Conseil de l’Europe. Une étape importante est franchie en ce qui concerne la protection des victimes de la traite des êtres humains

Déclaration publique

IOR 30/022/2007

Amnesty International se félicite de l’annonce, ce mercredi 24 octobre, que la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains entrera en vigueur le 1er février 2008. À ce jour, 10 États en Europe se sont engagés à respecter et protéger les droits des victimes de la traite en devenant parties à cette Convention.

L’organisation appelle les 37 autres États membres du Conseil de l’Europe, ainsi que l’Union européenne, et les autres pays à suivre le mouvement engagé par l’Albanie, l’Autriche, la Bulgarie, Chypre, la Croatie, le Danemark, la Géorgie, la Moldavie, la Roumanie et la Slovaquie, en devenant à leur tour parties à cette Convention et en mettant en œuvre ses dispositions.

En Europe, ou en passant dans l’un des pays d’Europe, des femmes, des hommes et des enfants sont soumis à la traite dans des secteurs tels que la domesticité, l’agriculture, le bâtiment, l’hôtellerie et la prostitution. Il n’y a pas de données fiables sur ce crime international, en raison notamment de sa nature clandestine et de la difficulté qu’il y a à localiser les victimes et à les identifier avec précision, mais on estime qu’à l’échelle internationale le nombre de victimes se compte en millions.

À chaque étape de cet enfer, c’est la dignité même des personnes victimes de la traite qui est violée. Les victimes de la traite sont en règle générale soumises à des violations multiples des droits humains. Nombre de ces personnes sont enlevées, maintenues contre leur gré dans des conditions précaires, frappées, soumises à des violences sexuelles et à d’autres formes de torture. Souvent, elles sont privées de leur droit à l’intégrité physique et mentale ; de leur droit à la liberté et la sûreté de leur personne ; de leur droit à ne pas être soumises à l’esclavage ou à des pratiques s’apparentant à l’esclavage ; de leur droit à ne pas être torturées ou soumises à d’autres formes de traitement inhumain ou dégradant ; de leur droit à la vie de famille ; de leur droit à la liberté de mouvement ; de leur droit au respect de leur vie privée ; de leur droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint ; de leur droit à un logement sûr.

Quand leur cas parvient à la connaissance des autorités, celles-ci, au lieu de les considérer comme des victimes de crimes haineux, les traitent comme des malfaiteurs, des étrangers en situation irrégulière et, si des poursuites sont engagées contre les trafiquants, comme des outils utiles à la justice. Les répercussions psychologiques, médicales et sociales des épreuves subies par les personnes victimes de la traite ainsi que les causes sous-jacentes (y compris les facteurs d’entraînement) sont rarement prises en compte. L’assistance qui est parfois offerte aux personnes victimes de la traite pour les aider à surmonter leur épreuve est le plus souvent tributaire de leur coopération aux poursuites à engager contre les trafiquants. Une telle coopération place souvent les victimes de la traite et les membres de leur famille à la merci de représailles des trafiquants.

Il est très rare que les victimes de la traite obtiennent justice, sous forme de réparation, d’indemnisation, de restitution et de réadaptation, pour les atteintes aux droits fondamentaux dont elles ont fait l’objet. Les étrangers n’ayant pas de permis de séjour dans le pays dans lequel ils sont retrouvés sont le plus souvent renvoyés dans leur pays sans aucune prise en considération des risques qu’ils courent à leur retour d’être de nouveau soumis à la traite ou victimes de violences aux mains des trafiquants ou d’autres personnes.

Les États qui deviennent parties à la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains s’engagent à adopter une autre attitude. Ils feront non seulement le nécessaire individuellement ou collectivement pour ériger la traite en infraction mais prendront également toutes une série de mesures pour le respect et la protection des droits des victimes de la traite.

En application de la Convention, un groupe d’experts indépendants chargé d’aider les États à mettre ce traité en application doit en outre être créé d’ici février 2009. Ses membres seront élus parmi des candidats présentés par les États parties à la Convention.

Amnesty International appelle les États et le Conseil de l’Europe à veiller à ce que le processus régissant le dépôt des candidatures et l’élection des membres de cette instance soit ouvert et transparent et favorise les candidatures de personnes indépendantes et compétentes. L’organisation leur demande également de veiller à ce que ce comité dispose des ressources nécessaires pour remplir ses fonctions.

Complément d’information

Tous les États membres du Conseil de l’Europe ainsi que les autres États ayant œuvré à l’élaboration de ce traité et l’Union européenne peuvent signer et ratifier la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains.

La majorité des États membres du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne sont déjà parties au traité des Nations unies le plus récent sur la traite des êtres humains, connu sous le nom de Protocole de Palerme. Ce traité a bien établi une définition internationalement reconnue de la traite des êtres humains, et il demande aux États d’assimiler la traite à une infraction, de poursuivre les trafiquants et de prendre des mesures pour empêcher la traite, y compris en s’attaquant aux problèmes de main d’œuvre favorisant ce phénomène, mais la plupart de ses dispositions qui visent à protéger les droits des victimes de la traite se présentent sous la forme de recommandations plutôt que d’obligations.

Conscients de ce qu’il fallait faire plus pour assurer le respect et la protection des victimes de la traite, les États membres du Conseil de l’Europe ont adopté la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains le 3 mai 2005. La Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains fixe un minimum de mesures d’aide et de protection que les États parties doivent prendre pour protéger et respecter les droits des victimes de la traite. Parmi elles figurent l’obligation de fournir aux personnes dont on pense raisonnablement qu’elles ont été victimes de la traite des conditions de vie adaptées ; un hébergement convenable et sûr ; l’accès aux soins médicaux d’urgence ; une aide en matière de traduction et d’interprétation ; des conseils et des informations concernant les droits que la loi leur reconnaît ; une aide juridique ; une période de convalescence et de réflexion dans le pays dans lequel elles ont été trouvées d’au moins trente jours, et l’accès à l’éducation pour les enfants.

Les 37 États membres du Conseil de l’Europe qui ne sont pas encore parties à la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains sont les suivants : Allemagne, Andorre, Arménie, Azerbaïdjan, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Macédoine (Ex-République yougoslave de), Malte, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Principauté de Monaco, République tchèque, Royaume-Uni, Russie, Saint-Marin, Serbie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie, Ukraine.

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