BRÉSIL - Violence maximum, protection minimum de la part des pouvoirs publics

Index AI : AMR 19/034/2005

Douglas Brasil de Paula, un collégien de quatorze ans, jouait au flipper dans un café. João da Costa Magalhães était assis devant sa porte. Elizabeth Soares de Oliveira travaillait dans le bar tenu par son mari. Rafael da Silva Couto, dix-sept ans, faisait du vélo dans la rue. Ils ont tous les quatre été abattus le 31 mars 2005, par un escadron de la mort en « expédition » à Baixada Fluminense, un quartier de Rio de Janeiro.

« Le massacre perpétré à Baixada Fluminense, qui a fait 29 victimes, est la conséquence d’une politique de sécurité publique qui abandonne les pauvres et condamne l’ensemble des Brésiliens à vivre dans un climat de violence et de criminalité », a déclaré Tim Cahill, chercheur d’Amnesty International, spécialiste du Brésil, lors de la publication du rapport consacré par l’organisation au problème de la sécurité publique dans ce pays.

Intitulé Ils arrivent en tirant... Le maintien de l’ordre au sein des populations socialement exclues, ce rapport en arrive à la conclusion que seul un nouveau programme global de sécurité publique, axé plus particulièrement sur la prévention des homicides, le bon fonctionnement de la justice et le contrôle des armes de petit calibre, pourrait permettre de lutter efficacement contre la violence et la délinquance qui minent le Brésil.

Amnesty International a pu constater que, loin de faire baisser la criminalité, les politiques de sécurité publique discriminatoires appliquées jusqu’à présent n’ont fait que concentrer la violence et les atteintes aux droits humains dans les bidonvilles du pays.

« Bien que la population des quartiers pauvres soit, de loin, celle qui souffre le plus de la violence criminelle, les moyens consacrés à sa protection par les autorités, au niveau tant de la Fédération que des États, sont insignifiants », a souligné Tim Cahill. « Le budget alloué à la sécurité publique est essentiellement réparti en fonctions de considérations répressives et discriminatoires, tendant à « criminaliser » des communautés entières. »

« Les pauvres des grandes agglomérations brésiliennes supplient l’État de les protéger, mais, lorsqu’ils obtiennent quelques chose, ce n’est bien souvent que le déploiement de policiers brutaux et corrompus. Une politique de sécurité fondée sur la division sociale et la répression ne peut apporter la paix que la population appelle de ses vœux. »

L’absence d’une réelle politique de sécurité est préjudiciable non seulement aux habitants des quartiers pauvres, mais également à la police elle-même. Pour beaucoup de policiers, être envoyé dans une favela est considéré comme une punition. Les fonctionnaires de police qui travaillent dans les bidonvilles du Brésil ne disposent pas, bien souvent, de la formation et des moyens qui leur permettraient de s’acquitter de leur mission. Les opérations de type militaire les exposent en outre aux attaques des bandes de délinquants et des groupes de trafiquants de drogue. Pour la seule année 2004, 52 policiers ont été tués en service à Rio de Janeiro.

Amnesty International reconnaît que le gouvernement fédéral a fait certains efforts pour combler le vide qui existe depuis longtemps en matière de politique de sécurité publique, mettant notamment en place un programme national de sécurité publique, ainsi que diverses initiatives visant à désarmer la population. Amnesty International a également pu constater, au niveau municipal, que certains projets sociaux, menés en association avec des programmes locaux de sécurité, avaient permis de sensiblement réduire le nombre des homicides.

« Les considérations politiques et financières à court terme ne peuvent plus justifier la négligence des gouvernements successifs dans ce domaine. Les pouvoirs publics, à tous les niveaux, doivent s’attaquer aux ravages qui touchent toute une génération de jeunes Brésiliens et à la fracture sociale de plus en plus grave qui affecte le pays. »

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