COMMISSION DES DROITS DE L’HOMME DES NATIONS UNIES : Déclaration d’Amnesty International sur l’Irak, la République démocratique du Congo, le Népal et la République de Tchétchénie

Index AI : IOR 41/011/2003

COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Commission des droits de l’homme des Nations unies, 59e session, 17 mars -
25 avril 2003
Point n° 9 de l’ordre du jour : Question de la violation des droits de
l’homme et des libertés fondamentales, où qu’elle se produise dans le monde
Déclaration orale d’Amnesty International
Madame la Présidente,
Par cette intervention, Amnesty International souhaite attirer l’attention
de la Commission sur la gravité de la situation des droits humains en Irak,
en République démocratique du Congo, au Népal et en République de
Tchétchénie.
À l’heure actuelle, les regards du monde entier sont largement tournés vers
la guerre en Irak, qui intervient dans un contexte d’atteintes massives aux
droits humains dénoncées depuis des années. Nous sommes aujourd’hui
préoccupés par des informations faisant état de graves violations du droit
international humanitaire dans le cadre de cette guerre.
Nous appelons la Commission à rappeler à toutes les parties au conflit leurs
obligations en vertu du droit international humanitaire. Les parties
devraient aussi être encouragées à recourir aux services de la Commission
internationale d’établissement des faits pour enquêter sur les violations
présumées des lois de la guerre.
Amnesty International soutient aussi vivement les recommandations
précédemment formulées par la Commission, et tout récemment approuvées par
le rapporteur spécial sur l’Irak, demandant le déploiement dans le pays
d’observateurs des Nations unies chargés de veiller au respect des droits
humains. Quelle que soit l’issue de la guerre, de tels observateurs
devraient être déployés dès que possible, avec un mandat couvrant toutes les
graves atteintes aux droits humains commises par l’ensemble des parties
présentes sur le territoire irakien. Ces observateurs fourniraient aussi des
conseils sur la réforme institutionnelle et des informations dignes de foi à
la Commission et aux autres organes des Nations unies. Les préparatifs pour
ce déploiement doivent commencer immédiatement.
Amnesty International constate aussi avec préoccupation que, depuis le début
de l’opération militaire en Irak, des retombées négatives sur certains
droits fondamentaux ont été constatées dans le monde entier. Ces revers
prennent la forme, entre autres, d’un recours abusif des policiers à la
force contre des manifestants opposés à la guerre, d’attaques contre les
droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association, et de
restrictions du droit d’asile. Amnesty International exhorte tous les
gouvernements à respecter le droit des personnes d’exprimer pacifiquement
leurs opinions, et à ne pas se servir de la guerre en Irak comme prétexte
pour restreindre ou bafouer les droits humains fondamentaux.
Madame la Présidente,
À l’heure où la guerre en Irak fait la une de l’actualité, une autre guerre
ravage la République démocratique du Congo (RDC), suscitant bien moins
d’attention de la part de la communauté internationale. Amnesty
International est profondément préoccupée par les atteintes systématiques et
généralisées aux droits humains commises en RDC par des membres des forces
armées sous contrôle de la République démocratique du Congo, du Rwanda et de
l’Ouganda, ainsi que par des groupes politiques armés. Des millions de
civils non armés continuent d’être tués, déplacés et torturés ; des femmes
continuent d’être violées, et des enfants d’être recrutés dans les forces et
les groupes armés, semble-t-il en toute impunité. Dans les zones de l’est de
la RDC, contrôlées par des groupes politiques armés soutenus par le Burundi,
le Rwanda et l’Ouganda, les atteintes aux droits humains sont généralisées
et se traduisent, entre autres, par des homicides de civils non armés, des
arrestations arbitraires, des mises en détention illégales, des actes de
torture - dont des viols - et le recrutement d’enfants soldats.
Amnesty International appelle la Commission à soutenir la création d’une
commission d’enquête internationale sur les allégations de graves atteintes
aux droits humains et au droit international humanitaire commises dans le
cadre du conflit en RDC. Il faudrait que cette commission d’enquête rende
