Chili. Chronologie de l’affaire Augusto Pinochet

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Index AI : AMR 22/003/2008 -
ÉFAI

Juillet 1996

L’Audience nationale espagnole reçoit les premières plaintes déposées au pénal contre Augusto Pinochet pour actes de génocide et de terrorisme.


Février 1997

Des enquêtes judiciaires sont ouvertes en Espagne sur les atteintes aux droits humains perpétrées contre des citoyens espagnols au Chili sous le gouvernement militaire du général Augusto Pinochet et sur les violations commises dans le cadre de l’opération Condor. Les chefs d’inculpation retenus — « disparitions », torture et exécutions extrajudiciaires notamment — constituent des crimes contre l’humanité.

Octobre 1998

• Les juges espagnols Manuel Garcia-Castellón et Baltasar Garzón Real introduisent une requête officielle auprès des autorités britanniques afin qu’Augusto Pinochet soit interrogé. Augusto Pinochet fait l’objet de mandats d’arrêt provisoires décernés par un magistrat britannique. Il est placé en garde à vue à Londres.

• Le juge Baltasar Garzón décerne un mandat d’arrêt international contre Augusto Pinochet en vue de demander son extradition.

• Des poursuites judiciaires sont annoncées en Italie, au Luxembourg, en Norvège, en Suède et aux Etats-Unis. Finalement, une procédure pénale est ouverte en Belgique, en France et en Suisse.

• Les avocats d’Augusto Pinochet forment un recours contre sa détention devant la Haute Cour de justice du Royaume-Uni.

• La Haute Cour britannique statue qu’Augusto Pinochet, en sa qualité d’ancien chef d’État, bénéficie de l’immunité contre l’extradition et les poursuites pour actes systématiques de meurtre, de torture, de « disparition », de détention illégale et de transferts forcés.

• Le ministère public britannique interjette appel de la décision de la Haute Cour et obtient que l’affaire soit renvoyée devant la Chambre des Lords.

Novembre 1998

• Le gouvernement espagnol présente aux autorités britanniques une requête officielle concernant l’extradition d’Augusto Pinochet afin qu’il soit jugé en Espagne pour génocide, terrorisme, enlèvement, torture et « disparitions », ainsi que pour entente en vue de commettre ces crimes. Les gouvernements suisse et français déposent eux aussi une demande d’extradition auprès des autorités britanniques.

• Le Comité contre la torture des Nations unies recommande au gouvernement britannique que l’affaire d’Augusto Pinochet « soit déférée au parquet en vue de déterminer si un procès est réalisable, et, le cas échéant, que des poursuites criminelles soient engagées en Angleterre si la décision de ne pas l’extrader était prise ». Il préconise également une modification de la législation britannique qui entre en conflit direct avec la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, dans la mesure où elle accorde dans les faits l’immunité aux chefs d’État et permet aux personnes poursuivies pour actes de torture d’invoquer une défense fondée sur l’« autorisation légale ».

• Le Comité judiciaire de la Chambre des Lords, la plus haute instance britannique, infirme la décision de la Haute Cour. Par une majorité de trois voix contre deux, les lords-juges (de la Chambre des Lords) décrètent que le statut d’ancien chef d’État d’Augusto Pinochet ne lui confère pas d’immunité contre des poursuites. Cette décision ouvre la voie à une possible extradition d’Augusto Pinochet vers l’Espagne afin qu’il soit jugé pour massacre, terrorisme et torture.

• C’est au ministre britannique de l’Intérieur, Jack Straw, qu’il incombe alors de prendre la décision finale quant à la poursuite de la procédure d’extradition.

Décembre 1998

• Le gouvernement belge dépose lui aussi une demande d’extradition auprès des autorités britanniques.

• À la veille du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), le ministre britannique de l’Intérieur ordonne que la procédure d’extradition soit engagée.

• La décision des lords-juges est annulée, la composition du Comité judiciaire de la Chambre des Lords ayant été contestée au motif que l’un des juges entretenait des liens avec Amnesty International Charity Limited. Un nouveau collège de sept lords-juges doit réexaminer le dossier en janvier 1999.

• Augusto Pinochet demeure sous surveillance policière au Royaume-Uni pendant que la procédure judiciaire suit son cours.

Janvier 1999

De nouvelles audiences ont lieu devant la Chambre des Lords. Amnesty International, la Fondation pour les soins aux victimes de torture, Redress Trust, Mary Ann et Juana Francisca Beausire, la britannique Sheila Cassidy, victime de tortures, et l’Association des familles de détenus disparus au Chili sont autorisés à participer en tant que tiers, à l’instar du gouvernement chilien.

Mars 1999

• Par une majorité de six voix contre une, les lords-juges statuent qu’Augusto Pinochet ne peut bénéficier de l’immunité pour les actes de torture commis lorsqu’il était chef d’État et qu’il peut être extradé, mais uniquement pour les crimes de torture et d’entente en vue de commettre des actes de torture qui auraient été perpétrés après le 8 décembre 1988 — date à laquelle la Convention de l’ONU contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est devenue contraignante pour le Chili, l’Espagne et le Royaume-Uni.

