Bélarus, Des étudiants emprisonnés pour avoir manifesté pacifiquement

Bélarus marche d'opposants

Au Bélarus, des étudiant·e·s sont arrêtés pour des infractions pénales, poursuivis en justice en raison de leurs activités militantes pacifiques et renvoyés d’établissements d’enseignement en représailles pour leur participation au mouvement de protestation qui se poursuit contre les résultats largement contestés de l’élection présidentielle d’août 2020.

Dans une nouvelle publication, l’organisation décrit les violentes représailles dont font l’objet des étudiant·e·s et révèle les effets néfastes sur la vie universitaire au Bélarus de la répression exercée par l’État.

« Les étudiant·e·s et les enseignant·e·s qui ont protesté à travers le Bélarus ont entamé l’année universitaire dans un pays radicalement transformé par les événements survenus pendant l’été. Il était évident dès le début que cette dissidence ne serait tolérée ni par les autorités ni par la direction de nombreuses universités. Le 27 octobre, Alexandre Loukachenko a demandé aux universités de les renvoyer. Nous avons alors été consternés de voir que des universités ont obéi et renvoyé des dizaines d’étudiant·e·s », a déclaré Aisha Jung, responsable du travail de campagne sur le Bélarus à Amnesty International.

À la date du 17 mai 2021, selon le syndicat étudiant indépendant Association des étudiant·e·s du Bélarus, au moins 466 étudiant·e·s – dont presque un tiers sont des femmes – avaient été arrêtés. La plupart de ces personnes ont été placées en détention administrative ou condamnées à une amende de 120 euros en moyenne, cette somme représentant un quart du salaire mensuel moyen au Bélarus. Au moins 153 étudiant·e·s ont été renvoyés de façon arbitraire d’universités et un grand nombre d’entre eux ont fui dans des pays voisins, craignant pour leur sécurité. Quarante-deux étudiant·e·s ont été inculpés dans des affaires pénales et six de ces personnes ont été condamnées à des peines d’emprisonnement.

L’une des attaques les plus flagrantes menées contre des organisations étudiantes a eu lieu quand les autorités ont ouvert une enquête pénale contre 11 militant·e·s étudiant·e·s et un enseignant, qui pour beaucoup ont été arrêtés à leur domicile le 12 novembre 2020, ce jour étant depuis appelé le « Jeudi noir ». Leur procès s’est ouvert le 14 mai et il devrait durer jusqu’à la mi-juin. Ces personnes sont toutes inculpées au titre de l’article 342 du Code pénal du Bélarus (« organisation et préparation d’agissements constituant des violations flagrantes de l’ordre public »), qui prévoit une peine de deux ans d’emprisonnement.

« Les autorités du Bélarus doivent [...] respecter les droits dont disposent les étudiant·e·s d’exprimer pacifiquement leurs opinions, ensemble ou en association, et de manifester pacifiquement sans avoir à craindre un harcèlement ou des représailles »

Anastasia Bulybenka, 19 ans, fait partie des accusés. Le jour où elle a été arrêtée, Anastasia dormait dans son lit dans l’appartement qu’elle partage avec sa mère, quand elle a entendu une voix lui ordonner de se lever. En ouvrant les yeux, elle a vu six inconnus qui se tenaient autour de son lit ; ces hommes étaient entrés de force dans l’appartement. Anastasia est maintenue en détention provisoire depuis son arrestation, qui a eu lieu il y a plus de six mois, et pendant tout ce temps, sa mère, Aksana, n’a été autorisée à la voir qu’une fois, pendant 45 minutes.

« Pour moi, le monde s’était arrêté, et je ne faisais que la regarder [...] C’est une adulte maintenant, son visage ne porte plus aucune trace de l’enfance. Elle me l’a écrit par la suite dans une lettre où elle disait : “Je suis partie de chez nous le 12 novembre en étant une enfant, et j’y retournerai en étant une adulte”, a dit Aksana à Amnesty International, se remémorant sa visite à sa fille.

Le fait que les autorités du Bélarus ou des établissements d’enseignement s’en prennent à des étudiant·e·s et des enseignant·e·s politiquement actifs n’est pas nouveau. Cependant, l’ampleur du harcèlement, de la persécution et de la violence exercés contre eux, et contre toutes les personnes qui actuellement critiquent le gouvernement dans le contexte de l’élection présidentielle, est sans précédent dans l’histoire du Bélarus de l’après-indépendance.

Amnesty International demande aux autorités du Bélarus de mettre immédiatement fin à la répression exercée contre les étudiant·e·s, les universitaires et toutes les personnes qui manifestent pacifiquement.

« Les autorités du Bélarus doivent respecter leurs obligations au titre du droit international relatif aux droits humains et respecter les droits dont disposent les étudiant·e·s d’exprimer pacifiquement leurs opinions, ensemble ou en association, et de manifester pacifiquement sans avoir à craindre un harcèlement ou des représailles », a déclaré Aisha Jung.

« Nous appelons les syndicats étudiants et les dirigeant·e·s étudiants à travers le monde à exprimer leur solidarité avec leurs pairs au Bélarus et à demander aux autorités de leur pays de prendre immédiatement des mesures pour faire pression sur le gouvernement d’Alexandre Loukachenko afin qu’il cesse d’étouffer la vie publique, la vie universitaire et la jeunesse la plus brillante du pays. »

Complément d’information

Ce document de campagne est le sixième d’une série qui s’inscrit dans le cadre de la campagne #StandWithBelarus, menée par Amnesty International pour attirer l’attention sur le fait que le gouvernement répressif d’Alexandre Loukachenko s’en prend à plusieurs secteurs de la société du Bélarus, Alexandre Loukachenko affirmant avoir remporté l’élection présidentielle du 9 août 2020 malgré l’accumulation de preuves d’une fraude électorale massive. La répression des droits humains observée au Bélarus à la suite de cette élection va bien au-delà du ciblage « classique » de l’opposition politique, des médias indépendants et de la société civile.

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