CONSEIL DE L’EUROPE : Élaboration d’une Convention européenne pour lutter contre la traite des êtres humains : agir en toute transparence

Index AI : IOR 30/015/2004
ÉFAI
Mardi 1er juin 2004

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International lancent un appel au Conseil de l’Europe pour qu’il :
 publie sans délai et distribue le projet de Convention européenne en cours d’élaboration visant à lutter contre la traite des êtres humains, afin de permettre aux organisations non-gouvernementales (ONG) et aux différents experts de fournir au Comité ad hoc sur la lutte contre la traite des êtres humains (CAHTEH) leurs observations avant les délibérations, prévues fin juin, sur les dispositions visant à protéger les droits humains des personnes victimes de trafic ;
 veille à ce que les ONG et experts concernés soient invités à adresser sans délai au CAHTEH leurs commentaires sur les questions relatives à la protection des droits humains des personnes victimes de trafic, de façon à ce que les avis de ces experts soient pris en compte lors de l’élaboration du texte ;
 recommande que les gouvernements des 45 États membres du Conseil de l’Europe entament des consultations avec les ONG et les experts de leurs pays respectifs travaillant à la défense de personnes victimes de trafic, ou en contact avec elles, pour l’élaboration de la Convention. Leurs avis et recommandations doivent être pris en compte dans le processus d’élaboration de ce traité.
Complément d’information
Le Conseil des ministres du Conseil de l’Europe a donné mandat au Comité ad hoc sur la lutte contre la traite des êtres humains (CAHTEH) pour qu’il élabore d’ici à la fin de l’année un projet de Convention européenne pour lutter contre la traite des êtres humains. Le Conseil des ministres a spécifiquement demandé au CAHTEH de mettre l’accent tout particulièrement sur « les droits fondamentaux des victimes de la traite », de « concevoir un cadre assurant une protection et une aide complète aux victimes et aux témoins », ainsi que sur la prévention, l’instruction et la poursuite efficaces de ces infractions et sur la coopération internationale en la matière.
L’élaboration du texte de ce traité par le CAHTEH, composé principalement de représentants des États membres du Conseil de l’Europe, est en cours. Selon les informations qui ont été rendues publiques, le CAHTEH doit se réunir encore trois fois avant de présenter son projet de texte au Conseil des ministres à la fin de l’année 2004.
Le CAHTEH devrait débattre des dispositions visant à protéger les droits des personnes victimes de la traite lors de sa prochaine rencontre à la fin du mois de juin 2004.
Le travail du CAHTEH se fait de façon relativement discrète : le projet de texte en cours d’élaboration, les rapports de travail et même les noms des membres du CAHTEH n’ont pas été rendus publics.

L’opinion d’Amnesty International et de l’organisation Anti-Esclavage International :
Le nombre de personnes concernées par cette forme moderne d’esclavage ayant considérablement augmenté dans les pays du Conseil de l’Europe au cours des dix dernières années, Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International saluent la décision du Conseil de l’Europe de s’intéresser à la traite des êtres humains.
La traite d’êtres humains est une atteinte aux droits fondamentaux des personnes. Elle se traduit par une atteinte aux droits humains et, en particulier, le droit à l’intégrité physique et mentale, à la vie, à la liberté, à la sécurité des personnes, à la dignité, à la liberté de ne pas être esclave ; c’est une atteinte au droit à ne pas être soumis à des pratiques s’apparentant à de l’esclavage, à des actes de torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, au droit à une vie de famille, à la liberté de mouvement, à une vie privée, à accéder au niveau de santé le plus élevé possible et à un logement sûr et non exposé à des risques. Les mesures visant à réprimer le trafic d’êtres humains doivent avoir la protection et le respect de ces droits comme préoccupation principale ; elles doivent aussi prendre en compte le droit des personnes victimes de trafic à obtenir réparation, y compris sous forme de dommages et intérêts, pour les atteintes aux droits humains dont elles ont été victimes.
Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International saluent en particulier la reconnaissance, par le Conseil des ministres, à travers la mission confiée au CAHTEH, du besoin de nouvelles normes pour améliorer la protection des droits des personnes victimes de trafic.
Pour remplir sa mission, le CAHTEH doit veiller à ce que les dispositions du traité qu’il propose améliorent la protection des personnes victimes de trafic. Cela implique qu’il propose un texte qui marque un progrès par rapport aux dispositions actuelles des traités internationaux et de nombreuses législations nationales et qui exige des États qu’ils prennent des mesures particulières visant à protéger et faire respecter les droits des personnes victimes de trafic.
S’il réussit à faire cela, le Conseil de l’Europe comblera une lacune importante, aucun traité international relatif à la traite des êtres humains ne tenant compte à ce jour des obligations des États à respecter et protéger les droits des personnes victimes de trafic.
En mai 2004, Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International ont publié un document intitulé Memorandum on the draft European Convention on Action against Trafficking in Human beings : Protection of the Rights of Trafficked Persons (index AI : IOR 61/011/2004, http://web.amnesty.org/library/index/engior610112004). À partir des connaissances accumulées par les deux organisations et de leur expérience dans le domaine de la protection des droits humains des personnes, notamment les personnes victimes de trafic, le texte met en avant un certain nombre de dispositions qu’Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International considèrent qu’il serait important d’inclure dans la Convention européenne sur la lutte contre la traite des êtres humains afin d’assurer le respect et la protection des droits des personnes victimes de trafic.
Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International ont également demandé au CAHTEH de tenir compte de l’expérience des personnes victimes de trafic ainsi que d’ONG et d’experts ayant travaillé sur ces questions. À cette fin, Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International ont adressé deux demandes d’audience au CAHTEH ; d’autres ONG auraient fait la même démarche. Nous regrettons que nos démarches n’aient pas abouti.
Amnesty International et l’organisation Anti-Esclavage International considèrent qu’il ne fait pas de doutes que le travail du CAHTEH, dont l’action vise à renforcer la protection des personnes victimes de la traite, bénéficierait de l’apport d’expérience de personnes victimes de trafic, d’ONG et d’autres groupes ayant développé une expertise sur les questions relatives à la protection des droits des victimes d’atteintes aux droits humains, en particulier ceux qui travaillent au contact des victimes de la traite ou assurent leur défense. Leur contribution sera forcément limitée en l’absence de toute concertation avec les auteurs du projet, dont le texte n’est par ailleurs pas disponible.
Nous estimons que la mise en œuvre des trois recommandations exprimées plus haut, qui vont dans le sens du Conseil de l’Europe qui s’est engagé à coopérer avec la société civile, pourra aider à l’élaboration d’un projet de traité par le Conseil de l’Europe qui conçoive effectivement un cadre assurant la protection et le respect des droits des victimes de la traite.

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