Communiqué de presse

Azerbaïdjan. Un candidat de l’opposition arrêté avant l’élection présidentielle

Les autorités azerbaïdjanaises doivent remettre en liberté deux responsables de l’opposition accusés d’avoir organisé des troubles dans la ville d’Ismailly. Cette accusation est dénuée de tout fondement, estime Amnesty International.
Les troubles ont commencé la veille de leur arrivée dans la ville et se sont poursuivis deux jours après leur départ. Les deux hommes s’étaient rendus sur place pour se rendre compte des événements.
À l’issue d’une audience à huis clos, un tribunal a ordonné le 5 février le placement en détention pour deux mois, dans l’attente de leur jugement, du candidat à l’élection présidentielle Ilgar Mammadov et du militant Tofig Yagublu, qui avaient été arrêtés le 4 février.
« Ce dossier a tout d’une affaire politique", a déclaré David Diaz-Jogeix, directeur adjoint du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.
« Ilgar Mammadov et Tofig Yagublu ont été placés en détention parce qu’on leur reproche d’être à l’origine de troubles qui ont éclaté de manière spontanée, avant même qu’ils n’aient mis les pieds dans la ville. L’accusation n’a jusqu’alors présenté aucun élément à l’appui de ces charges. »
Les deux responsables de l’opposition ont été inculpés d’organisation de « troubles de grande ampleur », de participation à ces troubles et de « résistance violente contre des policiers », des infractions qui, cumulées, pourraient entraîner une condamnation à 10 ans d’emprisonnement. Selon leurs avocats, aucun élément tendant à prouver que les deux hommes ont commis un délit, ou ont incité d’autres personnes à en commettre un, n’a été présenté.
Les émeutes ont éclaté le 23 janvier à la suite d’un incident impliquant le neveu du gouverneur local. Apparemment sous l’emprise de l’alcool et pris dans un accrochage de voitures, cet homme influent aurait agressé un habitant et injurié des badauds.
Des gens se sont alors rassemblés à l’endroit de l’accident, puis s’en sont pris à la police et à un établissement appartenant à la famille de l’homme impliqué. D’autres sont descendus dans la rue pour réclamer la démission du gouverneur de la ville.
Le lendemain dans la soirée, Ilgar Mammadov, dirigeant du mouvement d’opposition Alternative républicaine (REAL) et candidat déclaré à l’élection présidentielle d’octobre prochain, s’est rendu à Ismailly. Son avocat a expliqué à Amnesty International qu’il voulait prendre la mesure des tensions sous-jacentes à l’origine des troubles et observer la réaction des autorités locales.
Le journaliste Tofig Yagublu, vice-président du Parti de l’égalité (Musavat, une formation de l’opposition), s’est rendu de son côté à Ismailly, pour effectuer un reportage pour le compte de Yeni Musavat. Il avait déjà publié dans ce journal plusieurs articles dans lesquels il dénonçait les pratiques corrompues du gouvernement.
Ces deux militants n’ont jamais prôné la violence ni incité à son usage. Ils sont l’un et autre connus pour leur opposition au régime du président Ilham Aliyev.
Ilgar Mammadov critique depuis longtemps l’attitude répressive du gouvernement vis-à-vis de la liberté d’expression et de réunion pacifique. Il a déclaré qu’il avait reçu récemment des menaces de la part de parlementaires du parti au pouvoir, parce qu’il avait dénoncé une nouvelle loi prévoyant des amendes considérablement plus importantes pour sanctionner la participation à des manifestations non autorisées.
Les troubles ont duré plusieurs jours à Ismailly. Ils ont été brutalement réprimés par la police et ont donné lieu à plusieurs centaines d’arrestations. Un certain nombre de personnes se sont plaintes d’avoir été torturées ou maltraitées pendant leur détention. Ces allégations n’ont pour l’instant pas fait l’objet de quelconques investigations.
À la suite des manifestations d’Ismailly, des rassemblements pacifiques ont été organisés à Bakou le 26 janvier. La police est intervenue brutalement pour les disperser et a procédé à des dizaines d’arrestations. Jugées dans le cadre d’une procédure inéquitable, cinq personnes ont été condamnées à des peines d’emprisonnement.
« Après le rejet récent au Conseil de l’Europe d’une résolution sur les prisonniers politiques azerbaïdjanais, Amnesty International craint que les autorités du pays ne se sentent de plus en plus autorisées à réprimer la dissidence, dans cette période qui précède l’élection présidentielle », a conclu David Diaz-Jogeix.

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