Attentat de Semdinli en Turquie : des efforts semblent être déployés pour étouffer l’affaire

Déclaration publique

EUR 44/020/2007

Le 14 décembre a eu lieu la première audience du procès des personnes rejugées pour l’attentat à l’explosif perpétré en novembre 2005 contre une librairie à Semdinli, dans le sud-est de la Turquie. Les accusés sont deux agents des services de renseignements militaires et un informateur, ancien membre du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Ils ont tous trois été libérés en attendant la prochaine audience, et les deux membres de la gendarmerie vont maintenant reprendre leurs fonctions. Ces événements viennent renforcer l’idée qu’un tribunal militaire n’est pas en mesure de mener une enquête impartiale et exhaustive sur cet attentat et que des efforts ont été déployés pour étouffer l’affaire.

Amnesty International est préoccupée depuis longtemps par le caractère partial et sommaire de l’enquête sur les circonstances entourant cet attentat, au cours duquel une personne a été tuée et plusieurs autres blessées. Le chef des armées n’a pas autorisé la tenue d’une enquête sur l’éventuelle implication de responsables locaux de la gendarmerie et des forces armées. Le fait de limiter l’enquête à deux membres des forces de sécurité et un informateur a laissé de nombreuses questions sans réponse. À l’issue du premier procès, chacun des accusés avait été reconnu coupable de participation à l’attentat et condamné à un peu plus de trente-neuf ans de réclusion.

Le 16 mai 2007, la Cour d’appel a annulé les condamnations des trois hommes et recommandé que l’affaire soit transmise à un tribunal militaire. Amnesty International avait été vivement préoccupée par ce transfert de juridiction. L’organisation considère en effet que les membres des forces de sécurité soupçonnés de violations graves des droits humains doivent être jugés par un tribunal civil.

La décision du tribunal militaire, deux ans après les faits, de libérer ces hommes et de laisser les deux membres de la gendarmerie reprendre leurs fonctions, a pour effet que nul n’a eu à répondre de cet attentat, tandis que la responsabilité à plus grande échelle des forces de sécurité n’a pas fait l’objet d’enquête digne de ce nom. Amnesty International demande que des investigations exhaustives et impartiales sur les circonstances entourant l’attentat de Semdinli soient menées par une commission d’enquête indépendante, et que les suspects soient jugés par un tribunal civil. Si ceci n’est pas fait, l’affirmation du ministre de la Justice de l’époque, Cemil Çiçek, selon laquelle la Turquie vit actuellement une « ère dans laquelle de tels événements ne restent pas dans l’ombre » risque d’être sérieusement mise en doute.

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