Communiqué de presse

Arabie saoudite : le fondateur d’un site web est détenu depuis un an

Dans une action adressée au roi Abdallah, Amnesty International a exhorté les autorités saoudiennes à libérer immédiatement et sans condition le fondateur d’un site web, en détention et en procès un an après son arrestation pour avoir exprimé ses opinions en ligne.

Raif Badawi, âgé de 29 ans, est le fondateur d’un forum en ligne consacré aux discussions politiques et sociales (« Les libéraux saoudiens »). L’an dernier, au mois de juin, il a été inculpé de « création d’un site web portant atteinte à la sécurité publique et ridiculisant des personnalités islamiques ». L’accusation a appelé à le juger pour « apostasie », un crime passible de la peine de mort en Arabie saoudite.

Cet homme est détenu à la prison de Briman, dans la ville côtière de Djedda, depuis son arrestation le 17 juin 2012.

« Un an plus tard, Raif Badawi est toujours derrière les barreaux, tandis que se poursuit son procès pour le crime que constitue le fait d’avoir encouragé des débats sociaux en ligne », a déclaré Philip Luther, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

« Sa détention démontre le mépris des autorités pour l’expression en ligne, et sert d’avertissement au tiers de la population saoudienne qui utilise les médias sociaux pour s’exprimer, surtout si les opinions en question sont dissidentes. »

Les chefs d’inculpation sont liés à des articles de Raif Badawi, notamment un texte sur la Saint-Valentin qui lui a valu l’accusation d’avoir tourné en dérision la Commission saoudienne pour la promotion de la vertu et la prévention du vice.

Un de ses articles se concluait de la sorte :

« Merci à la Commission pour son enseignement de la vertu et sa volonté que tous les Saoudiens aillent au paradis. »

Il est également accusé de ne pas avoir retiré des articles publiés par des tiers sur son site, notamment un texte insinuant que l’université de l’imam Mohamed ibn Saud était devenue un « nid à terroristes ».

Amnesty International considère Raif Badawi comme un prisonnier d’opinion et demande donc sa libération immédiate et inconditionnelle.

Son procès s’est ouvert en juin 2012 devant le tribunal de district de Djedda et a été entaché d’irrégularités. Selon son avocat, le juge initial a été remplacé par un juge qui avait préconisé que Raif Badawi soit puni pour « apostasie ». Son avocat a contesté l’impartialité du juge dans l’affaire.

Le 17 décembre 2012, le tribunal de district a renvoyé l’affaire devant la Cour générale de Djedda, qui, cinq jours plus tard, a fait signer des documents à Raif Badawi pour que son procès pour « apostasie » puisse se poursuivre.

Des points de vue contradictoires sur les compétences dans cette affaire (notamment sur la notion d’« apostasie » comme chef d’accusation) ont entraîné le transfert de son cas d’un tribunal à l’autre. Le 8 juin, un tribunal de district a relancé l’accusation d’« apostasie », malgré l’objection de la cour d’appel.

« Le procès de Raif Badawi est une tentative d’intimidation contre les personnes qui cherchent à s’engager dans des débats ouverts sur les questions quotidiennes des Saoudiens », a déclaré Philip Luther.

Au cours des deux dernières années, les autorités saoudiennes ont arrêté plusieurs personnes ayant exprimé en ligne des opinions jugées contraires à l’islam.

Hamza Kashgari est toujours détenu sans inculpation ni jugement depuis qu’il a été extradé de Malaisie en février 2012. Il s’y était réfugié après avoir envoyé un tweet sur Mahomet.

L’éminent écrivain et universitaire Turki al Hamad aurait été libéré sans inculpation le 5 juin après avoir été arrêté en décembre 2012 pour des tweets également jugés contraires à l’islam.

Des blogueurs, des critiques et des militants sont de plus en plus menacés du fait de leurs activités en ligne dans le royaume du Golfe.

Le 9 mars 2013, l’Association saoudienne des droits civils et politiques (ACPRA) a dû fermer ses comptes de médias sociaux et cesser ses activités. Deux co-fondateurs de l’ACPRA, Mohammad al Qahtani et Abdullah al Hamid, ont été condamnés respectivement à 10 et à 11 ans d’emprisonnement. Ils ont interjeté appel de leurs peines le 28 mai.

La plupart des militants des droits humains ayant subi des interrogatoires ont vu passer sous leurs yeux des impressions de leurs déclarations en ligne sur Twitter et autres médias sociaux. Des agents de sécurité les ont interrogés sur le sens de leurs écrits et leurs intentions.

Abdul Aziz al Hussan, le principal avocat de Mohammad al Qahtani et Abdullah al Hamid, a subi un interrogatoire peu de temps après sa publication d’un tweet selon lequel il avait rendu visite à ses clients en prison en mars. À son arrivée à la prison d’al Malaz à Riyadh le 11 mars, il avait trouvé Mohammad al Qahtani et Abdullah al Hamid avec des menottes aux poignets, que les gardiens ont refusé de leur enlever. Il a décidé de quitter le pays dans les 24 heures après l’interrogatoire.

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