« Aujourd’hui, nous nous joignons à des organisations de toute la région pour envoyer un message simple aux pays d’Amérique latine et des Caraïbes : il est temps qu’ils cessent de faire la sourde oreille aux demandes en faveur d’une éducation sexuelle complète laïque, scientifique et axée sur le genre », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
Avec le slogan #DeseoSeaDerecho, la campagne appelle les États à accélérer considérablement la réalisation de leur obligation d’assurer la mise en œuvre universelle d’une éducation sexuelle complète. L’éducation sexuelle complète est un instrument clef pour la prévention des violences sexuelles qui peut sauver la vie des enfants et des adolescent·e·s en les aidant à demander et obtenir de l’aide rapidement, ainsi que pour la réalisation d’autres droits humains.
La campagne vise en outre à faire face à la grave augmentation des attaques et de la désinformation visant les politiques et les lois destinées à assurer l’égalité des genres et les droits sexuels et reproductifs dans l’éducation publique, dont sont à l’origine des groupes hostiles aux droits humains qui diffusent de fausses informations et des mensonges créant une grande peur parmi les jeunes et leur famille et menaçant les droits.
« Il est temps que [les pays d’Amérique latine et des Caraïbes] cessent de faire la sourde oreille aux demandes en faveur d’une éducation sexuelle complète laïque, scientifique et axée sur le genre »
La situation concernant la réalisation du droit à une éducation sexuelle complète dans la région est bien sombre. Dans certains pays, il n’existe pas de soutien institutionnel en faveur d’une éducation sexuelle complète, ce qui rend sa mise en œuvre impossible. Par exemple, au Paraguay, à la suite de la pression exercée par des groupes opposés à l’égalité des genres et aux droits humains, le ministère de l’Éducation a émis une résolution en 2017 interdisant dans le système d’éducation publique tout le matériel éducatif concernant ce que le ministère appelle la « théorie et/ou idéologie du genre ». Cette résolution est toujours en vigueur à ce jour.
Des initiatives similaires ont également été lancées dans d’autres pays. Au Guatemala, la proposition de loi n° 5272, qui interdirait aux institutions éducatives privées et publiques de mettre en œuvre des politiques et des programmes d’éducation sexuelle complète, a été approuvée en deuxième lecture devant le Congrès en 2018.
Des avancées positives en vue d’obtenir des progrès dans ce domaine ont également été freinées par des groupes d’opposition. En République dominicaine, un arrêté départemental en faveur de l’élaboration d’une politique sur l’égalité des genres émis en 2019 par le ministère de l’Éducation s’est heurté à une forte hostilité. À ce jour, le ministère n’a toujours pas de politique à ce sujet.
Même dans les pays ayant des lois ou politiques publiques soutenant le droit à une éducation sexuelle complète, sa mise en œuvre efficace reste extrêmement défaillante. En Argentine, par exemple, où une éducation sexuelle complète est obligatoire au titre de la loi depuis 2006, des données du ministère de l’Éducation montrent que huit élèves sur dix ont indiqué que celle-ci n’était pas proposée dans leurs établissements scolaires.
« L’éducation sexuelle complète est un outil essentiel pour la défense des droits humains. Des éléments solides prouvent qu’elle peut contribuer à lutter de manière très efficace contre [...] les violences et les inégalités liées au genre ou des problèmes liés à la santé sexuelle et reproductive »
Ces insuffisances interviennent dans une région en proie à de forts taux d’inégalité des genres, de violences faites aux femmes, aux filles et aux personnes LGBTI, de grossesse précoce et non désirée et d’autres atteintes aux droits sexuels et reproductifs. L’éducation sexuelle complète est destinée à lutter contre ces problèmes.
« L’éducation sexuelle complète est un outil essentiel pour la défense des droits humains. Des éléments solides prouvent qu’elle peut contribuer à lutter de manière très efficace contre un vaste éventail de problèmes structurels qui gangrènent nos sociétés depuis des dizaines d’années, comme notamment les violences et les inégalités liées au genre ou des problèmes liés à la santé sexuelle et reproductive. Elle est également essentielle pour veiller à ce que les enfants et les adolescent·e·s puissent mener leurs projets de vie en toute égalité et prendre des décisions libres et éclairées. Mais les États de la région ne donnent toujours pas suffisamment la priorité à cette question. Cela doit changer », a déclaré Erika Guevara-Rosas.
Actuellement, plus de 50 organisations travaillant sur diverses questions, notamment les droits humains, les droits sexuels et reproductifs, l’éducation, la santé, les droits des enfants et les droits des personnes LGBTI, dans neuf pays prennent part à la campagne ESIgualdad.