AUTORITÉ PALESTINIENNE - Désordre croissant à Gaza

Index AI : MDE 21/010/2005

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International est gravement préoccupée par le nombre croissant d’homicides de civils, d’enlèvements et d’autres atteintes aux droits humains à Gaza, alors que les accrochages qui ont eu lieu ces dernières semaines entre les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne et des groupes armés palestiniens ont redoublé de violence. Le désordre tendant à s’installer, les civils sont vulnérables face à ces atteintes.

Les luttes pour le pouvoir à caractère endémique et les luttes internes entre factions rivales de l’Autorité palestinienne se sont notablement intensifiées à l’approche du retrait israélien de la bande de Gaza qui doit avoir lieu ce mois-ci. Des groupes armés liés au Fatah, le parti au pouvoir, et au Hamas, ainsi que d’autres factions, se combattent les uns les autres, chacun se prétendant à l’origine du retrait israélien de Gaza. Jusqu’à présent, les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne n’ont pas réussi ou n’ont pas voulu contrôler l’activité des groupes armés et les tenir responsables de leurs actes.

Au cours des deux derniers mois, quelques 15 civils palestiniens dont quatre enfants ont été tués et quelques 25 autres ont été blessés lors de violences ou d’affrontements armés entre des groupes armés palestiniens et les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne. Environ 40 membres des forces de sécurité et 25 membres de groupes armés ont été blessés lors de ces affrontements.

Au moins 11 personnes, dont neuf ressortissants étrangers, ont été enlevées par des groupes armés palestiniens cherchant à faire pression sur l’Autorité palestinienne pour qu’elle libère des membres de leur famille ou pour obtenir d’autres concessions. Toutes les personnes enlevées ont été libérées saines et sauves après quelques heures, en général après des négociations et l’intervention de personnes influentes. Le 8 août 2005, des hommes armés ont enlevé trois membres de l’Office de secours et de travaux des Nations unies (UNRWA) à Khan Yunis. Tous trois, un Britannique, un Suisse et un Palestinien, ont été libérés au bout de quelques heures. Leurs ravisseurs ont demandé la libération d’un responsable du Fatah arrêté la veille par l’une des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne. Les jours précédents, des hommes armés avaient essayé d’obtenir sa libération en attaquant le siège du Croissant-Rouge palestinien et le bureau du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Khan Yunis et en tentant de prendre le contrôle de la municipalité.

Le 29 juillet 2005, deux membres du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), un Australien et un Palestinien, ont été enlevés à Gaza par les parents d’un responsable des services de renseignements militaires de l’Autorité palestinienne qui avait été enlevé la veille par l’un des nombreux groupes armés proches du Fatah. Les deux salariés des Nations unies et le responsable des services de renseignements militaires de l’Autorité palestinienne ont été libérés sains et saufs quelques heures plus tard par leurs ravisseurs respectifs.

Le 13 juillet, dans une affaire du même genre, deux ressortissants étrangers qui travaillaient pour une agence de développement ont été enlevés par les membres d’une famille puissante qui voulaient obtenir la libération de six des leurs, détenus du fait d’une infraction pénale. On ne sait pas si l’un quelconque des responsables d’un enlèvement a jamais été arrêté ou si l’Autorité palestinienne a ouvert des enquêtes.

Au début du mois d’août 2005, deux jours consécutifs, des attentats à la bombe ont eu lieu contre le domicile du procureur général, Hussein Abu Aassi, et celui du chef du Haut Conseil de la magistrature, Zuhair Al Sourani. Ces attentats contre de hauts responsables judiciaires de l’Autorité palestinienne semblent destinés à décourager les enquêtes judiciaires et empêcher la mise en œuvre de mesures pour mettre fin à l’impunité.

Si à Gaza les groupes armés palestiniens continuent à s’en prendre aux soldats israéliens et aux colons, ils mettent parfois en danger la population palestinienne. Le 2 août 2005, deux tirs de mortier tirés par des groupes armés palestiniens contre des colonies israéliennes de la bande de Gaza ont abouti en zone palestinienne. L’un a atteint un hôpital à Khan Yunis et l’autre une maison palestinienne au nord de Beit Hanoun, tuant un enfant de six ans et blessant neuf personnes, dont cinq enfants.

Les tentatives des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne visant à empêcher les groupes armés palestiniens de se livrer à des violences ont souvent échoué et se sont fréquemment conclues par des échanges de coups de feu aux conséquences tragiques. Pendant la semaine du 14 au 20 juillet 2005, au moins cinq passants dont quatre enfants ont été tués et plusieurs autres personnes ont été blessées lors d’échanges de coups de feu entre les forces de sécurité et des membres du Hamas, ceci en plein jour dans des rues très fréquentées. Plus de 20 membres des forces de sécurité et plus d’une douzaine de membres du Hamas ont aussi été blessés au cours de ces accrochages. Certaines routes ont également été minées ou piégées pour empêcher les forces de sécurité d’y accéder, mettant gravement en danger la population avoisinante.
Les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne ont été notablement affaiblies à la fois par les attaques répétées de l’armée israélienne et par le climat d’impunité qui prévaut de plus en plus depuis cinq ans. Plus on va laisser la situation se détériorer, plus il va être difficile de revenir en arrière.

L’Autorité palestinienne doit dès à présent prendre des mesures pour changer l’état d’esprit des forces de sécurité et remplacer la culture de l’impunité par la culture de la responsabilité.

L’Autorité palestinienne ne doit épargner aucun effort pour mettre fin au désordre grandissant et mettre en place des mécanismes concrets pour assurer la protection de la population civile palestinienne, ainsi que celle des défenseurs des droits humains, des membres des organisations humanitaires et des journalistes.

Les groupes armés palestiniens doivent mettre fin aux violences contre les civils et s’abstenir d’engager des actions qui mettent en danger la population civile.

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