70 grièvement blessés.

Dans la nuit du 15 août, des responsables de la police ont décidé de désarmer de force les manifestants sans que ces derniers ne se soient faits plus menaçants à un quelconque moment. La décision de déployer un grand nombre de policiers équipés d’armes à feu et de munitions réelles n’était pas motivée par une menace de mort ni par l’intention de protéger des vies.

Ces actions étaient donc illégales au regard du droit sud-africain, aux termes duquel les policiers doivent limiter autant que possible le recours à la force, ainsi que du droit et des normes internationaux, en particulier l’obligation de respecter et de protéger la vie. En vertu des Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu, celles-ci ne sauraient être utilisées que pour se défendre d’une menace imminente de mort ou de blessure grave, et seulement lorsque des mesures moins extrêmes sont insuffisantes pour atteindre ces objectifs.

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