Communiqué de presse

Azerbaïdjan. Le pays va accueillir les Jeux européens dans un contexte de répression généralisée

Menaces, violence physique et emprisonnement de détracteurs du gouvernement sont devenus la marque de fabrique du régime en Azerbaïdjan alors que ce pays se prépare à accueillir les premiers Jeux européens, a déclaré Amnesty International mercredi 4 mars, à 100 jours de la cérémonie d’ouverture.

Prêt pour un aperçu de ce qu’il se passe en Azerbaïdjan ?

Dans un nouveau rapport intitulé Guilty of Defending Rights : Azerbaijan’s human rights defenders and activists behind bars, l’organisation souligne l’augmentation des persécutions subies par les détracteurs du gouvernement, qui sont détenus sur la base d’accusations mensongères, battus, menacés et privés de soins médicaux urgents et d’avocats.

« Personne ne doit être dupé par le faste et le prestige du spectacle que donne l’Azerbaïdjan sur le plan international pour se forger une réputation irréprochable et attirer les capitaux étrangers. Ses autorités figurent parmi les plus répressives d’Europe et seraient certainement sur le podium si des médailles étaient attribuées pour le nombre de militants et de défenseurs des droits humains derrière les barreaux », a déclaré John Dalhuisen, directeur du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

Au moins 22 prisonniers d’opinion languissent actuellement en Azerbaïdjan dans l’attente d’un procès pour des faits inventés de toutes pièces, allant de la fraude et du détournement de fonds à l’usage de stupéfiants et la trahison.

En juin 2014, le président Aliyev a affirmé dans son discours à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) que la liberté d’expression, d’association et de réunion était garantie en Azerbaïdjan.

Pourtant, d’éminents défenseurs des droits humains ont décrit une toute autre réalité, en exposant en détails plus de 90 cas de harcèlement, d’intimidation, d’arrestations arbitraires et de poursuites motivées par des considérations politiques visant des défenseurs des droits humains, des journalistes et d’autres personnes osant critiquer le gouvernement azerbaïdjanais. Les autorités n’ont pas tardé à réagir : en quelques semaines, tous ceux qui avaient témoigné auprès de l’APCE ont été arrêtés, l’un après l’autre.

« Ces dernières arrestations ont paralysé la société civile et étouffé la liberté d’expression. Elles constituent un nouveau sommet dans le piètre bilan du pays pour les droits humains depuis l’indépendance », a déclaré John Dalhuisen.

Leyla Yunus, militante des droits humains âgée de 60 ans, qui figure parmi les plus véhémentes et les plus en vue des critiques du gouvernement, a été arrêtée en juillet 2014, quelques jours après avoir appelé au boycott des Jeux européens en raison du bilan déplorable du régime en matière de droits humains.

Elle a indiqué à son avocat qu’un gardien de prison l’avait traînée de sa cellule à une pièce vide où elle avait été jetée par terre et rouée de coups de pied. Une autre fois, un groupe d’hommes lui a fait des gestes sexuellement menaçants. Elle a passé les six derniers mois en prison en attendant son procès, dans des conditions qui ont aggravé ses problèmes de santé. Elle souffre de diabète et d’une hépatite C.

Leyla Yunus a été inculpée de trahison, d’entreprise illégale, d’évasion fiscale, d’abus de pouvoir, de fraude et de contrefaçon. Ces accusations, forgées de toutes pièces et motivées par des considérations politiques, ont fait suite à de nouveaux règlements que le gouvernement a introduits pour pouvoir fermer arbitrairement les ONG et emprisonner leurs dirigeants.

Répression des journalistes

Les autorités ont intensifié la répression visant les journalistes critiques à l’égard du gouvernement. Khadija Ismayilova, journaliste d’investigation primée pour son travail, a été arrêtée le 5 décembre 2014 sous l’inculpation farfelue d’incitation au suicide d’une ancienne collègue.

Elle avait publié une liste de prisonniers politiques et enquêtait sur des allégations faisant état de liens entre la famille du président Aliyev et un projet de construction lucratif à Bakou. Avant son arrestation, elle avait reçu des menaces anonymes de publication de photos intimes d’elle, probablement prises à son insu par des agents du gouvernement pendant qu’elle se trouvait chez elle, si elle n’abandonnait pas son travail.

Fausses accusations d’usage de stupéfiants et de houliganisme contre de jeunes militants

Les autorités s’en prennent également aux jeunes militants qui les critiquent avec véhémence, en les accusant d’infractions à la législation sur les stupéfiants ou de houliganisme. Les allégations utilisées pour obtenir leur arrestation sont extrêmement douteuses et les interrogatoires de la police axés sur leurs opinions politiques.

Faraj Karimov, un blogueur bien connu, a affirmé avoir été frappé par des policiers qui voulaient lui faire « avouer » des faits ayant trait à l’usage de stupéfiants. Ces agents l’auraient en outre menacé, s’il ne signait pas des « aveux », de « causer des problèmes à ses parents » en plaçant des armes à leur domicile.

La violence est aussi monnaie courante en détention. Orkhan Eyyubzade, militant en faveur de la démocratie âgé de 19 ans qui purgeait une peine de détention administrative de 20 jours pour avoir participé à un rassemblement pacifique « non autorisé », a été violemment attaqué par deux policiers. Il a indiqué à son avocat que ceux-ci l’avaient forcé à se coucher à plat ventre, lui avaient menotté les mains derrière le dos, arraché ses sous-vêtements, l’avaient roué de coups de poing et de pied et avaient menacé de le violer avec une bouteille. Aucune enquête efficace n’a été menée sur ces allégations. En revanche, il a été accusé d’avoir agressé des policiers et condamné à deux ans d’emprisonnement.

« Les yeux rivés sur les pétrodollars de l’Azerbaïdjan, la communauté internationale est remarquablement silencieuse au sujet des tactiques répressives de ce pays et de ses violations des droits humains. Cette attitude inconsidérée fait énormément de tort à ceux qui languissent actuellement derrière les barreaux », a déclaré John Dalhuisen.

Amnesty International appelle les autorités de l’Azerbaïdjan à libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers d’opinion et à enquêter de manière exhaustive et impartiale sur toutes les allégations faisant état de mauvais traitements commis par des agents de l’État et des acteurs non étatiques. L’organisation les engage également à cesser de menacer et de poursuivre en justice des personnes qui n’ont fait qu’exercer leur liberté d’expression et d’association.

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