Azerbaïdjan. Amnesty International adopte des blogueurs incarcérés en tant que prisonniers d’opinion

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI-
12 novembre 2009

Deux blogueurs azerbaïdjanais incarcérés après avoir critiqué le gouvernement sur Internet ont été adoptés en tant que prisonniers d’opinion par Amnesty International.

Les jeunes militants Emin Abdoullaïev (Emin Milli de son nom d’internaute) et Adnan Hajizade ont été respectivement condamnés le 11 novembre 2009 à des peines de trente et vingt-quatre mois d’emprisonnement pour «  houliganisme » et « coups et blessures légers ».

Ils s’étaient servis de réseaux de socialisation sur Internet tels que Youtube, Facebook et Twitter, pour diffuser des informations sur la situation politique en Azerbaïdjan.

« Les chefs d’inculpation retenus contre les deux militants ont été forgés de toutes pièces afin de mettre un frein à leur droit à la liberté d’expression et de riposter à leurs critiques visant les autorités azerbaïdjanaises. Tous deux doivent être libérés immédiatement et sans condition », a estimé Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

Emin Abdoullaïev et Adnan Hajizade ont été arrêtés le 8 juillet 2009 après avoir été agressés par deux hommes dans un restaurant de la capitale, Bakou. Selon des témoins interrogés par Amnesty International, ils ont été assaillis alors qu’ils dînaient en compagnie d’autres militants, qui ont livré la version suivante des événements.

Deux hommes à la forte carrure se sont approchés de leur groupe et les ont insultés. Emin Abdoullaïev leur a répondu. L’un des deux hommes lui a asséné un coup de tête et Emin Abdoullaïev s’est effondré.

Adnan Hajizade s’est alors avancé pour le protéger et a été frappé par le même homme, qui l’a assommé.

Le deuxième homme s’est emparé de la table pour faire barrage aux autres convives tentant de porter secours à leurs amis, qui, à terre, recevaient force coups de pied et de poing. Tout cela a duré moins de deux minutes, avant que les employés du restaurant ne s’interposent.

Emin Abdoullaïev et Adnan Hajizade se sont ensuite rendus au poste de police pour porter plainte. Ils se sont pris en photo devant le bâtiment. Sur ces clichés, on distingue nettement leurs blessures.

Ils ont été renvoyés vers un autre poste de police, où ils ont rempli des formulaires en tant que victimes et demandé à être soignés. Cependant, les policiers les auraient interrogés en tant que suspects cinq heures durant, sans qu’ils puissent consulter un avocat de leur choix. Leurs deux agresseurs ont été amenés au poste pour un bref interrogatoire avant d’être relâchés.

Quant à Emin Abdoullaïev et Adnan Hajizade, ils ont été arrêtés, inculpés de « houliganisme » et placés en détention provisoire. Le 21 août, le chef d’inculpation de « coups et blessures légers » a été ajouté aux charges retenues contre les deux jeunes militants.

Ayant étudié cette affaire en détail, Amnesty International est préoccupée à la fois par l’absence d’enquête approfondie et impartiale sur l’agression du 8 juillet au restaurant et par le non-respect des normes d’équité lors du procès des deux militants.

Les policiers et les représentants du ministère public n’ont pas interrogé les témoins et ont omis de se procurer l’enregistrement vidéo d’une caméra de sécurité dirigée vers le restaurant.

Selon la défense, durant le procès, la cour a refusé de prendre en considération les photographies montrant les blessures infligées à Emin Abdoullaïev et Adnan Hajizade. Elle a également refusé, sans explication, de retenir les éléments de preuve filmés à l’aide de téléphones portables et d’une caméra de sécurité.

Lors de l’audience du 16 septembre 2009, six personnes venues soutenir les blogueurs auraient été placées en détention pour une courte durée, sous prétexte qu’elles arboraient des T-shirts où l’on pouvait lire « Moi aussi je suis un houligan ». Elles ont été retenues jusqu’à douze heures avant d’être relâchées. D’après les militants azerbaïdjanais, les autorités ont ainsi tenté de décourager toute marque de soutien visible aux deux jeunes hommes.

Emin Abdoullaïev est cofondateur d’un groupe de jeunes, Alumni Network. Quant à Adnan Hajizade, il est coordinateur d’un mouvement de jeunes appelé OL !, qui préconise la non-violence et la tolérance.

Emin Abdoullaïev a ouvertement critiqué les modifications de la Constitution azerbaïdjanaise proposées lors d’un référendum le 18 mars 2009.

Quelques jours avant leur agression, Adnan Hajizade a diffusé sur Internet une vidéo satirique sur des ânes achetés à l’Allemagne à l’aide de fonds publics, qui posait la question « Et qu’en est-il des droits humains ? »

Cette vidéo a été diffusée à la suite d’un article qui s’intéressait au fait que le gouvernement d’Azerbaïdjan aurait dépensé des centaines de milliers de dollars pour importer une dizaine d’ânes, dans le cadre d’une transaction sans doute destinée à dissimuler corruption ou détournement de fonds publics.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit