Communiqué de presse

Brésil. Pour la première fois des poursuites sont engagées contre un officier pour des crimes commis sous le régime militaire

La décision d’inculper un colonel à la retraite de cinq disparitions forcées commises sous la dictature militaire au Brésil constitue la première brèche sérieuse dans des décennies d’impunité, a déclaré Amnesty International.
Le parquet a annoncé le 13 mars que le colonel à la retraite Sebastião Curió Rodrigues de Moura allait être inculpé d’enlèvement dans l’affaire de la disparition de cinq membres de la guérilla dans l’État du Pará, en 1974.
Les procureurs ont déclaré que les enlèvements avaient eu lieu lors de l’opération Marajoara. Durant cette opération dirigée par Sebastião Curió, des soldats auraient enlevé, brutalisé et exécuté des combattants d’extrême gauche, en violation flagrante du droit international relatif aux droits humains.

C’est la première fois que des poursuites pénales sont entamées contre un membre de l’armée pour des violations des droits humains commises au Brésil sous le régime militaire de 1964-1985. Des milliers d’hommes et de femmes ont été torturés durant cette période, et plus de 475 personnes auraient disparu.

« La décision des procureurs brésiliens d’ouvrir des poursuites judiciaires contre le colonel Curió envoie un message clair, a expliqué le directeur d’Amnesty International Brésil », Atila Roque. Ll’impunité est terminée pour les personnes soupçonnées de crimes contre l’humanité.

« L’annonce de cette inculpation, qui vient après la proposition du gouvernement fédéral de créer une commission de la vérité, marque l’occasion pour la justice nationale de ramener le Brésil dans le groupe des pays de la région qui se sont attelés au problème des terribles violations des droits humains commises dans le passé. »

Cela fait plus de 30 ans que les auteurs de violations des droits humains jouissent de l’impunité pour les crimes commis avant 1979, date de l’adoption de la loi d’amnistie. Dans l’affaire présente cependant, les procureurs ont fait valoir que les corps des victimes n’ayant jamais été retrouvés, le crime d’enlèvement s’étendait au-delà de 1979 et que les auteurs présumés ne pouvaient pas par conséquent s’abriter derrière la loi d’amnistie.

Le 18 novembre 2011, la présidente Dilma Rousseff a promulgué une loi portant création d’une commission de la vérité chargée d’enquêter sur les centaines de cas d’allégations de torture et de disparitions perpétrées sous la dictature militaire.

« Le Brésil doit se pencher sur les crimes commis dans le passé et veiller à ce que justice soit rendue aux victimes de cette sombre période de l’histoire du pays », a conclu Atila Roque.

Complément d’information

En avril 2010, la Cour suprême brésilienne a confirmé que la loi d’amnistie s’appliquait aux violations graves des droits humains commises sous le régime militaire. Quelques mois plus tard, en novembre 2010, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a estimé que cette loi n’était pas compatible avec la Convention américaine relative aux droits de l’homme, qu’elle n’avait pas d’effet juridique et qu’elle ne devait plus constituer un obstacle à la tenue d’enquêtes et à l’ouverture de poursuites contre les responsables présumés de violations des droits humains, ni à la condamnation de ceux reconnus coupables.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit