Albanie. Il faut sans plus attendre faire toute la lumière sur la « disparition » de Remzi Hoxha

Déclaration publique

EUR 11/010/2006

En ce jour anniversaire de la « disparition » de Remzi Hoxha, le 21 octobre 1995, Amnesty International exhorte les autorités albaniennes à faire toute la lumière sur son sort sans plus tarder. Les proches de Remzi Hoxha attendent depuis onze ans de savoir ce qui lui est arrivé ; Amnesty International considère que l’État albanais a le devoir de répondre à leurs appels désespérés.

En août 2006, Amnesty International a écrit au Premier ministre Sali Berisha pour lui demander que toutes les mesures nécessaires soient prises pour que la « disparition » de Remzi Hoxha soit clarifiée sans délai et les personnes soupçonnées d’en être responsables, déférées à la justice. Amnesty International n’a pas reçu de réponse à ce courrier.

L’organisation a constaté que Bashkim Gazidede, directeur du Service national de renseignements (ShIK) au moment où Remzi Hoxha a été, semble-t-il, arrêté et torturé par des employés du ShIK, est rentré en Albanie en décembre 2005 après une absence de plusieurs années. Amnesty International pense que cet homme pourrait faire la lumière sur cette affaire et contribuer à lever enfin le voile sur la « disparition » de Remzi Hoxha.

Complément d’information

Il y a onze ans, des hommes sont venus chercher sur son lieu de travail à Tirana Remzi Hoxha – Albanais né en Macédoine et vivant en Albanie depuis 1992 – et l’ont emmené dans une voiture qui aurait par la suite été identifiée comme appartenant au Service national de renseignements (ShIK). Bien que sa famille ait rapidement signalé sa « disparition » et enquêté auprès de la police et d’autres instances, elle n’a jamais pu savoir ce qui lui était arrivé. Une enquête officielle sur sa « disparition » aurait été suspendue en 1996.

En 2003, l’enquête sur cette affaire a été de nouveau ouverte, sur recommandation du médiateur albanais. Cette enquête a conclu que trois anciens employés du ShIK, Arben Sefgjini, Budion Meçe et Ilir Kumbaro (ce dernier ayant quitté le pays, probablement en 1997), s’étaient rendus coupables de « forfaiture » et de « torture » (articles 248 et 86 du Code pénal) sur la personne de Remzi Hoxha, et à l’encontre de deux autres hommes, Ziso Kristopulli et Avdyl Loshaj, également détenus en octobre 1995, mais libérés peu de temps après.

Cependant, en application de la loi d’amnistie n° 8202 adoptée en mars 1997, qui couvrait ces deux infractions, les charges retenues contre les trois hommes ont été abandonnées. En mai 2004, Arben Sefgjini et Budion Meçe ont été libérés sur décision judiciaire. Les trois hommes n’ont pas été inculpés de meurtre, ni de torture ayant entraîné la mort – crimes non couverts par la loi d’amnistie – parce que l’enquête n’a pas établi si Remzi Hoxha était mort ou non. Amnesty International considère que maintenant tout doit être mis en œuvre pour obtenir les éléments qui permettront de connaître le sort qui a été réservé à Remzi Hoxha.

L’organisation s’oppose, par principe, à l’impunité pour les auteurs d’actes de torture ou pour les personnes soupçonnées de tels actes, et elle considère que la loi d’amnistie n° 8202, en incluant les actes de torture (autres que ceux ayant entraîné la mort) viole les traités internationaux relatifs aux droits humains ratifiés par l’Albanie, dont la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.


« Disparitions » - Violations du droit international relatif aux droits humains

Les « disparitions » constituent des violations de la législation et des normes internationales relatives aux droits humains. L’article 1, alinéa 2, de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies en 1992 dispose que la disparition forcée « constitue une violation des règles du droit international, notamment celles qui garantissent à chacun le droit à la reconnaissance de sa personnalité juridique, le droit à la liberté et à la sécurité de sa personne et le droit de ne pas être soumis à la torture ni à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L’article dispose que la disparition forcée « viole en outre le droit à la vie ou le met gravement en danger ». L’article 13 de la Déclaration dispose qu’une enquête doit pouvoir être menée « tant qu’on ne connaît pas le sort réservé à la victime d’une disparition forcée ».

Les « disparitions » sont également des actes d’une extrême cruauté qui affectent tant les victimes que leur famille et leurs amis. La souffrance continue des proches d’un « disparu », qui demeurent dans l’ignorance de ce qu’il est advenu d’un être qui leur était cher, s’apparente, aux termes de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à une violation de leur droit à ne pas être soumis à la torture ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant.

En avril 2005, face à l’incapacité des autorités albanaises à faire toute la lumière sur le sort de Remzi Hoxha et à déférer à la justice les personnes soupçonnées d’être responsables de sa « disparition », Amnesty International a soumis son cas au Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits humains.

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