Communiqué de presse

Colombie. Les autorités doivent protéger la mobilisation du 6 mars

Le 6 mars 2012, le Mouvement national des victimes de crimes d’État (MOVICE) descendra à nouveau dans la rue pour demander vérité, justice et réparation pour les victimes du conflit armé colombien.

Cette année, le MOVICE exigera en particulier que tous les acteurs du conflit – groupes paramilitaires, forces de sécurité et mouvements de guérilla – restituent intégralement les terres qu’ils ont usurpées avec violence.

Le travail et les actions des membres du MOVICE ont été essentiels pour faire progresser la justice dans plusieurs cas graves de violations des droits humains, et la mobilisation du 6 mars constitue une nouvelle étape dans cette direction.

Amnesty International craint que, au vu de la situation actuelle des droits humains et des menaces et des homicides qui ont marqué les manifestations précédentes, les membres du MOVICE et les personnes qui participeront à cette mobilisation ne soient victimes de nouvelles agressions. C’est pourquoi Amnesty International demande au gouvernement colombien et aux autorités régionales, notamment celles des départements du Meta et de Córdoba où les manifestations se concentreront cette année, de prendre les mesures qui s’imposent pour protéger les participants et les dirigeants associatifs et garantir leur sécurité avant, pendant et après la mobilisation.

Le 6 mars 2008, juste avant et peu après la mobilisation, plusieurs syndicalistes et défenseurs des droits humains, dont certains avaient contribué activement à l’organisation des manifestations ou appartenaient à des organisations participantes, avaient été menacés ou tués.

À cela s’ajoute le fait que les autorités gouvernementales du pays ont publiquement mis en doute la légitimité de la mobilisation et du MOVICE, aggravant la vulnérabilité du mouvement. Aussi, Amnesty Internationale demande-t-elle au gouvernement national et aux autorités départementales de reconnaître publiquement et explicitement la légitimité et l’utilité de cette mobilisation.

Ces manifestations interviennent dans un contexte où les défenseurs des droits humains et les dirigeants associatifs sont victimes d’homicides et de menaces en Colombie. Amnesty International a reçu des informations selon lesquelles plus de 45 défenseurs des droits humains et dirigeants associatifs avaient été tués dans ce pays en 2011 ; plusieurs de ces homicides étaient liés au processus de restitution des terres. Parmi les victimes figurait notamment Eder Verbel Rocha, assassiné par deux paramilitaires le 23 mars 2011 dans la ville de San Onofre, dans le département de Sucre. En janvier 2012, les membres de sa famille ayant survécu à l’attaque ont reçu de nouvelles menaces de mort.

Ces agressions visant les défenseurs des droits humains qui militent pour la restitution des terres intervient alors que la Loi relative aux victimes et à la restitution des terres a été approuvée et est mise en œuvre. L’application effective de cette loi pourrait constituer une étape importante dans les efforts accomplis pour restituer les millions d’hectares de terres retirées à leurs propriétaires légitimes. Il est indéniable que cette loi contribue à aider dans leurs démarches les personnes qui ont perdu leurs terres. Cependant, et bien que ce texte comporte des lacunes et des contradictions, il a provoqué la colère de ceux qui sont responsables des expropriations, et cette colère se manifeste souvent de façon violente.

Le 21 février 2012, plusieurs membres du MOVICE du département de Nariño ont reçu des menaces de mort par courriel. Dans son message, le Groupe contre les restitutions de Nariño (Grupo Anti Restitución de Nariño – GAR) mettait ainsi en garde les destinataires : « nos mains ne trembleront pas pour exécuter, comme nous l’avons déjà fait en d’autres occasions, ceux qui oseront promouvoir des activités dont le contenu idéologique et politique concerne la restitution des terres aux prétendues victimes et la défense de leurs droits ».

Il faut que de telles menaces fassent rapidement l’objet de véritables enquêtes. Ces nouveaux avertissements ne font que réaffirmer la nécessité que les autorités prennent de toute urgence des mesures concrètes pour garantir la sécurité et la protection des dirigeants et des membres du MOVICE et de tous ceux qui participeront à la manifestation du 6 mars 2012.

La responsabilité incombe à l’État colombien, et au premier chef au gouvernement national et aux autorités départementales, de protéger les membres du MOVICE et toutes les personnes qui participeront à cette mobilisation, ainsi que les responsables associatifs.

Cette manifestation pacifique constitue une démarche légitime, protégée par la Constitution et les normes nationales ainsi que par les instruments internationaux relatifs aux droits humains qui reconnaissent et protègent les droits à la liberté d’expression, d’association, de réunion et de mouvement, ainsi que le droit de défendre les droits humains.

Les autorités nationales et locales sont tenues en conséquence d’apporter toutes les garanties de sécurité nécessaires avant, pendant et après la manifestation. C’est dans ce sens qu’Amnesty International a écrit au ministre de l’Intérieur colombien et aux gouverneurs des départements de Córdoba et du Meta pour obtenir des informations quant aux mesures qui seront mises en place et pour demander que la légitimité et l’utilité de cette mobilisation soient publiquement et explicitement reconnues.

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