Communiqué de presse

Amnesty International condamne un anniversaire des plus choquants en Érythrée : 11 années de détention arbitraire au secret

Onze ans après l’arrestation d’un groupe de 11 personnalités politiques et de 10 journalistes, qui n’ont pas été inculpés, jugés ni revus en public depuis, Amnesty International condamne une nouvelle fois leur détention arbitraire prolongée. Elle condamne également la détention arbitraire de milliers d’autres prisonniers d’opinion et prisonniers politiques dans tout l’Érythrée.

Les 11 responsables politiques, anciens membres du Conseil central du parti au pouvoir, le Front populaire pour la démocratie et la justice (FPDJ), ainsi que quatre autres, qui forment un groupe connu sous le nom du « G 15 », ont publié en septembre 2001 une lettre ouverte à l’attention du gouvernement et du président Issayas Afeworki, pour réclamer des réformes et l’ouverture d’un « dialogue démocratique ». Si l’un d’entre eux a abandonné le groupe et trois ont fui le pays, les 11 autres ont été arrêtés le 18 septembre 2001 pour, selon le gouvernement érythréen, « atteintes à la sûreté de la nation ».

Ce même jour, le gouvernement avait annoncé la fermeture de tous les organes de presse privés et 10 journalistes de renom avaient été appréhendés au cours de la semaine suivante.

Depuis leur arrestation, ces 21 personnes n’ont été inculpées d’aucun crime et n’ont jamais comparu devant un tribunal. Leurs familles n’ont pas été autorisées à leur rendre visite, pas plus qu’elles n’ont été informées du lieu où elles se trouvent. Neuf des prisonniers du G 15 seraient morts en prison. Le journaliste Dawit Isaak, qui avait été arrêté en 2001, serait mort courant 2011. Selon certaines informations qui ont filtré en août 2012, les journalistes Dawit Habtemichael, Mattewos Habteab et Wedi Itay, également appréhendés lors de cette vague de répression, sont décédés dans le camp pénitentiaire d’Eiraeiro, dans le nord-est du pays.

Plus de 10 ans après leur arrestation, le gouvernement érythréen refuse de révéler quel sort leur a été réservé et de confirmer si oui ou non plusieurs d’entre eux sont morts en détention.

Il ne s’agit pas de cas isolés. Des milliers de personnes en Érythrée connaissent le même sort que ces responsables politiques et ces journalistes arrêtés en 2001. Avant comme après cette vague d’arrestations, des milliers de prisonniers d’opinion et de prisonniers politiques ont été placés en détention arbitraire dans tout le pays, dont d’autres journalistes et responsables politiques, des pratiquants religieux, des étudiants, et des milliers de jeunes gens qui cherchent à éviter la conscription pour une durée illimitée, dans le cadre du tristement célèbre service national. En outre, des milliers de personnes sont incarcérées pour avoir tenté de fuir le pays.

À l’occasion de l’anniversaire du 18 septembre 2001, Amnesty International dénonce la pratique révoltante que constitue le recours généralisé à la détention arbitraire en Érythrée, ainsi que – fait des plus choquants – la détention sans inculpation ni jugement, depuis plus de 10 ans, de très nombreux Érythréens.

Amnesty International exhorte le gouvernement érythréen à libérer immédiatement tous les prisonniers d’opinion. Toute personne soupçonnée d’être responsable d’une infraction pénale doit être inculpée d’un crime prévu par la loi et jugée dans les meilleurs délais devant un tribunal civil, dans le respect des normes internationales d’équité, ou libérée immédiatement et sans condition. Le gouvernement érythréen doit faire en sorte que 2012 soit la dernière année où l’on commémore cette date symbolique, tandis que des Érythréens sont maintenus en détention pour avoir exercé leurs droits fondamentaux, au mépris de la justice.

L’organisation salue la création par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies d’un rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Érythrée et attend avec impatience la désignation du titulaire du mandat, prévue au mois de septembre. Ce mandat va contribuer à briser le silence qui entoure depuis si longtemps la situation désastreuse en termes de droits humains qui prévaut en Érythrée.

Amnesty International encourage le rapporteur spécial à s’intéresser tout particulièrement aux milliers de prisonniers d’opinion et de prisonniers politiques maintenus en détention arbitraire dans le pays, ainsi qu’aux sévères restrictions imposées à la liberté d’expression, de réunion et de religion, à la conscription qui se traduit par un service national pour une durée illimitée, au recours au travail forcé, à la prédominance de la torture et d’autres formes de mauvais traitements, et aux conditions de détention déplorables.

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