Afrique du Sud. La justice pour les morts de Marikana est en jeu

Le gouvernement sud-africain doit veiller à ce que la Commission d’enquête sur les homicides de Marikana offre véritablement un accès équitable à la justice, a déclaré Amnesty International jeudi 15 août.

Un an après les atteintes aux droits humains de grande ampleur perpétrées dans la mine de la société Lonmin à Marikana, la tâche essentielle consistant à amener les responsables de ces actes à rendre des comptes n’a pas été menée à bien et risque de ne pas l’être.

La commission d’enquête, mise en place par les autorités pour établir les faits et faire des recommandations au gouvernement, traverse actuellement une crise.

« À tous égards, le résultat de l’opération policière menée à Marikana était absolument catastrophique, a indiqué Noel Kututwa, directeur adjoint du programme Afrique d’Amnesty International.

« Les conséquences durables sur le respect et la protection des droits humains en Afrique du Sud seront lourdes si les autorités ne prennent pas les mesures nécessaires afin de mettre en œuvre l’obligation de rendre des comptes pour les événements survenus à Marikana le 16 août 2012.

À Marikana, 34 mineurs en grève étaient morts sous les tirs de la police. Plus de 80 mineurs avaient également été grièvement blessés.

Les mineurs blessés, témoins directs des événements du 16 août 2012, ont décidé de suspendre leur participation aux travaux de la Commission. Ces hommes, inculpés de charges pénales liées à ces évènements, se sont retirés en juillet en raison du manque de fonds destinés à leur représentation juridique. Ils se sont adressés à la Cour constitutionnelle pour former un recours contre cet accès discriminatoire aux travaux de la Commission.

« Les témoins, notamment ceux qui sont toujours inculpés de charges pénales, doivent bénéficier des services d’un conseil juridique lorsqu’ils se préparent à livrer des éléments de preuve et doivent pouvoir le faire sans crainte de représailles », a estimé Noel Kututwa.

Les risques de représailles sont illustrés par le conflit social qui se poursuit, par le climat de peur et par les homicides qui sont encore commis dans le secteur de Marikana.

D’autres participants et leurs équipes juridiques se sont également retirés en signe de solidarité, notamment les familles des mineurs décédés. Ils ont montré du doigt le déséquilibre entre le soutien accordé aux mineurs blessés et l’équipe d’avocats bénéficiant d’importantes ressources qui défend la police.

Si elle n’est pas résolue, cette situation, qui affecte la légitimité de la Commission, risque également de retentir sur d’autres procédures d’obligation de rendre des comptes et de réparation qui dépendent des conclusions de la Commission.

Amnesty International exhorte le gouvernement à veiller à ce que la commission puisse mener à bien sa mission, dans des conditions parfaitement équitables pour tous, en soutenant la pleine et entière participation de toutes les parties.

« Il semble que règne une absence critique de volonté politique pour amener la police et les responsables de la police à rendre pleinement compte de leurs actes », a conclu Noel Kututwa.

Complément d’information

L’opération de police menée à Marikana le 16 août 2012 était manifestement destinée à disperser et arrêter les mineurs participant à la grève du site appartenant à la société Lonmin.

Lorsque la police a ouvert le feu, 34 mineurs ont été tués et plus de 80 grièvement blessés.

La Commission se penche sur la mort de 10 autres personnes, mortes la semaine précédente. Il s’agit notamment de deux agents de sécurité et de deux employés de la société Lonmin, qui auraient été tués par les grévistes. Deux policiers et trois mineurs grévistes sont également morts dans des circonstances toujours non élucidées le 13 août 2012.

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