COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Arabie saoudite. Des défenseurs des droits humains comparaissent devant les tribunaux dans un climat de répression accrue

En Arabie saoudite, deux éminents militants ont été interrogés le 28 novembre au sujet d’accusations non précisées, tandis que la répression monte d’un cran contre le travail de ceux qui défendent les droits fondamentaux, a déclaré Amnesty International.

La veille de leur audience, une cour spéciale de sûreté avait inculpé d’une nouvelle charge un militant des droits humains de renom dans le cadre d’un procès qui dure depuis 20 mois.

« La répression visant la liberté d’expression en Arabie saoudite se durcit ; en 2013 seulement, plus d’une dizaine de militants des droits humains ont été condamnés, a indiqué Philip Luther, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

« Il est grand temps que les autorités permettent aux citoyens d’exprimer pacifiquement leurs opinions et cessent de sanctionner les militants pour leur travail légitime. »

Issa al Hamid et Abdulaziz al Shubaily, cofondateurs de l’Association saoudienne des droits civils et politiques (ACPRA), ont été interrogés le 28 novembre par le Bureau général des investigations et des poursuites.

Les deux hommes ont déjà été interrogés par le passé, mais c’est la première fois qu’ils sont officiellement convoqués, ce qui laisse craindre qu’ils ne soient poursuivis pour leurs activités en tant que défenseurs des droits humains.

Fowzan al Harbi, troisième cofondateur de l’association, a été informé le même jour que la première audience de son procès devant le Tribunal pénal spécial s’ouvrirait le 4 décembre.

Le 27 novembre, l’audience concernant l’affaire de Fadhel Maki al Manasif, membre fondateur du Centre Adala pour les droits humains, n’a pu déboucher sur un jugement. Au contraire, de nouvelles charges ont été portées contre lui et l’audience s’est achevée sans que le tribunal n’ait fixé la prochaine.

Fadhel Maki al Manasif a été arrêté en octobre 2011, et notamment accusé de « désobéissance au dirigeant, en appelant à manifester et en participant à des manifestations », d’avoir « communiqué avec des médias étrangers au sujet de ces manifestations » et « bafoué la loi du pays sur la cybercriminalité en enregistrant, stockant et partageant des informations ».

Le chef d’inculpation ajouté hier s’appuyait sur des notes griffonnées qui auraient été retrouvées dans un mouchoir, dans la poche de Fadhel Maki al Manasif. Selon l’accusation, elles constituent la preuve de sa culpabilité.

Les arguments avancés sont que ces notes démontrent son « comportement abusif, sa désobéissance et ses appels répétés à désobéir au dirigeant » et établissent qu’il a « porté atteinte à la sécurité et à la stabilité de l’État, incité à la division et aux luttes communautaires, et appelé à manifester ».

« Les autorités saoudiennes semblent déterminées à éradiquer toute défense indépendante des droits humains dans le royaume. Au lieu de s’appuyer sur les militants pour instituer des réformes visant à améliorer la situation, elles ont choisi de les emprisonner en invoquant des accusations fausses ou iniques », a déploré Philip Luther.

En mars et juin 2013, trois des membres fondateurs de l’ACPRA, Abdullah bin Hamid bin Ali al Hamid (le frère d’Issa al Hamid), Mohammad bin Fahad bin Muflih al Qahtani et Abdulkareem Yousef al Khoder, ont été condamnés à des peines de prison allant de huit à 11 ans.

Ils ont notamment été inculpés de désobéissance et rupture de l’allégeance au souverain, de mise en cause de l’intégrité des représentants de l’État, d’atteinte à la sûreté de l’État, d’incitation au trouble par l’appel à manifester, et de communication de fausses informations à des groupes étrangers. Amnesty International considère ces trois hommes comme des prisonniers d’opinion.

Abdulaziz al Hussan, avocat de Mohammad al Qahtani et d’Abdullah al Hamid, a dû quitter le pays après avoir été interrogé quelques heures seulement après avoir évoqué les conditions de détention de son client sur Twitter.

L’avocat d’Abdulkareem al Khoder, Abdulaziz al Shubaily, a également été convoqué pour avoir soi-disant insulté un agent de sécurité le jour où son client a été condamné.

Par ailleurs, des personnes liées à d’autres organisations indépendantes de défense des droits humains ont été interrogées et menacées de poursuites, notamment des membres de l’Union pour les droits humaines, ONG récemment fondée.

Waleed Abu al Khair, responsable de la Saudi Arabian Human Rights Monitor, qui était en jugement depuis 19 mois et faisait l’objet d’une interdiction de voyager, a été condamné à trois mois de prison par la cour pénale de Djedda le 29 octobre. Quelques jours avant sa sentence, il a été informé qu’il comparaitrait devant le Tribunal pénal spécial pour des charges quasi identiques. Il reste libre dans l’attente de son jugement en appel.

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