Des personnes arrêtées sans mandat ni inculpation

Les autorités du Bangladesh doivent mettre fin à la détention illégale de Mir Qasem Ali et d’Humman Qader Chowdhury, arrêtés respectivement le 9 et le 4 août, ont déclaré Amnesty International et Human Rights Watch le 14 août 2016.

Les deux hommes ont été arrêtés sans mandat ni inculpation, n’ont pas comparu devant un magistrat et n’ont pas pu communiquer avec leur famille ni leur avocat.

« Il est clair que Qasem Ali et Chowdhury sont victimes d’une disparition forcée aux mains des forces de sécurité. Pourtant, le gouvernement continue de nier leur détention. Tous deux se sont vus refuser la possibilité de communiquer avec leurs avocats et leurs familles, et aucun n’a comparu devant un magistrat, a déclaré Champa Patel,directrice pour l’Asie du Sud à Amnesty International.

« C’est une pratique qui est devenue la routine au Bangladesh, et qui doit prendre fin.  »

Chowdhury, haut responsable du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), principale force d’opposition, a été arrêté dans sa voiture, alors qu’il se rendait avec sa mère au tribunal pour assister à une audience, le 4 août vers 11 heures. Selon sa mère, plusieurs hommes en civil, dont certains étaient armés, ont contraint Chowdhury à sortir de son véhicule et à les suivre.

Qasem Ali, avocat à la Cour suprême, a été arrêté chez lui le 9 août vers 23 heures par plusieurs hommes, également en civil. Ces hommes ne se sont pas identifiés comme étant accompagnés de forces de sécurité. Son épouse et son cousin étaient présents au moment de l’interpellation.

Les autorités nient détenir les deux hommes, alors que selon plusieurs sources crédibles, ils se trouvaient au siège du Bataillon d’action rapide (RAB) à Dacca, dans la matinée du 12 août. L’épouse de Qasem Ali a déposé une main courante, premier stade pour signaler une infraction auprès de la police. La famille de Chowdhury a tenté de faire de même, mais la police a refusé d’enregistrer sa plainte.

La famille de Qasem Ali a ensuite appris, mais sans pouvoir le confirmer, qu’il a été transféré au siège de la police judiciaire. C’est là que deux autres détenus ont également été retenus illégalement du 2 juillet jusqu’à leur comparution devant le tribunal la semaine dernière. La famille de Chowdhury a également appris qu’il a été transféré de la police judiciaire vers un autre service, sans pouvoir confirmer lequel.

Le Bangladesh est ébranlé par une série d’homicides et d’attentats à caractère militant, notamment la terrible attaque contre le Holey Artisan Bakery Café à Dacca le 1er juillet, ainsi qu’une autre la semaine suivante contre un rassemblement de l’Aïd. Réagissant de manière tardive, les autorités bangladaises ont arrêté près de 15 000 personnesà la suite de la série d’agressions visant des blogueurs, des laïcs, des étrangers et des militants des droits des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués (LGBTI).

Après l’attaque contre le café, les autorités ont arrêté deux otages, Hasnat Karim et Tahmid Khan, et ont ensuite publié des déclarations contradictoiresconcernant la détention des deux hommes. Un mois plus tard, elles ont finalement admis qu’ils avaient été placés en détention, tout en inventant de faux prétextes pour éviter les accusations de détention illégale.

Chowdhury et Qasem Ali sont les fils de deux figures de l’opposition politique reconnus coupables de crimes de guerre durant la guerre d’indépendance du Bangladesh en 1971. Le père de Chowdhury, Salahuddin Qader Chowdhury, a été exécuté en novembre 2015. Celui de Qasem Ali, ayant épuisé presque toutes ses voies de recours, risque d’être exécuté pour crimes de guerre. Qasem Ali craignait d’être victime d’un enlèvement arbitraire : peu après l’attaque visant le café, le gouvernement s’est mis à affirmer qu’elle était l’œuvre de ceux qui cherchent à faire libérer les criminels de guerre condamnés.

« Les autorités bangladaises sont tenues de poursuivre les responsables présumés des crimes de haine qui gangrènent le Bangladesh depuis des années, notamment les auteurs de la terrible attaque contre le café, a déclaré Brad Adams, directeur de la division Asie de Human Rights Watch.

« Pourtant, il nous faut sans cesse demander au gouvernement de ne pas céder à la réaction impulsive qui consiste à procéder à des détentions arbitraires et secrètes. Il doit mettre fin sans délai à la détention illégale de Chowdhury et Qasem Ali. »

Amnesty International et Human Rights Watch constatent que les forces de sécurité bangladaises ont un passé marqué par de nombreux abus en détention, notamment la torture et les mauvais traitements. Aussi le risque de violences est-il élevé durant les interrogatoires et la détention. La détention illégale de Mir Qasem Ali et d’Humman Qader Chowdhury doit prendre fin sans délai.

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