Communiqué de presse

Amnesty International demande au Burundi de libérer des avocats incarcérés pour des motifs fallacieux

Le gouvernement burundais doit immédiatement libérer deux éminents avocats placés en détention sur fond de conflit avec le gouvernement, a déclaré Amnesty International jeudi 28 juillet, tandis qu’une grève nationale des avocats se poursuit.

Isidore Rufikiri, bâtonnier de l’Ordre des avocats du Burundi, a été arrêté mercredi 27 juillet après avoir pris la parole lors d’un rassemblement dans la capitale, Bujumbura. Les avocats burundais se sont mis en grève cette semaine afin de réclamer la libération de leur consœur Suzanne Bukuru, arrêtée le 15 juillet pour « complicité d’espionnage » après avoir parlé à des journalistes français d’une affaire de viol présumé.

« L’arrestation de ces avocats porte atteinte au droit à la liberté d’expression », a déclaré Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.

« Les autorités burundaises doivent immédiatement remettre ces avocats en liberté et leur permettre, ainsi qu’à leurs collègues, de pratiquer leur activité librement. La manière dont elles se comporteront dans cette affaire constituera un test décisif pour la crédibilité du système de justice burundais. »

Le parquet a convoqué Isidore Rufikiri à la Cour d’appel mercredi 27 juillet ; il a été entendu pour « outrage à magistrats », une charge apparemment en rapport avec des propos qu’il a tenus sur l’ingérence dans le système judiciaire lors d’une action de protestation menée par des avocats lundi 25 juillet.

Après cet interrogatoire, Isidore Rufikiri a été directement emmené à la prison centrale de Mpimba.

Suzanne Bukuru avait elle aussi été convoquée par le parquet, le 15 juillet, en relation avec une affaire dans laquelle elle représente cinq jeunes filles affirmant avoir été violées par un ressortissant français vivant au Burundi. L’accusé a été déclaré coupable le 25 juillet et condamné à une peine de 25 années d’emprisonnement et à une amende de 14 000 euros. Il a décidé de faire appel.

Suzanne Bukuru a été interrogée à propos du fait qu’elle ait mis ses clientes en relation avec des journalistes français venus au Burundi avant le prononcé du jugement. Elle a été inculpée de « complicité d’espionnage », chef d’accusation forgé de toutes pièces et sans aucun rapport avec les faits, passible de la réclusion à perpétuité et ne pouvant être retenu que contre des étrangers et en temps de guerre.

Suzanne Bukuru a été immédiatement transférée à la prison centrale de Mpimba et le tribunal déterminera lundi 1er août s’il lui accorde la libération sous caution.

Le parquet a par ailleurs interrogé Edras Ndikumana, un correspondant de Radio France International (RFI), à propos de son rôle dans le rapprochement entre des journalistes français et Suzanne Bukuru.

Complément d’information

L’indépendance du système de justice burundais est régulièrement compromise par des ingérences politiques. Des juges sont parfois sanctionnés en étant mutés dans une autre province pour avoir pris des décisions défavorables au pouvoir exécutif.

Dans son rapport de mai 2011, Fatsah Ouguergouz, l’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Burundi, a déclaré que les manquements au principe d’indépendance étaient l’une des principales faiblesses du système de justice burundais.

Les Principes de base relatifs au rôle du barreau des Nations unies disposent que les avocats doivent pouvoir s’acquitter de leurs fonctions professionnelles « sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue », mais reconnaissent aussi expressément qu’ils doivent jouir de la liberté d’expression, et en particulier, « ils ont le droit de prendre part à des discussions publiques portant sur le droit, l’administration de la justice et la promotion et la protection des droits de l’homme ».

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