• Bien que tous les autres chefs d’accusation aient été abandonnés, les lords-juges précisent dans leur arrêt que, sous le régime du général Augusto Pinochet, « des actes de barbarie consternants ont été commis au Chili et dans le reste du monde : actes de torture, meurtres et disparitions inexpliquées de personnes, tous sur une grande échelle ». Les lords-juges estiment que le ministre de l’Intérieur britannique peut autoriser la poursuite de la procédure d’extradition sur la base d’un nombre de charges réduit.

• Le Comité des droits de l’homme de l’ONU fait savoir que la loi d’amnistie de 1978 en vigueur au Chili viole le droit à un recours effectif et est incompatible avec l’obligation faite aux États d’enquêter sur les violations des droits humains.

Avril 1999

Le ministre de l’Intérieur britannique autorise donne une nouvelle fois son feu vert à la procédure d’extradition. Les audiences prévues dans le cadre de cette procédure sont fixées à septembre.

Août 1999

La 5e chambre de la Cour d’appel de Santiago rejette une requête demandant qu’Augusto Pinochet ne soit pas exclu de l’enquête menée sur le meurtre de 72 personnes tuées en 1973 dans le cadre de l’opération Caravane de la mort. Dans son arrêt, la cour déclare qu’au titre de l’article 58 de la Constitution chilienne l’immunité parlementaire dont jouit Augusto Pinochet le place à l’abri de toute enquête de ce type.

Septembre 1999

• Au cours de l’année qui suit son arrestation, 40 actions en justice sont intentées contre Augusto Pinochet devant les tribunaux chiliens.
• Les audiences concernant l’extradition d’Augusto Pinochet débutent au Royaume-Uni sous l’égide du juge Ronald Bartle du tribunal de Bow Street. Il s’agit de déterminer si Augusto Pinochet peut être extradé pour 35 cas de torture ou d’entente en vue de commettre des actes de torture commis après le 8 décembre 1988, ainsi que pour les cas de torture découlant de 1 198 « disparitions » soumis par le juge espagnol Baltasar Garzón.

Octobre 1999

• Le juge Ronald Bartle ordonne la poursuite de la procédure d’extradition concernant Augusto Pinochet. Il souligne que la procédure ne vise pas à statuer sur la culpabilité d’Augusto Pinochet, mais à déterminer si les conditions sont réunies pour ordonner son incarcération dans l’attente que le ministre de l’Intérieur prenne sa décision.

• Le juge Ronald Bartle conclut que les informations qui lui ont été transmises sur des accusations portant sur des faits postérieurs au 8 décembre 1988 « constituent des agissements assimilables à des actes de torture et à une entente en vue de commettre des actes de torture » pour lesquels Augusto Pinochet « ne bénéficie d’aucune immunité ». S’agissant des cas de « disparitions », il estime que les répercussions sur les familles peuvent « constituer une torture mentale ».

• Le gouvernement chilien demande aux autorités britanniques de faire passer des examens médicaux à Augusto Pinochet dans la perspective d’une libération pour des motifs humanitaires.

• Les avocats d’Augusto Pinochet font appel de la décision du juge en sollicitant une ordonnance d’habeas corpus (procédure permettant la comparution immédiate d’un détenu devant une autorité judiciaire, afin de contester la légalité de la détention, et de permettre ainsi une éventuelle remise en liberté).

Novembre 1999

• Le gouvernement chilien ayant sollicité la libération d’Augusto Pinochet pour des raisons de santé, le ministère de l’Intérieur du Royaume uni demande que celui-ci soit soumis à des examens médicaux indépendants.
• L’Audience nationale espagnole fait obstacle, pour la troisième fois, aux tentatives du Bureau du procureur général et du ministère public espagnols de mettre un coup d’arrêt à la procédure engagée contre Augusto Pinochet en Espagne. Elle réaffirme la compétence des tribunaux espagnols et autorise le juge Baltasar Garzón à poursuivre ses investigations.

Janvier 2000

Le ministre de l’Intérieur britannique Jack Straw annonce que la demande d’extradition d’Augusto Pinochet vers l’Espagne pourrait être rejetée en raison de son état de santé. Cette décision se fonde sur le rapport d’un groupe de quatre médecins. Ce dossier médical a tout d’abord été refusé aux quatre pays ayant demandé l’extradition d’Augusto Pinochet. Toutefois, en application d’une décision de la Haute Cour, il leur a finalement été transmis.

Mars 2000

• Le ministre de l’Intérieur britannique Jack Straw décide de mettre fin à la procédure d’extradition d’Augusto Pinochet vers l’Espagne, pour raisons de santé. Augusto Pinochet rentre au Chili.
• Le jour de son retour, sept avocats spécialisés dans la défense des droits humains introduisent une requête auprès de la justice civile en vue d’obtenir la levée de l’immunité dont il bénéficie en tant que sénateur à vie.
• Lors de son retour au Chili, plus de 2 000 cas individuels de violation des droits humains sont soumis aux instances judiciaires contre Augusto Pinochet.

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