Bahreïn. Les forces de sécurité doivent rendre des comptes pour les homicides perpétrés lors des manifestations


COMMUNIQUÉ DE PRESSE

17 mars 2011

Les autorités bahreïnites doivent traduire en justice les policiers et autres fonctionnaires s’étant rendus coupables d’un recours excessif à la force et d’agressions envers des manifestants lors d’opérations de répression meurtrières visant à mettre fin à des actions de protestation en février, qui ont fait sept morts et des centaines de blessés, explique Amnesty International dans un nouveau rapport diffusé jeudi 17 mars.

Ce rapport, intitulé Maculés de sang mais toujours résolus. Les manifestants bahreïnites victimes de violences injustifiées de la part de l’État, décrit la manière dont les forces de sécurité ont, sans sommation, utilisé des balles réelles et une force extrême contre les manifestants, puis gêné et agressé les équipes médicales essayant d’aider les blessés.


« Les agissements des forces de sécurité doivent donner lieu à des enquêtes exhaustives et indépendantes, a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. Ceux qui ont ordonné et déchaîné cette force meurtrière contre des manifestants pacifiques doivent être identifiés et tenus de rendre des comptes. »

« Les homicides illégaux, les agressions et les autres violences dont des manifestants et des professionnels de la santé ont été victimes ne doivent pas rester impunis. »

Le rapport, qui s’appuie sur des témoignages de première main recueillis par une équipe d’établissement des faits envoyée par Amnesty International à Bahreïn, paraît alors que la situation reste tendue ; des manifestants continuent à camper dans le centre de Manama et des affrontements opposeraient sporadiquement des membres des communautés musulmanes sunnite et chiite de cet État du Golfe.


Hani Mowafi
, médecin américain qui faisait partie de l’équipe d’Amnesty International, a conclu, au vu des nombreuses lésions graves et mortelles qu’il a constatées, que les forces de sécurité avaient utilisé des munitions réelles à faible distance, en cherchant semble-t-il à atteindre les manifestants à la tête, à la poitrine et au ventre. Elles ont également tiré des balles de moyen à gros calibre à l’aide de fusils puissants le 18 février.

Les pires violences ont eu lieu tôt le matin du 17 février, lorsque cinq personnes ont été tuées. Des témoins ont expliqué à Amnesty International que des tanks bloquaient l’accès au rond-point de la Perle, tandis que des policiers utilisaient des fusils, ainsi que du gaz lacrymogène, des matraques et des balles en caoutchouc pour disperser les manifestants, dont beaucoup campaient sur place.

Un témoin a dit à Amnesty International que la police antiémeute faisait feu depuis plusieurs endroits, notamment un pont surplombant le rond-point, tandis que les manifestants, affolés, couraient se mettre à l’abri.

Parmi les blessés figuraient des personnes clairement identifiables comme étant des professionnels de la santé, pris pour cible par des policiers alors qu’ils essayaient d’aider des manifestants blessés sur le rond-point ou à proximité.

Le 3 mars, le ministre bahreïnite du Développement social, en visite à Londres, a déclaré à Amnesty International que son gouvernement menait une enquête sur ces homicides, dont les conclusions seront directement communiquées au roi, et que deux membres des forces de sécurité avaient été placés en détention.

Amnesty International a engagé le gouvernement bahreïnite à faire en sorte que le recours excessif à la force observé en février ne se répète pas.

« Il faut que les autorités contrôlent soigneusement les forces de sécurité, et protègent et fassent respecter les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion, et notamment le droit de manifester pacifiquement », a ajouté Malcolm Smart.

L’organisation a également demandé que les victimes de violences perpétrées par les forces de sécurité reçoivent réparation.

Amnesty International a identifié certaines des munitions retrouvées à la suite du raid mené au rond-point de la Perle le 17 février.

Elles incluent des cartouches de gaz lacrymogène et des cartouches multi-coups de balles en caoutchouc de 37 mm fabriquées aux États-Unis, ainsi que des grenades de fabrication française libérant 18 fragments de caoutchouc lorsqu’elles explosent et émettant un bruit assourdissant.

Amnesty International a demandé aux gouvernements fournissant des armes à Bahreïn de suspendre immédiatement les transferts d’armes, de munitions et d’équipements connexes susceptibles d’être utilisés pour commettre de nouvelles violations des droits humains, et de passer en revue toutes les livraisons d’armes et formations prodiguées dans ce domaine aux forces militaires, de sécurité et de police de Bahreïn.

À la suite du recours par les forces de sécurité bahreïnites à une force injustifiée contre les manifestants, le gouvernement britannique a révoqué plusieurs licences d’exportation d’armes vers Bahreïn, et les autorités françaises ont suspendu l’exportation d’équipements de sécurité en direction de ce pays.

Complément d’information

Amnesty International a effectué une mission d’établissement des faits à Bahreïn entre les 20 et 26 février. La délégation était composée de deux chercheurs d’Amnesty International et d’un médecin américain spécialisé dans les soins d’urgence et la santé publique. Les délégués se sont entretenus avec des témoins des événements violents de la mi-février, des victimes et des parents de victimes, des membres du personnel hospitalier et des employés de la morgue. Ils ont également rencontré des responsables gouvernementaux et des personnes militant en faveur des droits humains.

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