COMMUNAUTÉ DE DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE AUSTRALE:Maintien de l’ordre et protection des droits humains

Index AI : AFR 01/008/02

Dans les pays membres de la Southern African Development Community (SADC, Communauté de développement de l’Afrique australe), les droits humains sont quotidiennement bafoués par la police. Cette dernière a recours à des moyens meurtriers, de manière excessive ou injustifiée, pour réprimer la contestation non violente et n’hésite pas à arrêter arbitrairement les opposants.

Dans un rapport intitulé Maintien de l’ordre et protection des droits humains, dont la version anglaise paraît aujourd’hui (mardi 9 juillet), Amnesty International dénonce la torture et les autres mauvais traitements infligés aux suspects de droit commun et aux militants politiques par les forces de police de la majorité des pays étudiés.

« Les États qui tolèrent de tels actes ne contribuent pas à faire baisser la criminalité ou à trouver des solutions équitables aux problèmes politiques qui se posent, a déclaré l’organisation de défense des droits humains. Bien au contraire, ils portent ainsi gravement atteinte au professionnalisme de la police et manquent à leurs devoirs en matière de protection des victimes de la délinquance et de prévention des atteintes aux droits humains. »

Le rapport d’Amnesty International indique toutefois que la Southern African Regional Police Chiefs Cooperation Organization (SARPCCO, Organisation de coopération des commissaires de police de la région de l’Afrique australe) joue un rôle important en vue de promouvoir un maintien de l’ordre qui soit à la fois professionnel et efficace, en encourageant la formation concernant les principes déontologiques et les normes relatives aux droits humains.

Dans certains pays comme l’Afrique du Sud, le Botswana et le Malawi, des organisations non gouvernementales et locales coopèrent avec la police pour améliorer l’aide aux victimes de la criminalité (en particulier les femmes et les enfants). Leur but est également d’établir des partenariats efficaces avec la police, dans le souci de mettre en œuvre des programmes de lutte contre la délinquance fondés sur une collecte rigoureuse de renseignements et sur des méthodes respectueuses de la loi.

« L’amélioration de la sécurité de toutes les personnes vivant au sein de la SADC doit s’appuyer sur une bonne gouvernance, sur la promotion et la protection des droits fondamentaux de tous, sans exception, et sur le respect de l’État de droit », a souligné Amnesty International.

Pour rompre avec la logique de l’impunité et encourager des pratiques éthiques, il faut mettre en place des mécanismes efficaces pour mener des enquêtes indépendantes sur les violations commises par la police. « Rares sont les pays de la région qui se sont dotés de mécanismes permettant réellement de détecter et de combattre les abus, a déploré l’organisation. Amnesty International appelle la majorité des États qui ne l’ont pas encore fait à créer de tels mécanismes sans attendre. »

En outre, la plupart des pays de la SADC doivent :
abroger ou modifier les lois qui facilitent les atteintes aux droits humains, notamment celles qui autorisent le recours à une force excessive ou la détention au secret ;
faire figurer la formation en matière de droits humains dans la formation générale des policiers ;
veiller à ce que tous les groupes de population, sans exception, bénéficient davantage des services de la police et obliger cette dernière à rendre plus de comptes.

La réalisation de ces objectifs est cependant très compromise dans un certain nombre de pays, qui violent de façon flagrante l’obligation internationalement reconnue selon laquelle la police doit s’acquitter de sa tâche en toute impartialité. En Angola, au Mozambique, en Namibie, au Swaziland et en Tanzanie, la police n’agit pas avec l’impartialité nécessaire à l’égard des minorités, des groupes vulnérables ou encore des opposants politiques.

Au Zimbabwe, le professionnalisme et l’impartialité en matière de maintien de l’ordre sont particulièrement mis à mal depuis deux ans. La police est directement impliquée dans les actes de torture, les autres mauvais traitement et l’arrestation arbitraire dont ont fait l’objet des opposants membres du Movement for Democratic Change (MDC, Mouvement pour le changement démocratique). Elle s’est également faite complice d’actes de violence, d’incendies volontaires et de viols commis dans tout le pays par les milices soutenues par le gouvernement et agissant contre les partisans du MDC.

Il est impérieux de remédier à cette situation : il y va de l’autorité et de l’intégrité de la SARPCCO et des institutions mêmes de la SADC.
Ailleurs dans la région, l’inquiétude grandissante de la population devant les crimes violents incite les gouvernements et les autorités policières à combattre la délinquance par « tous les moyens nécessaires », en particulier lorsque des policiers figurent eux-mêmes parmi les victimes de criminels armés. Dans plusieurs États membres de la SADC (en Afrique du Sud, en Angola, au Mozambique et en Zambie, par exemple), cette tendance s’est traduite par des arrestations arbitraires, des actes de torture, voire des homicides sur la personne de suspects de droit commun. La violence de certains groupes d’autodéfense, en Afrique du Sud, au Malawi, en Tanzanie ou encore en Zambie, ne fait qu’envenimer une situation déjà proche de la crise.

En Afrique du Sud, cette pression populaire en faveur d’une répression sans merci de la délinquance a commencé à s’exercer alors que le pays venait à peine de tourner la page de l’apartheid et de ses pratiques. Dans un arrêt important du 21 mai 2002 portant sur l’usage de la force, la Cour constitutionnelle a cependant bien précisé, tout en reconnaissant le droit des policiers de se défendre, que l’État ne doit jamais autoriser le recours à une force excessive et qu’il doit faire respecter les droits humains de tous, y compris des suspects de droit commun.

« Cet appel pourrait être lancé à d’autres pays de la SADC, a déclaré Amnesty International. Tous les gouvernements de la région doivent faire preuve d’une plus grande volonté politique pour chercher des solutions à l’augmentation de la délinquance violente qui soient compatibles avec la protection des droits humains. » Ils doivent faire comprendre à l’opinion publique que les vraies solutions consistent à améliorer la capacité de la police à enquêter en toute légalité, avec efficacité et en collaboration avec les communautés concernées.

Les membres d’Amnesty International et d’autres organisations de la société civile dans les pays de la SADC prennent actuellement contact avec leurs gouvernements respectifs pour les inciter à faire en sorte que le respect des droits humains soit au cœur de tout maintien de l’ordre responsable et que les mesures visant à améliorer l’efficacité de la police aient également pour effet de promouvoir le respect des droits de la personne.

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