ses conclusions à la 60e session de la Commission des droits de l’homme.
Parallèlement, la Commission devrait appeler toutes les parties au conflit à
respecter pleinement leurs obligations aux termes du droit international
humanitaire et relatif aux droits humains. Les gouvernements impliqués dans
le conflit doivent veiller à ce que des enquêtes impartiales soient menées
dans les plus brefs délais sur toutes les allégations d’atteintes aux droits
humains, et à ce que les responsables de ces actes soient traduits en
justice conformément aux normes relatives à l’équité des procès.
Madame la Présidente,
Amnesty International salue l’adoption, le mois dernier, d’un Code de
conduite destiné à réglementer le cessez-le-feu entre le gouvernement du
Népal et le Parti communiste népalais (PCN) maoïste. Nous avons appelé les
deux parties à veiller à ce que les droits humains fassent partie intégrante
des négociations, et à adopter des mesures pour empêcher la poursuite des
homicides, des « disparitions », des actes de torture et des enlèvements.
Fin 2002, le nombre de personnes tuées dans ce conflit avait atteint 4 366.
Amnesty International estime qu’au moins la moitié de ces homicides
pourraient être des homicides illégaux. Par ailleurs, depuis 1998, Amnesty
International a dénombré près de 200 « disparitions ». Pour la seule année
2002, le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou
involontaires a recensé un nombre record de « disparitions » au Népal, à
savoir 28.
Amnesty International appelle la Commission à demander au gouvernement
népalais et au PCN de placer les droits humains au cœur des négociations de
paix à venir. Le gouvernement doit enquêter sur les allégations d’atteintes
aux droits humains et en traduire les responsables en justice dans le cadre
de procès équitables.
Nous appelons aussi la Commission à soutenir l’installation dans le pays
d’une présence du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, à contrôler le
respect du droit international humanitaire et relatif aux droits humains, et
à renforcer les capacités du pouvoir judiciaire, de la Commission nationale
des droits humains et des autres institutions relatives aux droits
fondamentaux.
Enfin, Madame la Présidente,
Amnesty International a été déçue que, lors de sa 58e session, la Commission
n’ait pas demandé à la Fédération de Russie de rendre compte de son bilan en
matière de droits humains concernant la Tchétchénie. Nous demeurons
extrêmement préoccupés par les informations selon lesquelles les forces de
sécurité russes continuent de commettre de graves violations des droits
humains en Tchétchénie, mais font rarement l’objet de poursuites pour ces
violations. Des Tchétchènes ont aussi été victimes de discrimination, de
harcèlement et de mises détention arbitraires dans d’autres parties de la
Fédération de Russie, notamment à la suite de la prise d’otages dans un
théâtre de Moscou.
De leur côté, les forces tchétchènes auraient aussi bafoué le droit
international humanitaire, par exemple en prenant pour cible des membres
civils de l’administration pro-russe, dont des dizaines ont été tués. Elles
affirment aussi avoir exécuté des membres des forces armées russes qu’elles
avaient capturés. Enfin, nous sommes extrêmement préoccupés par des
informations faisant état du renvoi forcé en Tchétchénie de milliers de
personnes déplacées, parfois à la suite de la fermeture des camps où elles
vivaient.
Amnesty International appelle la Commission à soutenir la création d’une
commission d’enquête internationale sur les allégations de graves atteintes
au droit international humanitaire et relatif aux droits humains commises
dans le cadre du conflit armé en Tchétchénie. Le rapport de cette commission
d’enquête devrait être remis à la 60e session de la Commission des droits de
l’homme.
La Commission devrait aussi exhorter le gouvernement de la Fédération de
Russie à prendre de toute urgence des mesures destinées à mettre fin aux
exécutions extrajudiciaires, aux « disparitions », à la torture et aux
mauvais traitements - y compris les viols - et à la discrimination dont sont
victimes les Tchétchènes. Le gouvernement devrait également cesser de
renvoyer de force chez elles les personnes déplacées originaires de
Tchétchénie.
Madame la Présidente, je vous remercie.

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