Communiqué de presse

Chine. Certaines propositions concernant la révision d’une loi augmentent le risque de disparitions forcées

Des dispositions qui rendraient légal le placement en détention secrète de certains groupes de suspects bafoueraient les obligations de la Chine en vertu du droit international et doivent être supprimées des dernières révisions en date de la loi de procédure pénale, a déclaré Amnesty International mardi 13 mars.

Une clause qui aurait permis aux autorités de soumettre des suspects à une « disparition » pendant des périodes pouvant atteindre six mois ne figure plus dans la dernière version de cette loi. Cependant, les dernières révisions présentées au corps législatif le 8 mars, qui devraient être adoptées le 14 mars, rendraient pour la première fois légal le placement en détention secrète de certains suspects par la police, en dehors du système carcéral officiel, pendant des périodes pouvant atteindre jusqu’à six mois s’ils sont accusés d’« atteinte à la sécurité de l’État », de « terrorisme » ou de certains types de « corruption ». Cela constituerait un vrai revers pour la justice chinoise.

Plusieurs milliers de personnes se trouvent déjà en détention secrète en Chine, risquant fortement d’être torturées. Ces milliers de personnes incluent des requérants cherchant à obtenir justice, des membres d’églises minoritaires et des militants politiques.

Les dirigeants chinois affirment avoir inscrit la protection des droits humains dans la dernière version de la loi de procédure pénale, mais ceux qui essaient de défier pacifiquement le gouvernement et de nombreux autres ne bénéficieraient pas de cette protection et seraient exposés aux violations.

Amnesty International salue les changements apportés à la loi qui, s’ils étaient mis en œuvre, amélioreraient la protection juridique des mineurs et des personnes souffrant de troubles psychiques, et renforceraient le respect de la procédure pour les suspects et accusés de droit commun.

Cependant, il y aurait également des dérogations dangereuses au respect de la procédure pour des catégories entières de délinquants présumés, dont ceux qui souhaitent simplement exprimer leur opinion. Le chef d’« atteinte à la sécurité de l’État », par exemple, dont relève entre autres le fait de critiquer le parti communiste, est utilisé depuis longtemps pour réduire les opposants au silence. L’an dernier, la Chine a condamné le militant Chen Wei à neuf ans de prison pour « incitation à la subversion de l’État » parce qu’il avait mis en ligne des écrits critiquant le gouvernement.

Des membres de minorités ethniques, tels que les Ouïghours et les Tibétains, qui appellent pacifiquement à l’autonomie ou à l’indépendance sont également menacés par la dernière version en date de la loi.

Une ébauche de la loi révisée, diffusée en août 2011, qui aurait dans les faits légalisé la « disparition forcée » des personnes soupçonnées d’« atteintes à la sécurité de l’État » ou de « terrorisme » pour une période pouvant atteindre six mois, a suscité les protestations, en Chine et à l’étranger, d’éminents juristes, de défenseurs des droits et du grand public. Les derniers changements apportés à la clause de « résidence surveillée » (article 73) requièrent que la police notifie dans les 24 heures la famille des suspects ainsi placés en détention. Les organes chargés de faire respecter la loi peuvent cependant continuer à incarcérer des suspects en dehors du système de détention officiel. Et ces organes n’auraient pas à dire aux familles pourquoi, ni où se trouve le suspect. Les suspects pourraient aussi se voir priver d’avocat pendant cette période.

En Chine, le risque pour les suspects d’être victimes de torture reste élevé. Les incarcérer hors de lieux de détention officiels les expose encore plus à ce danger.

En outre, les articles 37 et 83 permettraient à la police de placer en détention secrète (dans des établissements officiels) des personnes soupçonnées d’infractions en rapport avec la « sécurité nationale », le « terrorisme » et la « corruption massive » pour une période pouvant atteindre 37 jours. Pendant ce temps, ces suspects seraient tenus d’obtenir la permission des autorités afin de contacter un avocat de la défense, ce qui donnerait aux organes responsables de l’application des lois le pouvoir de les priver du droit d’obtenir l’aide d’un avocat. Et, si les autorités estiment qu’avertir la famille est susceptible de « gêner l’enquête », elles auraient la possibilité de suspendre toute notification.

En revanche, dans les affaires de droit commun, les organes chargés de faire respecter la loi seraient tenus de permettre au suspect de contacter un avocat dans les 48 heures, et devraient notifier les familles dans les 24 heures, ce qui constitue une amélioration par rapport à la version précédente de la loi.

Le gouvernement chinois affirme que la dernière révision en date de la loi de procédure pénale renforce la protection des suspects et limite le pouvoir de la police. En réalité, la police conserverait sa position de force, continuant à opérer sans le moindre contrôle judiciaire. Et parce que la justice chinoise n’est pas indépendante, il n’existe pas de recours effectif pour les personnes ayant subi des violations aux mains des autorités.

Il n’est pas trop tard pour adopter une loi qui améliorerait l’administration de la justice pour l’ensemble des suspects, et qui la rapprocherait de la concrétisation de l’objectif que constitue la protection des droits humains.

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