Azerbaïdjan. Un reportage politiquement sensible entraîne des représailles physiques dans une enclave azérie

Déclaration publique

EUR 55/014/2007

Amnesty International est profondément inquiète des allégations concernant l’arrestation, le passage à tabac et l’emprisonnement récents du journaliste d’opposition Hakim Eldostu Mehdiyev par la police, ainsi que la persécution subie ensuite par ses proches dans la République autonome du Nakhitchevan, en Azerbaïdjan. Amnesty International demande une enquête immédiate, impartiale et complète sur ces violations présumées des droits humains ; la victime doit également recevoir des réparations adéquates.

Hakim Eldostu Mehdiyev travaille comme correspondant régional du journal d’opposition Yeni Müsavat (Nouvelle égalité) depuis 2006. En septembre, il a aidé un correspondant en visite du journal d’opposition Azadliq (Liberté) à préparer un reportage sur le dépeuplement de cette république, dû à l’émigration de travail. Ce rapport a été publié sur le site Web de Radio Liberty le 17 septembre, attirant l’attention sur des pénuries de gaz et d’électricité signalées dans la région. Hakim Eldostu Mehdiyev est également intervenu dans une interview radiodiffusée ce même jour sur Radio Azadlyq, le service azéri de Radio Liberty/Radio Free Europe en Azerbaïdjan.

Le 22 septembre, des policiers du Service national de sécurité auraient frappé et détenu Hakim Eldostu Mehdiyev dans le village de Jalilkand, puis l’auraient emmené vers une destination inconnue, où il aurait été de nouveau frappé et détenu pendant sept heures. Il lui aurait été ordonné de cesser ses reportages sur les problèmes socio-économiques au Nakhitchevan, de quitter l’Azerbaïdjan avec sa famille et de ne signaler cet événement à personne. Hakim Eldostu Mehdiyev est alors rentré chez lui, et a signalé ce qui s’était passé à la presse.

Le 23 septembre, Hakim Eldostu Mehdiyev a été convoqué à la police, où il a été inculpé pour avoir désobéi aux ordres de la police. Il a été immédiatement traduit en justice devant le tribunal régional de Sarur, sans accès à un avocat, et a été condamné à quinze jours de prison à Böyük Düz. Sa famille s’est vu refuser le droit de lui rendre visite en détention. Après cette arrestation, une boutique et un salon de thé tenus par des membres de la famille de Hakim Eldostu Mehdiyev ont été fermés et démolis, semble-t-il par des employés du ministère de la Sécurité nationale. Amnesty International a reçu des preuves photographiques de la destruction de ces deux établissements.

Le 27 septembre, des responsables de la prison ont déclaré à Hakim Eldostu Mehdiyev qu’il avait été « pardonné », le libérant sans plus d’explications. Hakim Eldostu Mehdiyev a affirmé avoir été frappé en détention. Il n’a cependant pas pu recevoir de soins médicaux à l’hôpital avant le 1er octobre, après s’être enregistré sous un faux nom. Les médecins ont diagnostiqué une côte fracturée et une autre fortement fêlée.

Hakim Eldostu Mehdiyev avait déjà été emprisonné entre 1995 et 2000, pour avoir semble-t-il soutenu l’ancien président azéri, Abulfez Elçibey, déposé par un coup d’État en juin 1993.

La République autonome du Nakhitchevan est une enclave de l’Azerbaïdjan, frontalière de l’Iran à l’ouest et séparée du territoire de l’Azerbaïdjan par l’Arménie à l’est. Le Nakhitchevan fait l’objet d’un blocus de l’Arménie (en réaction au blocus turc et azéri de l’Arménie) et n’a aucun moyen de liaison aérien avec l’Azerbaïdjan depuis seize ans. Des difficultés socio-économiques y sont régulièrement signalées, ainsi qu’un taux d’émigration de travail supérieur à la moyenne en direction de la Turquie, avec qui le Nakhitchevan partage une très courte frontière à l’ouest.

Ces deux dernières années, Amnesty International a signalé qu’un nombre croissant de journalistes travaillant sur la corruption et les malversations de responsables avaient subi des agressions physiques ou reçu des peines de prison en vertu des textes de loi azéris sur la diffamation. Notre organisation demande au procureur général de l’Azerbaïdjan d’ouvrir une enquête immédiate, impartiale et approfondie sur l’arrestation, la détention et le passage à tabac présumés de Hakim Eldostu Mehdiyev. Amnesty International demande également au président du Conseil suprême de la République autonome du Nakhitchevan de faire en sorte que le droit à la liberté d’expression soit pleinement respecté dans cette région.

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