Communiqué de presse

Afrique du Sud : la police s’en prend à plusieurs reprises aux demandeurs d’asile alors que la xénophobie augmente

Les autorités sud-africaines doivent cesser de tenter d’« évincer » les demandeurs d’asile, a souligné Amnesty International mercredi 29 mai, après que des policiers ont utilisé du gaz poivre et des grenades assourdissantes pour repousser une foule désespérée devant un service d’accueil des réfugiés au Cap.

Environ un millier de demandeurs d’asile et de réfugiés tentant de renouveler légalement leur permis de séjour au bureau d’accueil des réfugiés du Cap se voient refuser l’entrée depuis lundi 27 mai. Durant les trois jours écoulés, ils ont été la cible de grenades assourdissantes, de gaz poivre, de tirs de sommation et de jets d’eau.

Les tensions devant ce bureau du Cap font écho à une récente augmentation, au niveau national, du nombre d’attaques visant de petites entreprises appartenant à des demandeurs d’asile et des réfugiés.

Un témoin des faits le 27 mai a raconté l’épisode à Amnesty International :

« Soudain, la foule a commencé à reculer. J’ai demandé à quelqu’un ce qui se passait et on m’a répondu que la police aspergeait les gens [de gaz poivre]. Ensuite j’ai entendu une forte détonation ressemblant à un coup de feu et la foule s’est mise à courir. J’ai couru avec elle. J’ai vu un homme avec du sang qui coulait sur la tête et deux hommes avec les yeux rouges qui avaient été aspergés. »

Le même jour, non seulement des policiers ont fait usage de gaz poivre, mais des agents de sécurité ont aussi utilisé un tuyau d’arrosage pour repousser un millier de demandeurs d’asile et de réfugiés, parmi lesquels des enfants en bas âge et leurs mères, qui attendaient pour renouveler leurs papiers. Les informations faisant état de détonations semblables à des coups de feu concordent avec celles indiquant que des grenades assourdissantes ont été utilisées.

Depuis la semaine dernière, seuls les femmes et les enfants sont autorisés à accéder au bureau d’accueil des réfugiés, si bien que des centaines d’hommes demandeurs d’asile et réfugiés sont laissés à la porte, de plus en plus anxieux et en colère.

Certains témoignages signalent l’utilisation de grenades assourdissantes et de tirs de sommation pour disperser la foule le 28 mai, et le lendemain des agents de sécurité ont repoussé physiquement la foule.

Le ministère de l’Intérieur a essayé de fermer totalement le bureau du Cap, une décision qui s’inscrit, semble-t-il, dans le cadre d’un projet du gouvernement visant à fermer les bureaux d’accueil des réfugiés installés dans les villes et déplacer aux frontières du pays tous les services chargés d’examiner les demandes d’asile. Cette initiative est contestée énergiquement devant les tribunaux par les organisations de défense des réfugiés.

« La pression intolérable qui s’accumule sur les demandeurs d’asile et les réfugiés en Afrique du Sud porte atteinte à la protection dont ils doivent pouvoir bénéficier aux termes de la législation nationale et du droit international », a déclaré Netsanet Belay, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.

En raison des nouvelles pratiques de l’administration et d’un énorme retard de traitement des dossiers, la foule des réfugiés, continuellement refoulée, devient de plus en plus désespérée.

Un demandeur d’asile qui est tombé et s’est blessé la main après avoir été arrosé d’eau avec un tuyau le 27 mai a indiqué à Amnesty International qu’il faisait la queue, comme beaucoup d’autres, depuis 4 heures du matin pour renouveler son permis de séjour.

De nombreuses personnes interrogées par Amnesty International ont maintenant un permis expiré bien qu’elles aient fait la queue tous les jours avant l’aube pendant une semaine. Cette situation les expose à des amendes, une détention, une expulsion ou même un renvoi forcé dans le pays qu’elles peuvent avoir fui en raison de persécutions.

Malgré un arrêt rendu en mars par la Cour suprême d’Afrique du Sud, qui lui a demandé de maintenir l’ensemble de ses services, le bureau d’accueil des réfugiés du Cap a cessé de fournir des services aux personnes tentant de déposer une demande d’asile et aux demandeurs d’asile qui se sont enregistrés en premier lieu dans un autre bureau, même si ce dernier est situé loin du Cap. Le ministère de l’Intérieur a fait appel de l’arrêt de la Cour suprême.

Amnesty International relève par ailleurs un environnement de plus en plus hostile, discriminatoire et xénophobe envers les personnes qui sollicitent l’asile en Afrique du Sud. En 2012, des pillages et des destructions de commerces et des déplacements de demandeurs d’asile et de réfugiés ont eu lieu dans presque toutes les provinces, et l’organisation a remarqué que cette pratique se poursuivait d’une manière de plus en plus flagrante.

Des organisations humanitaires et de défense des droits humains, dont Amnesty International, ont appelé à plusieurs reprises le gouvernement sud-africain à mettre en œuvre une stratégie nationale de prévention, de protection et d’accès à la justice pour les victimes de ces attaques. Ces recommandations ne se sont pas concrétisées.

« L’absence de réponse satisfaisante des autorités à la violence que continuent de subir les réfugiés et les demandeurs d’asile traduit un manque de volonté politique et constitue un manquement à leurs obligations découlant de la législation nationale et internationale relative aux réfugiés, a ajouté Netsanet Belay.

« La possibilité que le déplacement rapide et à grande échelle de dizaines de milliers de réfugiés et demandeurs d’asile qui a eu lieu en 2008 se reproduise est toujours présente, et elle le restera tant que le gouvernement ne protègera pas leurs droits. »

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