« Les opérations d’éradication forcée des plantations de coca dans le contexte de la pandémie de COVID-19 représentent une sentence de mort pour les communautés rurales, a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International. La pulvérisation de cultures illicites va priver des communautés rurales de leur unique moyen de subsistance en pleine période de pandémie, et elle risque aussi d’éliminer des cultures licites qui sont une importante source de denrées alimentaires. Qui plus est, ces opérations exposent à la contagion des populations qui ont peu accès aux services de santé. »
Face à la pandémie de COVID-19, le gouvernement colombien doit mettre en place une riposte coordonnée, cohérente et exhaustive qui respecte les droits humains. Le fait de pénétrer sur le territoire de communautés rurales pour procéder à des opérations d’éradication forcée de cultures sans avoir dûment obtenu leur accord, de les exposer à un risque de contamination au COVID-19 et de perturber leur mode de vie pourrait causer des violations des droits humains, en plus d’aggraver la crise humanitaire que subissent un grand nombre de ces communautés.
Le Comité d’intégration sociale du Catatumbo (CISCA) a informé Amnesty International des difficultés qu’engendrent les mesures mises en place par le gouvernement pour combattre la pandémie. Pour les membres de cette organisation, le gouvernement doit garantir les droits des communautés rurales dans le cadre de l’isolement social et stopper immédiatement le lancement des opérations d’éradication forcée de cultures de coca, qui portent atteinte à la souveraineté alimentaire de la population.
« Dans ce pays, et en particulier dans des régions comme le Catatumbo, il faut chaque jour faire preuve de créativité et de courage : la créativité pour deviner où commencera la bataille ce jour-là, et le courage pour survivre physiquement, moralement et culturellement », a déclaré le CISCA.
Amnesty International demande aux autorités colombiennes de prendre de toute urgence les mesures nécessaires pour garantir les droits des communautés rurales, notamment leurs droits à la santé, à l’eau et à l’alimentation. Elles doivent également exercer une présence étatique allant au-delà de la présence militaire, stopper les opérations d’éradication des plantations de coca et respecter les termes de l’Accord de paix.
Complément d’information
Malgré la situation d’urgence sanitaire décrétée en raison de la pandémie de COVID-19 et l’état d’urgence économique, social et écologique en vigueur sur tout le territoire national, et alors que plusieurs organisations sociales ont demandé la suspension des opérations d’éradication forcée des plantations de coca pendant cette période, ces opérations se sont poursuivies dans au moins sept départements [1] du pays depuis l’instauration par le gouvernement le 25 mars de mesures d’isolement préventif obligatoire en raison de la pandémie.
Des organisations locales ont dénoncé le recours excessif à la force auquel se livrent les militaires, et la Commission interecclésiastique Justice et Paix a indiqué que la police [2] et l’armée [3] ont mené ces opérations sans tenir compte des protocoles d’hygiène et de salubrité visant à éviter la propagation du COVID-19.
Le 11 juillet, le ministère de la Défense nationale a signalé à plusieurs municipalités de la région du Catatumbo, notamment les municipalités de Convención, Teorama, Acarí et Sardinata, que la direction de la lutte contre les narcotiques de la police nationale allait commencer le 20 juillet à procéder aux opérations de pulvérisation terrestre de plantations de coca dans les secteurs pour lesquels elle a obtenu l’autorisation de l’autorité nationale des licences environnementales.