Une série d’attaques violentes a récemment visé des journalistes et travailleurs des médias, et un blogueur a même été tué : cela montre qu’il est urgent de mieux protéger les personnes qui commentent les audiences du tribunal bangladais pour les crimes de guerre, a déclaré Amnesty International.
Lors de la dernière agression, survenue mercredi 20 février, un journaliste d’un site web a été grièvement blessé.
Les personnes ciblées comprennent des journalistes et des blogueurs qui demandent au Tribunal pour les crimes de droit international (ICT) de prononcer des condamnations à mort contre les accusés qui auraient commis des atteintes massives aux droits humains pendant la guerre d’indépendance du Bangladesh, en 1971.
« Les autorités doivent faire tout leur possible pour que ceux qui risquent de subir des représailles pour avoir suivi les travaux de l’ICT ou être entrés en rapport avec ce tribunal reçoivent la protection nécessaire. Tous doivent pouvoir exercer sans crainte leur droit à la liberté d’expression », a affirmé Abbas Faiz, chercheur d’Amnesty International sur le Bangladesh.
Le vendredi 15 février, le blogueur Ahmed Rajib Haidar a été roué de coups et poignardé à mort à son domicile de Dacca, la capitale.
Haidar était un blogueur connu et certains de ses billets étaient très critiques à l’égard du parti politique d’opposition Jamaat-e-Islami, dont un dirigeant historique a été condamné, tandis que sept autres ont été déférés à l’ICT.
Dans la nuit du mardi 19 au mercredi 20 février, Sumon Mahbub, collaborateur du journal en ligne bdnews24.com, s’est fait renverser par une voiture à Dacca, de façon manifestement délibérée, et a été grièvement blessé.
Le siège de bdnews24.com avait commencé à recevoir des menaces au début de cette semaine après avoir publié un sondage en ligne qui révélait un soutien important à l’interdiction du Jamaat-e-Islami.
Aucun des deux attentats n’a été revendiqué, et personne n’a été arrêté dans ce contexte. Le Jamaat-e-Islami a condamné le meurtre de Haidar le 17 février et a affirmé ne pas y être mêlé.
« Nous exhortons les autorités à mener à bien une enquête approfondie, indépendante et impartiale sur ces attentats, sans quoi les violences se poursuivront en toute impunité », a déclaré Abbas Faiz.
Les journalistes et les blogueurs qui critiquent l’ICT sont tout autant en danger.
Amnesty International a reçu des informations inquiétantes selon lesquelles des personnes qui critiquent la procédure suivie par le tribunal ont fait l’objet de menaces et sont peut-être exposées à des représailles violentes.
Contexte
L’ICT a été créé en 2010 pour juger les personnes soupçonnées de crimes relevant du droit international (génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité) commis au cours de la guerre d’indépendance du pays, en 1971.
Cette juridiction a prononcé ses premiers jugements en janvier 2013, condamnant à mort un des accusés, Abul Kalam Azad, pour crimes contre l’humanité. Le 5 février, Abdul Quader Molla, membre de premier plan du Jamaat-e-Islami, a été condamné à l’emprisonnement à perpétuité pour crimes contre l’humanité.
Le quartier de Shahbag, à Dacca, a été depuis le 5 février le théâtre de vastes manifestations exigeant la condamnation à mort de Molla. Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances.
Quant au Jamaat-e-Islami, il a organisé des rassemblements dans tout le pays et lancé des appels à des journées de grève, pour demander la libération de ses dirigeants traduits devant l’ICT.