Communiqué de presse

Bangladesh. La condamnation à mort de 152 mutins est une nouvelle injustice

La décision d’un tribunal bangladais, mardi 5 novembre 2013, de condamner à mort 152 personnes impliquées dans une mutinerie en 2009 est un déni de justice, a déclaré Amnesty International.

« Justice n’a pas été rendue avec cette décision qui, si elle est appliquée, n’aboutira qu’à 152 nouvelles violations des droits humains », a déclaré Polly Truscott, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique à Amnesty International.

Les condamnés faisaient partie des centaines de soldats des Bangladesh Rifles reconnus coupables d’homicides illégaux, de prise d’otages et d’autres violations des droits humains commis pendant la mutinerie de février 2009. Amnesty International avait condamné ces violences et demandé que les responsables soient jugés dans le cadre de procès équitables (voir le rapport Bangladesh : Looking for justice : Mutineers on trial in Bangladesh ci-dessous).

« Incontestablement, la mutinerie de 2009 s’est traduite par une série de violences qui a fait des dizaines de mort et traumatisé la population. Il est compréhensible que les autorités bangladaises veuillent tirer un trait sur cet épisode, mais le recours à la peine de mort ne fera qu’accroître les souffrances », a souligné Polly Truscott.

« Avec ces condamnations, le Bangladesh a laissé passer une occasion de rétablir la confiance en l’état de droit en veillant à ce que les tribunaux civils rendent justice. Ces condamnations semblent au contraire vouloir satisfaire un désir cruel de vengeance. La peine capitale est le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit et son effet dissuasif n’est pas prouvé. »

La mutinerie de grande ampleur avait éclaté au siège des Bangladesh Rifles, à Dhaka, la capitale, le 25 février 2009, tout juste deux mois après l’entrée en fonction du gouvernement nouvellement élu.

Elle s’était rapidement propagée aux casernes des Bangladesh Rifles de tout le pays. Les mutins avaient tué au moins 74 personnes, dont six civils et 57 officiers de l’armée, un soldat et neuf jawans (jeunes recrues du groupe). Il avait fallu 33 heures au gouvernement pour négocier l’arrêt de cette mutinerie.

Des milliers de membres des Bangladesh Rifles ont été arrêtés pour leur rôle présumé dans cette mutinerie. En 2009, Amnesty International avait recueilli des témoignages de membres de leurs familles, ainsi que de représentants du gouvernement.

Des dizaines – peut-être même des centaines – de ces prisonniers ont été torturés, et certains se sont vu refuser le droit de se faire assister par un avocat pendant des semaines, voire des mois. Amnesty International a rendu compte de certaines des méthodes de torture décrites par des suspects emprisonnés, notamment la privation de sommeil pendant plusieurs jours d’affilée, les passages à tabac, l’utilisation de tenailles pour broyer les testicules, l’insertion d’aiguilles sous les ongles et les décharges électriques.

Ce recours généralisé à la torture pourrait avoir provoqué la mort en détention de dizaines de membres des Bangladesh Rifles.

Après la mutinerie, les Bangladesh Rifles ont été rebaptisés Gardes-frontières du Bangladesh.

« Le Bangladesh a bien évidemment le devoir de veiller à ce que les nombreuses victimes de ces actes atroces et leurs familles reçoivent justice, mais la peine de mort est le châtiment le plus cruel et le plus inhumain qui soit. Le Bangladesh doit instaurer un moratoire sur les exécutions, à titre de premier pas sur la voie de l’abolition de la peine capitale », a conclu Polly Truscott.

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