Colombie : Demande d’application de l’accord de paix

L’accord de paix entre le gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires (FARC) signé en novembre 2016 a marqué un tournant dans l’histoire du pays et de la région. Amnesty International a répété à plusieurs reprises qu’une mise en œuvre efficace de cet accord sur les territoires historiquement touchés par les violences pourrait garantir que les crimes qui ont été commis ne se répètent pas et que les générations futures ne soient pas victimes des mêmes souffrances.

La mise en œuvre de l’accord de paix soulève de nombreuses difficultés, notamment parce que la Colombie est toujours le théâtre de conflits et que des acteurs armés, légaux et illégaux, continuent de s’affronter dans des zones rurales et isolées du pays. Bien que les chiffres officiels indiquent une diminution du nombre de civils tués dans des opérations militaires opposant les FARC et les forces de sécurité de l’État depuis le début des négociations quant à un accord de paix, les conflits risquent de se poursuivre, et ils se sont même intensifiés dans certaines régions, par exemple dans la région du Pacifique.

Amnesty International est préoccupée par la situation humanitaire dramatique dans le département du Chocó. Au cours des six premiers mois de cette année, les communautés ont signalé qu’au moins deux incursions paramilitaires ont eu lieu sur le territoire. La première a eu lieu le 6 mars et a provoqué le déplacement de nombreuses familles et l’isolement des communautés voisines de Peña Azul. La seconde a eu lieu le 18 avril sur le territoire collectif de Jiguamiandó, près de la zone humanitaire de Pueblo Nuevo.

Des violations du droit international et des droits humains continuent d’être commises dans le département du Chocó : des membres des communautés afro-colombiennes et indigènes sont victimes d’homicides sélectifs, de nombreuses personnes sont déplacées de force, des communautés sont isolées et des jeunes garçons et des jeunes filles sont recrutés de force. La situation actuelle est critique. Parallèlement, depuis la signature de l’accord de paix avec les FARC, les affrontements armés entre l’Armée de libération nationale (ELN), les forces de sécurité de l’État et les paramilitaires dans la région se sont intensifiés, jetant le doute sur la possibilité de mettre en œuvre l’accord sur le territoire. Selon des chiffres publiés par des organisations militantes et des agences internationales présentes sur le territoire, 21 déplacements collectifs ont été constatés.

Amnesty International met également en garde contre le risque auquel les populations indigènes et les communautés afro-colombiennes sont confrontées en raison de l’installation sur leurs territoires de mines antipersonnel, ce qui représente une grave violation du droit international humanitaire. Sebastián Carpio Maheche, un jeune homme de la communauté autochtone wounaan, a notamment été blessé par l’explosion d’une mine antipersonnel le 11 juillet 2017 dans la communauté de Juuin Duur, dans la réserve d’Embera Wounaan Katio de Quiparadó de la municipalité de Riosucio, dans le département du Chocó.

Lors de sa récente visite à Litoral del San Juan le 9 août, le médiateur colombien a en outre exprimé son inquiétude quant aux conséquences que le conflit pourrait avoir pour les droits fondamentaux des communautés du Chocó. Il a également déploré le fait que les communautés souffrent toujours des conséquences des violences sur ce territoire et que les autorités ne prennent pas de mesures pour faire face efficacement à la situation.

Un accord de cessez-le-feu entre les forces de sécurité de l’État et l’ELN permettrait de garantir la protection des communautés touchées depuis longtemps par le conflit. Parallèlement, l’État colombien doit prendre des mesures décisives pour démanteler les groupes paramilitaires dans la région sans délai, conformément à l’accord signé à La Havane.

Les conséquences des violences dans le département sont dramatiques et les autorités colombiennes doivent mettre en œuvre des mesures de prévention et de protection exhaustives de toute urgence pour garantir les droits humains, conformément aux normes internationales relatives aux réparations et aux garanties de non-répétition. Ces mesures sont indispensables pour ramener la paix sur le territoire. Les personnes et communautés touchées doivent participer à l’élaboration de ces mesures collectives et individuelles, en reconnaissance du rôle essentiel que jouent les victimes dans la mise en œuvre de l’accord de paix.

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