CAMPAGNE INTERNATIONALE SUR LES DÉFENSEURES DES DROITS HUMAINS - La consultation mondiale s’ouvre au Sri Lanka

Index AI : ACT 77/057/2005

DÉCLARATION PUBLIQUE

Ce mardi 29 novembre 2005 à Colombo, au Sri Lanka, près de 200 militantes de quelque 70 pays du globe se réunissent dans le cadre d’une rencontre mondiale historique de femmes défenseures des droits humains. Cette consultation, à laquelle assiste Shiranthi Rajapakse, épouse du Premier ministre sri lankais, s’intéresse à la situation des femmes qui militent pour toute une série de questions relatives aux droits humains, ainsi qu’à celle des femmes et des hommes du monde entier qui défendent les droits fondamentaux des femmes. Elle se consacre aux difficultés qu’ils rencontrent dans leur organisation politique, notamment la violence, le harcèlement et l’intimidation. Les participants à cette conférence vont promouvoir une compréhension plus nuancée des atteintes ciblant les femmes défenseures des droits humains. Ils vont aussi élaborer des stratégies concrètes visant à faire face à des menaces telles que la montée des fondamentalismes et du militarisme à l’échelle de la planète, ainsi qu’à un climat de plus en plus hostile au travail des militants politiques dans divers mouvements sociaux. Cette consultation s’inscrit dans le cadre de la campagne internationale Défendre les femmes qui défendent les droits : Campagne internationale sur les femmes défenseures des droits humains.

Lancée en avril 2004, cette campagne est une initiative internationale pour la reconnaissance et la protection des femmes défenseures des droits humains qui militent pour la réalisation effective des droits humains pour tous. Formée d’une coalition d’organisations de défense des droits des femmes et des droits humains, elle s’appuie sur les éléments accablants qui prouvent que nombre de femmes travaillant dans différents domaines des droits humains sont régulièrement en butte au harcèlement, aux atteintes aux libertés fondamentales, à la violence, à la discrimination et à la marginalisation. Des organisations de défense des droits humains et des experts des Nations unies mettent peu à peu en évidence qu’elles s’attirent l’hostilité des gouvernements, des médias et de la police, mais aussi de leurs communautés et de leurs familles. Elles sont agressées en raison de leur mobilisation et de leur identité réelle ou présumée.

Dans son discours d’orientation, Hina Jilani, représentante spéciale du secrétaire général sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, a fait valoir qu’il était urgent d’identifier et d’examiner les problèmes spécifiques auxquels sont confrontées les femmes engagées dans la défense des droits fondamentaux de la personne humaine, afin que leur importante contribution dans ce domaine soit pleinement reconnue et appréciée. Elle a fait observer que les femmes défenseures des droits humains sont particulièrement exposées parce qu’elles bravent bien souvent les normes culturelles liées au genre, à l’hétérosexualité et à la féminité, dans leurs identités et dans le cadre de leur lutte. Elle a souligné que les atteintes dont elles sont victimes sont le fait des structures étatiques officielles, mais aussi des mouvements religieux, des collectivités et des familles notamment. Aussi faut-il impérativement que les stratégies en matière de droits humains prennent ces acteurs en considération.

Les conférencières ont abordé les thèmes principaux de la consultation, notamment les agressions liées à la sexualité, la persécution imputable aux groupes fondamentalistes et le rôle primordial de la famille, de la communauté et de l’État dans l’émergence de la marginalisation, de la discrimination et de la violence généralisées envers les défenseures.

Ruth del Valle, du Movimiento Nacional de Derechos Humanos (MNDH, Mouvement national des droits humains), au Guatémala, a qualifié de « dialogue de sourds » la culture des gouvernements de nombreuses régions d’Amérique latine qui manifestent un attachement de pure forme aux principes des droits humains. « Personne n’entend réellement ce qui est dit. Nous nous plaignons et ils écoutent, sans que rien ne soit entrepris pour remédier au problème. Ils se cachent derrière le fait qu’ils écoutent pour prétendre s’intéresser aux droits humains. » Elle a également parlé de l’attitude fréquente des familles envers la mobilisation et le travail des femmes défenseures des droits humains, faisant observer : « Dans bien des cas, les hommes soutiennent en théorie la notion de droits humains et de droits des femmes - mais ils veulent que leur propre femme reste à la maison pour eux et ne s’engage pas personnellement. »

Selon Ndeye Nafissatou Faye, du réseau SIGGIL JIGEEN au Sénégal, les obstacles que rencontrent les mouvements de femmes en Afrique procèdent de trois facteurs sociaux interdépendants : « Tout d’abord, il y a le sacrifice. Les femmes qui militent en faveur des droits humains ou dans des syndicats doivent souvent assister à des réunions tardives. Nos enfants et nos familles en souffrent - et nos maris menacent parfois de divorcer. Et puis il y a la peur. La peur du regard des autres, la peur d’être rejetée par la société et d’être agressée. La peur de ce qui nous arrivera si nous sommes victimes de violences dans des pays où les femmes dans cette situation ont peu de recours. Et la peur de la vision du féminisme, généralement négative en Afrique. Enfin, il y a la culpabilité. Nous finissons souvent par nous demander si cela en vaut la peine. Ce terrible dilemme interne en Afrique contribue au déclin de la participation au sein de nos mouvements de femmes. Nous devons faire changer cela. »

La conférence se poursuit jusqu’au jeudi 1er décembre et se conclura par une session finale vendredi : la Campagne internationale sur les femmes défenseures des droits humains organisera alors un événement public, évoquera ses projets pour l’avenir et lancera un appel en faveur de la protection des femmes défenseures des droits humains du monde entier.

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