Communiqué de presse

Amnesty soumet à la Cour interaméricaine des droits de l’homme un mémoire destiné à éclairer celle-ci sur le droit des peuples indigènes d’être consultés et de donner leur consentement

Jeudi 21 juillet, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a accepté le mémoire destiné à éclairer la cour (Amicus Curiae) que lui a remis Amnesty International dans l’affaire peuple Kichwa de Sarayaku c. Équateur. Ce cas est en rapport avec l’autorisation accordée par l’État équatorien à une entreprise souhaitant effectuer des activités de prospective sur le territoire ancestral de ce peuple de l’Amazonie équatorienne en 2002 et 2003, sans consulter cette population ni même l’en informer. Ces activités ont inclus la création de 467 puits à l’aide de plus de 1 400 kg d’explosifs qui se trouvent toujours ensevelis sur place, ainsi que d’innombrables actes d’intimidation et de violence contre les membres de cette communauté. La population de Sarayaku a porté le cas devant la justice internationale il y a plus de huit ans, soutenue en cela par la Fundación Pachamama et le Centre pour la justice et le droit international. La Cour doit se prononcer sur l’affaire d’ici la fin de l’année.

Dans son mémoire à la cour, Amnesty International signale qu’aux termes de la jurisprudence interaméricaine et internationale, l’État a l’obligation d’obtenir le consentement libre, préalable et éclairé des peuples indigènes concernant les projets de développement et d’investissement susceptible d’avoir un « impact considérable » sur les droits de ceux-ci, quelle que soit l’étendue du projet de développement ou d’investissement. Le projet ne peut alors avancer sans le consentement de la communauté. Le mémoire précise également que tout « impact considérable » sur les peuples indigènes doit être envisagé du point de vue des populations concernées et doit prendre en compte leur situation présente. C’est-à-dire, leur vulnérabilité actuelle, les injustices qu’elles ont subies tout au long de leur histoire et les effets cumulatifs des violations du passé.

Si la norme relative au droit d’être consulté et de donner son consentement a été élaborée par la Cour en 2007 dans le cadre du cas peuple Saramaka c. Suriname, cette instance se voit désormais offrir l’occasion de renforcer celle-ci. Le développement de cette norme dans le cas de Sarayaku aura des conséquences importantes non seulement pour cette population mais également pour de nombreuses autres populations indigènes en Équateur et dans le reste des Amériques.

Plusieurs États de la région et d’autres acteurs influents abordent malheureusement le débat de manière antagoniste, soutenant que les projets d’extraction servant l’intérêt national en augmentant la richesse du pays ne doivent pas être bloqués par les droits de petits groupes indigènes. Ce discours est non seulement erroné mais également dangereux, car il met à mal le principe d’universalité des droits humains et parce qu’il conduit à d’innombrables violations de ces droits et à des conflits sociaux évitables sur le continent.

Amnesty International estime que le développement économique peut et doit respecter les droits fondamentaux de tous de manière équitable, sans discrimination. Les normes internationales en matière de droits humains offrent un cadre bien défini pour l’établissement d’un dialogue de bonne foi, qui soit respectueux des populations indigènes. L’obligation d’obtenir leur consentement libre, préalable et éclairé protège les peuples indigènes, en particulier lorsque sont en jeu les intérêts économiques d’acteurs non étatiques mieux placés que les communautés concernées – souvent marginalisées – pour influer sur les décisions des États. Les normes relatives aux droits humains ont pour objectif de corriger ce déséquilibre perdurant depuis des siècles dans les rapports de pouvoir entre les peuples indigènes et les autres parties intéressées, dont l’État, et qui est à l’origine de la marginalisation, de la pauvreté, de la discrimination et de diverses violations des droits fondamentaux dont sont victimes les populations indigènes à travers le continent.

Vous trouverez le texte intégral du mémoire soumis par Amnesty International à l’adresse suivante :
http://www.amnesty.org/fr/library/info/AMR28/001/2011/en

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