Argentine. Les communautés indigènes menacées sur leurs terres ancestrales ont besoin de protection

DÉCLARATION PUBLIQUE

ÉFAI - 18 mars 2010

Amnesty International constate avec préoccupation que la communauté indigène de Chuchagasta, dans la province de Tucumán, ne bénéficie pas de mesures de protection efficaces ni de mécanismes qui leur permettraient de faire valoir leurs droits fondamentaux sans craindre d’être victimes de représailles ni de manœuvres d’intimidation. Le représentant de cette communauté, Javier Chocobar, ayant été tué le 12 octobre 2009, il est particulièrement urgent d’agir en ce sens.

Amnesty International a déclaré que les mesures que les autorités argentines sont tenues d’adopter doivent garantir aide et protection aux victimes, témoins et proches, tout au long de la procédure judiciaire se rapportant au meurtre de Javier Chocobar. Il existe des normes internationales relatives à ces droits spécifiques, qui prévoient que ce type de mesures doivent être évoquées avec les personnes concernées, afin que celles-ci puissent se prononcer en connaissance de cause.

D’après les informations reçues, le 12 octobre, un propriétaire terrien des alentours et deux anciens policiers se sont présentés armés devant la communauté de Chuchagasta, dans l’intention d’expulser par la force les membres de celle-ci des terres qu’ils occupent. Face au refus de la communauté d’abandonner ses terres, les trois hommes ont ouvert le feu. Javier Chocobar, âgé de 68 ans, a été tué et quatre autres personnes ont été blessées. Amnesty International a par la suite exhorté les autorités à accorder à la communauté la protection requise.

Les trois hommes ont été arrêtés le 6 novembre, et le juge a ordonné que deux d’entre eux, dont le propriétaire terrien, soient placés en détention provisoire. Le troisième homme a été remis en liberté, bien qu’il ait été inculpé.

Le 18 février dernier, la chambre d’appel de Tucumán a annulé la décision de justice initiale, et prononcé la libération conditionnelle des deux hommes dans l’attente du procès relatif au meurtre de Javier Chocobar et aux blessures par balle infligées à deux autres membres de la communauté.

Amnesty International a appris que les membres de la communauté indigène de Chuchagasta craignaient de recevoir de nouvelles menaces. Deux jours après la libération des deux hommes, des inconnus ont été aperçus aux abords des terres habitées par la communauté et du domicile de Javier Chocobar.

L’organisation déplore que, malgré les menaces proférées à son endroit depuis des années et la mort d’un de ses membres, les risques auxquels la communauté est exposée continuent à être ignorés. Parmi les témoins de la mort de Javier Chocobar se trouvent deux personnes grièvement blessées par balle lors de ce même épisode. « Sans véritable protection des témoins et des victimes, il n’y a aucune garantie que la lumière soit faite sur les événements ni que justice soit rendue pour ce qui s’est passé le 12 octobre », ajoute Amnesty International.

L’organisation souligne qu’il est crucial que les autorités argentines fassent la preuve de leur engagement en faveur des droits fondamentaux des peuples indigènes, en garantissant la sécurité de ces derniers et en prenant des mesures qui mettent fin aux discriminations et aux violations dont ils sont victimes. Amnesty International rappelle aux autorités que les peuples indigènes ont des droits sur leurs terres ancestrales et que ceux-ci doivent être respectés sans que leurs détenteurs ne soient l’objet d’attaques ni de menaces.

Complément d’information

Les membres de la communauté de Chuchagasta, qui appartient au groupe indigène diaguita, continuent à demander la reconnaissance de leurs terres ancestrales et la pleine application de la loi d’urgence 26.160 de 2006, qui interdit de déloger les peuples autochtones de leurs terres le temps de l’évaluation et de l’enregistrement des titres de propriétés de ces populations, et ce, sur l’ensemble du territoire argentin. En novembre 2009, les dispositions de ladite loi ont été prorogées jusqu’en 2013.

Malgré l’existence de ce texte, plusieurs communautés indigènes sont menacées d’être expulsées de force de leurs terres par des propriétaires des alentours - avec la complicité des autorités judiciaires locales - qui entendent exploiter les ressources naturelles qui se trouvent sur place.

Selon la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, « [l]es peuples autochtones ont le droit aux terres, territoires et ressources qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu’ils ont utilisés ou acquis. »

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