Bélarus. La mort du journaliste Aleh Byabenine doit faire l’objet d’une enquête effective et impartiale dans les meilleurs délais

Déclaration publique

Index AI : EUR 49/007/2010 - ÉFAI

15 septembre 2010

Amnesty International a écrit ce mercredi 15 septembre au procureur général du Bélarus pour lui demander l’ouverture, dans les meilleurs délais, d’une enquête effective et impartiale sur la mort d’Aleh Byabenine, fondateur de Charte 97, site non officiel d’actualités sur le web.

Le corps d’Aleh Byabenine a été retrouvé le 3 septembre à 17h30 dans sa datcha près de Minsk par des membres de sa famille et des amis proches qui s’étaient inquiétés d’être sans nouvelles de lui depuis la nuit précédente. Il a été retrouvé une corde autour du cou, pendu à la rampe de sa maison. Le 4 septembre, les premiers résultats de l’examen médico-légal concluant à un suicide comme cause la plus probable de la mort ont été annoncés. Les conclusions définitives seront communiquées d’ici la fin septembre.

Des collègues et amis proches d’Aleh Byabenine doutent de cette version et ont déclaré à Amnesty International qu’Aleh Byabenine, qui menait une vie de couple heureuse et était père de deux enfants, venait juste de rentrer de vacances avec sa famille et n’avait aucune raison de se supprimer. Peu avant sa mort, il avait rejoint l’équipe de campagne d’Andreï Sannikov, candidat à la présidence pour le mouvement civique « Bélarus européen ». Le 2 septembre, il aurait envoyé des textos à des amis pour leur donner rendez-vous dans un cinéma ce soir-là, mais il n’est jamais venu.

Les témoins oculaires qui ont découvert le corps ont relevé un certain nombre d’anomalies ; ils ont constaté des traces d’hématomes sur le corps et de la terre sur les mains d’Aleh Byabenine, ce qui laisse à penser qu’il s’est peut-être débattu ; il y avait deux bouteilles vides de Balsam du Bélarus, boisson à forte teneur en alcool, dans la salle de séjour de la datcha, alors qu’Aleh Byabenine ne buvait jamais, semble-t-il, de Balsam du Bélarus ; il portait une veste et n’a laissé aucun mot expliquant son suicide.

Plusieurs collègues et hommes politiques de l’opposition ont exprimé la crainte qu’Aleh Byabenine ait pu être pris pour cible par les autorités du fait de sa profession, en tant que journaliste indépendant et de son nouveau rôle au sein de l’équipe électorale d’Andreï Sannikov. Aleh Byabenine avait déjà été agressé auparavant : en avril 1997, il avait été enlevé, emmené dans les bois et soumis à un simulacre d’exécution selon les informations dont nous disposons et en septembre 1999, il avait été sévèrement battu par des militants d’extrême-droite alors qu’il se portait au secours d’Andreï Sannikov, également agressé. En mars de cette année, les bureaux de Charte 97 ont été perquisitionnés par une dizaine de policiers, officiellement dans le cadre d’une enquête criminelle sur la corruption au sein des forces de police. Natallya Radzina, journaliste à Charte 97 avait été frappée au visage lorsque les policiers avaient fait irruption dans les locaux de Charte 97. La police avait également perquisitionné les domiciles de plusieurs journalistes travaillant pour le site. Natallya Radzina a par ailleurs signalé qu’elle-même et plusieurs membres de Charte 97 avaient reçu des menaces anonymes depuis la mort d’Aleh Byabenine.

Amnesty International appelle les autorités à veiller à la sécurité des journalistes et hommes politiques de l’opposition à l’approche de l’élection présidentielle du 19 décembre et à dissiper les doutes sur les causes de la mort d’Aleh Byabenine en diligentant dans les meilleurs délais une enquête effective et impartiale. L’organisation demande en outre aux autorités de tenir informée des progrès de l’enquête la famille d’Aleh Byabenine et, dans la mesure du possible, de rendre publiques les conclusions de cette enquête ; de faciliter la participation d’experts médico-légaux internationaux à l’enquête et, si la famille donne son consentement, de donner une réponse favorable à toute demande de pratique d’une seconde autopsie.

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