CAMBODGE - Nouvelle arrestation d’un militant sur fond de manipulation des tribunaux par le gouvernement

Index AI : ASA 23/001/2006

Le gouvernement cambodgien doit cesser de manipuler les tribunaux, a déclaré Amnesty International ce jeudi 5 janvier 2006, après qu’un autre détracteur du gouvernement a été inculpé de diffamation.

« La situation se détériore fortement, exposant d’autres militants à être arrêtés sur la base d’accusations à caractère politique », estime Brittis Edman, chercheuse sur l’Asie du Sud-Est à Amnesty International.

Pa Nguon Teang, vice-président du Centre cambodgien pour les droits de l’homme, a été inculpé de diffamation et incarcéré ce jeudi 5 janvier, après avoir été appréhendé la veille dans la province de Stung Treng, située dans le nord-est du pays.

« Force est de constater que le droit à la liberté d’expression est battu en brèche, le gouvernement utilisant de plus en plus les tribunaux pour museler toute critique. Le gouvernement cambodgien ne peut pas faire porter le chapeau aux tribunaux. Il manipule le système judiciaire, minant ainsi la crédibilité et l’indépendance de la justice. »

Six militants politiques et civils de premier plan se trouvent désormais derrière les barreaux à Phnom Penh. Ils font tous l’objet de plaintes déposées par le Premier ministre Hun Sen ou d’autres membres du gouvernement.

Le président du Centre cambodgien pour les droits de l’homme, Kem Sokha, a lui aussi été arrêté, le 31 décembre, tout comme Yeng Virak, directeur du Centre cambodgien d’éducation juridique. Tous deux ont été inculpés de diffamation pénale en raison d’une banderole qui a servi lors d’un rassemblement célébrant la Journée des droits de l’homme, le 10 décembre.

« Il est cocasse de relever que ces personnes ont été arrêtées dans le cadre d’un rassemblement en faveur des droits humains. Le gouvernement cambodgien doit faire preuve de son engagement en faveur des libertés fondamentales en rétablissant le droit à la liberté d’expression et en retirant les plaintes déposées contre ceux qu’il a placés en détention. »

Amnesty International craint que d’autres membres du comité organisateur du rassemblement et des 63 organisations non gouvernementales (ONG) qu’il représentait ne risquent également d’être interpellés.

Complément d’information

Le Centre cambodgien pour les droits de l’homme et le Centre cambodgien d’éducation juridique sont deux des ONG qui ont pris part à l’organisation du rassemblement public visant à célébrer la Journée des droits de l’homme, le 10 décembre 2005. Des milliers de personnes ont participé à cette manifestation et certaines ont écrit des commentaires à la main sur une banderole. Les accusations de diffamation se fondent sur l’une de ces inscriptions, qui accuserait le Premier ministre Hun Sen de « vendre des terres » au Viêt-Nam.

En octobre 2005, le directeur de radio Mam Sonando et le dirigeant syndicaliste Rong Chhun ont été arrêtés et inculpés notamment de diffamation pénale, à la suite d’une interview radiodiffusée et d’une déclaration critiquant la politique du gouvernement au sujet d’un accord frontalier passé avec le Viêt-Nam. Les deux hommes sont toujours maintenus en détention provisoire et, s’ils sont reconnus coupables, peuvent être condamnés à passer plusieurs années derrière les barreaux. Amnesty International les considère comme des prisonniers d’opinion.

Le 22 décembre 2005, le dirigeant de l’opposition Sam Rainsy a été reconnu coupable par contumace de diffamation envers la personne du Premier ministre Hun Sen et du président de l’Assemblée nationale, le prince Norodom Ranariddh. Condamné à dix-huit mois d’emprisonnement, il se trouve toujours en exil.

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