Bangladesh, un enseignant arrêté doit être immédiatement relâché

arrestation professeur

Les autorités bangladaises doivent libérer immédiatement et sans condition Hriday Chandra Mondal, un enseignant arrêté sur la base d’accusations d’« atteinte au sentiment religieux » après qu’il a abordé en classe la distinction entre religion et science, a déclaré Amnesty International.

Lors de cette discussion, qui s’est tenue dans un établissement scolaire, un lieu où les enseignant·e·s doivent être libres d’évoquer n’importe quelles idées ou informations factuelles sans crainte de représailles, l’enseignant a déclaré que « la religion relève de la foi » tandis que « la science examine les données », selon une vidéo filmée par une personne se trouvant dans la classe et partagée sur les réseaux sociaux. Dans l’enregistrement audio écouté [1] par Amnesty International, l’enseignant dit : « Il n’y a pas de preuves matérielles dans la religion. En fin de compte, la religion affirme que dieu va s’occuper de tout. La religion propose des paroles apprises par cœur, tandis que la science nous montre des données factuelles. »

Le 22 mars, deux jours après l’enregistrement, le principal a déclaré aux médias que des élèves et des personnes externes ont manifesté devant l’établissement afin de réclamer que Hriday Chandra Mondal soit sanctionné. Plus tard ce même jour, une personne occupant un poste administratif dans ce lycée a porté plainte auprès de la police contre l’enseignant, qui a plus tard été arrêté. Il se trouve depuis lors en détention provisoire, après qu’on lui a refusé une libération sous caution à deux reprises. La prochaine audience relative à sa libération sous caution est fixée au 10 avril 2022 au Tribunal des juges de district et d’instance.

« Il est choquant qu’un enseignant se retrouve derrière les barreaux simplement pour avoir exprimé son opinion alors qu’il faisait cours. Les enseignant·e·s doivent avoir la possibilité d’aborder des idées et des opinions de toutes sortes sans craindre de représailles. Hriday Chandra Mondal est uniquement détenu pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression et doit être libéré immédiatement et sans condition », a déclaré Smriti Singh, directrice régionale adjointe pour l’Asie du Sud à Amnesty International.

« L’incarcération de Hriday Chandra Mondal est représentative d’une tendance inquiétante au Bangladesh, où l’espace dédié à la libre expression se réduit rapidement. Arrêter un enseignant pour avoir simplement parlé d’idées diverses en classe crée un précédent dangereux, selon lequel le fait même d’encourager les élèves à exercer leur esprit critique peut désormais se solder par un placement en détention. »

« L’incarcération de Hriday Chandra Mondal est représentative d’une tendance inquiétante au Bangladesh, où l’espace dédié à la libre expression se réduit »

Amnesty International a constaté dans le cadre de ses recherches qu’un sentiment de peur croissant anime la population au Bangladesh en raison des détentions arbitraires et de la criminalisation de plus en plus fréquente du droit à la liberté d’expression. Le cas de Hriday Chandra Mandal n’a fait qu’exacerber la situation, et représente une menace directe pour l’un des derniers bastions de la liberté d’expression dans le pays.

Plusieurs organisations de la société civile et du monde universitaire, notamment l’Association bangladaise d’astronomie et le Centre pour les femmes journalistes, ont condamné cette arrestation et fait état de préoccupations quant à la capacité des universitaires à enseigner. De même, des défenseur·e·s des droits humains, des avocat·e·s et des enseignant·e·s du pays tout entier ont soulevé des questions sur le moment choisi pour cette arrestation, qui a selon eux été motivé par des considérations politiques.

« L’incarcération de Hriday Chandra Mondal est une démonstration honteuse de l’érosion de la situation des droits humains au Bangladesh. Les autorités doivent prendre des mesures en urgence afin d’améliorer les conditions permettant aux personnes de s’exprimer librement et de manière sûre, et de garantir que les enseignant·e·s puissent s’exprimer librement en classe sans crainte de représailles », a déclaré Smriti Singh.

Complément d’information

En vertu du droit international relatif aux droits humains, l’exercice du droit à la liberté d’expression ne peut faire l’objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont manifestement nécessaires et proportionnées à la réalisation de l’objectif consistant à protéger des intérêts publics déterminés (la sécurité nationale, l’ordre public, ou la santé ou la moralité publiques) ou les droits et la réputation d’autrui. La protection de concepts abstraits, de croyances religieuses ou autres, ou des sensibilités religieuses de leurs adeptes, n’est pas une raison acceptable pour restreindre la liberté d’expression.

Le rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté de religion ou de conviction a observé [2] que « le respect de la sensibilité des communautés de religions et de convictions différentes devrait être au cœur d’une culture de la communication [...] Toutefois, l’affront ressenti de manière subjective ne devrait jamais guider l’action législative, les décisions de justice et autres actions de l’État ».

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