Bélarus/UE : Forum des droits humains

L’Union européenne (UE) ne peut fermer les yeux sur la récente campagne de répression des libertés et des droits fondamentaux et sur les violations massives auxquelles se sont livrées les forces de sécurité du Bélarus, a déclaré Amnesty International en amont de la rencontre qui doit se tenir le 20 juillet à Bruxelles dans le cadre du dialogue entre l’UE et le Bélarus sur les droits humains.

Face à la vague d’arrestations et de manœuvres d’intimidation qui frappe lesmanifestants, les militants d’opposition et les journalistes du Bélarus depuis la tenue, le 25 mars dernier, d’un rassemblement pacifique, l’UE doit profiter des discussions qui s’annoncent pour faire pression sur le gouvernement du Président Loukachenko, en l’invitant à enfin faire preuve de respect pour les droits humains et à traduire en justice les auteurs d’atteintes à ces droits.

« En s’en prenant brutalement, depuis le début de l’année, à des centaines de manifestants et de critiques pacifiques du régime, les autorités bélarussiennes ont réduit à néant les progrès, certes superficiels, qu’elles avaient fait récemment dans le domaine des droits humains  », a déclaré John Dalhuisen, directeur du Bureau régional Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

« L’Union européenne doit exiger que les autorités bélarussiennes mettent un terme à ces violations et insister pour que, au minimum, une enquête sérieuse soit immédiatement menée et que les auteurs de violences sur des manifestants soient traduits en justice. »

La répression menée depuis quelque temps est d’une ampleur et d’une gravité inégalées depuis 2009. Plus de 900 personnes ont été arrêtées entre mars et mai, à la suite de manifestations contre l’imposition d’une taxe sur les chômeurs, au titre d’un décret « sur la prévention de la dépendance sociale » pris par le Président Alexandre Loukachenko.

Des manifestants pacifiques ont été roués de coups de poing et de matraque, traînés par leurs vêtements et frappés à coups de pied pendant leur interpellation. Une fois dans les commissariats, les personnes arrêtées ont été contraintes de rester debout, tournées vers le mur, pendant cinq heures dans certains cas. Elles ont été obligées de donner leurs empreintes digitales et de se laisser photographier.

Les pouvoirs publics s’en sont pris tout particulièrement aux défenseurs des droits humains et aux journalistes. Plus d’une centaine de professionnels des médias ont été arrêtés en mars et en avril. Le 25 mars, la police est intervenue dans les locaux de l’organisation de défense des droits humains Viasna, à Minsk, arrêtant 57 militants des droits humains qui avaient prévu d’assister en tant qu’observateurs au rassemblement organisé un peu plus tard ce jour-là.

Les militants d’opposition ont également été particulièrement visés par les services chargés de l’application des lois. C’est par exemple le cas d’Ales Lahvinets, 45 ans, et de son fils Anton, 22 ans, arrêtés en plein jour par deux hommes en civil, le 23 mars, alors qu’ils marchaient dans la rue, non loin de chez eux, à Minsk. Sans décliner leur identité et sans fournir la moindre explication, les deux hommes ont contraint Ales et son fils à monter dans leur fourgonnette et se sont immédiatement mis à frapper Ales, tandis que son fils tentait de s’interposer.

« Il [le policier] m’a traité de salaud de vendu et de traître. J’ai exigé qu’on m’explique ce qu’il se passait, mais il m’a donné deux coups de poing dans la figure. J’étais allongé sur le sol de la fourgonnette et l’autre était assis sur moi  », a expliqué Ales Lahvinets à Amnesty International.

Ales Lahvinets a finalement été condamné par un tribunal de Minsk à 10 jours de détention administrative, pour avoir, selon l’accusation, juré en public. Le juge a ignoré ses déclarations concernant les coups et les autres mauvais traitements dont il affirmait avoir été victime, malgré le témoignage de son fils et les marques encore visibles sur son visage.

« La facilité et la brutalité avec lesquelles cette répression s’est abattue viennent malheureusement rappeler à la communauté internationale que le pouvoir en place à Minsk ne respecte pas plus les droits humains aujourd’hui qu’il y a deux ans », a déploré John Dalhuisen.

Le Bélarus reste par ailleurs le seul pays d’Europe et d’Asie centrale à encore appliquer la peine capitale.

L’UE a levé en février 2016, l’essentiel des sanctions qu’elle avait prises à l’égard du Bélarus, à un moment où la répression implacable des libertés et des droits fondamentaux semblait marquer le pas. La levée de ces sanctions intervenait en outre après des déclarations de plus en plus encourageantes de la part des autorités bélarussiennes, laissant espérer une possible abolition de la peine de mort. Or, après une pause d’un peu plus d’un an, les exécutions ont repris dès avril 2016 et les quatre condamnés à mort qui se trouvaient encore dans les prisons du pays ont tous été exécutés en l’espace d’un mois, en octobre suivant. De nouvelles condamnations à mort et de nouvelles exécutions sont intervenues depuis. Deux condamnés se trouvent actuellement dans le couloir de la mort à Minsk. Leur exécution est imminente.

« En assouplissant les sanctions, en 2016, les dirigeants de l’UE espéraient manifestement encourager une poursuite de l’adoucissement de la politique répressive du Bélarus. Ils se sont lourdement trompés et il est désormais temps d’exiger une réponse », a déclaré John Dalhuisen.

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