Communiqué de presse

Commission vérité et réconciliation : dix ans après, toujours pas de justice, ni de vérité ni de réparation

Dix ans après la présentation du rapport final emblématique de la Commission vérité et réconciliation, les dizaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui ont été victimes de terribles violations des droits humains pendant le conflit armé interne au Pérou entre 1980 et 2000 attendent toujours la justice, la vérité et des réparations.

Le rapport de la Commission expose en détail les violations multiples et systématiques des droits humains et les graves violations du droit international humanitaire qui ont été commises entre mai 1980 et novembre 2000 par des agents de l’État péruvien, par des personnes qui ont agi avec l’autorisation, l’appui ou le consentement de l’État et par des groupes armés d’opposition – le Sentier lumineux et le Mouvement révolutionnaire Túpac Amaru (MRTA), notamment.

La Commission a établi que des dizaines de milliers de personnes ont été victimes d’assassinats, de disparitions forcées, de tortures (dont le viol et la stérilisation forcée) et de détentions arbitraires. Elle a conclu que ces violations étaient imputables en majorité au Sentier lumineux, responsable de pratiquement 54 % des atteintes graves aux droits humains sur lesquelles elle a travaillé, et que les communautés indigènes et paysannes avaient été les plus touchées.

La Commission a présenté une série de recommandations en faveur de la vérité, de la justice et de la réconciliation, notamment : la réforme structurelle des forces armées, de la police et du système judiciaire, l’octroi de réparations individuelles et collectives aux victimes, ainsi que la mise en œuvre d’un plan national d’enquêtes médicolégales en vue de localiser et identifier les victimes, de déterminer les causes de leur mort et d’établir l’identité des auteurs.

Des progrès dans la lutte contre l’impunité ont été accomplis au cours des 10 années écoulées depuis la publication des conclusions de la Commission. Certains des principaux responsables de ces crimes ont notamment comparu devant la justice. Il reste cependant un long chemin à parcourir pour que les dizaines de milliers de victimes et leurs proches aient accès à la vérité, à la justice et à des réparations.

Moins de 20 % des affaires examinées par le Bureau du médiateur au cours des 10 dernières années se sont conclues par une décision de justice, selon le Bureau. Le refus systématiques des forces armées de coopérer aux enquêtes a empêché dans bien des cas les procureurs et les avocats représentant les proches de victimes de réunir suffisamment de preuves recevables pour que le dossier puisse aboutir.

La Commission avait localisé plus de 4 000 fosses communes. Le ministère public possède une liste actualisée sur laquelle figurent les noms de plus de 15 000 personnes disparues, et a recensé pour sa part plus de 6 400 fosses communes. Et pourtant, moins de 2 500 corps ont été exhumés, dont la moitié seulement ont été identifiés et rendus aux familles.

Dix ans après la publication du rapport final de la Commission vérité et réconciliation, il est temps que les autorités péruviennes s’engagent de manière décisive en faveur de la vérité, de la justice et de réparations.

Des dizaines de milliers de familles ne savent toujours pas où reposent leurs proches. Des dizaines de milliers de victimes attendent toujours de voir comparaître sur le banc des accusés ceux qui les ont torturées. Des dizaines de milliers de personnes attendent réparation. La majorité des victimes appartiennent aux couches les plus marginalisées de la société. Si les autorités péruviennes veulent prendre à bras le corps le problème de la discrimination et celui de l’impunité, elles ne peuvent attendre 10 années supplémentaires pour garantir la mise en œuvre de toutes les recommandations de la Commission vérité et réconciliation.

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