Le maintien en détention du prisonnier d’opinion Luaty Beirão constitue un exemple flagrant du mal que se donnent les autorités angolaises pour réprimer la dissidence, a déclaré Amnesty International mardi 20 octobre, soit un mois après que cet homme a entamé une grève de la faim pour protester contre sa détention.
Le militant et musicien emprisonné Luaty Beirão serait dans un état critique à la clinique Girassol à Luanda, dans laquelle il a été transféré le 15 octobre. Amnesty International demande sa libération immédiate et inconditionnelle.
« Luaty Beirão entame son deuxième mois de grève de la faim et nous pensons qu’il se trouve dans un état critique et que sa vie est en péril. Son placement en détention était un affront à la liberté d’expression, et les autorités semblent vouloir aggraver cette injustice en le gardant enfermé », a déclaré Deprose Muchena, directeur d’Amnesty International pour l’Afrique australe.
« Toutes les poursuites engagées contre Luaty Beirão et ses co-accusés doivent être abandonnées et il doit être libéré immédiatement et sans conditions. »
Luaty Beirão a été arrêté en même temps que 14 autres militants pour des faits liés à une réunion dont le but était de débattre des problèmes dans la gestion des affaires publiques et qui s’est tenue dans la capitale du pays, Luanda, le 20 juin 2015. Ces militants n’auraient jamais dû être emprisonnés, car ils n’ont fait qu’exercer pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion.
Depuis un mois, Luaty Beirão n’ingère que de l’eau mélangée à du sel et du sucre que lui fournit sa famille. Ayant eu des difficultés à ingérer des liquides et à marcher, iI a été admis à l’hôpital pénitentiaire de São Paulo le 9 octobre 2015 où il a accepté, selon sa famille, une perfusion de solution saline pour la première fois le 11 octobre.
Luaty Beirão et les 14 autres militants ont été inculpés le 16 septembre 2015 de préparation d’une « rébellion et de tentative de coup d’État » contre le président. Ils n’ont été informés officiellement des charges retenues contre eux, qui sont considérées comme des atteintes à la sûreté de l’État, qu’après que le délai de 90 jours de détention provisoire autorisé par la loi a expiré.
Le 19 octobre, les avocats des militants ont été informés que le procès aurait lieu entre le 16 et le 20 novembre 2015 devant le tribunal provincial de Luanda.
« Ces 15 militants n’ont commis aucune infraction et ont été emprisonnés uniquement pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression. Ils sont les victimes d’un gouvernement qui cherche à réprimer toute contestation. Ce sont des prisonniers d’opinion qui doivent être libérés immédiatement et sans conditions », a déclaré Deprose Muchena.
Amnesty International fait campagne au nom du groupe de militants, et une pétition demandant leur libération immédiate et inconditionnelle a déjà collecté plus de 31 000 signatures.
Complément d’information
Amnesty International a rassemblé des informations sur la façon dont les libertés d’expression et de réunion pacifique ont été illégalement restreintes en Angola dans un rapport intitulé Punishing Dissent : Suppression of Freedom of Association and Assembly in Angola.
Plusieurs personnes ayant critiqué le gouvernement du président José Eduardo dos Santos ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, de détentions arbitraires et d’actes de torture.
Bien que la liberté d’expression et de réunion pacifique soit clairement inscrite dans la Constitution angolaise et dans plusieurs traités internationaux que l’Angola a signés et ratifiés, ce droit continue d’être bafoué.
Les militantes angolaises Laurinda Gouveia et Rosa Conde ont été inculpées le 16 septembre en même temps que les 15 militants, mais elles ne sont pas en détention.
Albano Bingobingo, qui a été arrêté le 20 juin, en est à son 12e jour de grève de la faim.
Le 11 octobre, des personnes soutenant Luaty Beirão et les autres militants ont organisé une veillée à l’église Sagrada Família de Luanda, en Angola.
Selon les participants à cette veillée, la police était présente pour surveiller l’événement. Des agents armés, des canons à eau et des brigades canines avaient notamment été mobilisés. Le 12 octobre, une autre veillée a été organisée, et plusieurs personnes ont été détenues pendant une courte période par la police.